lundi 3 juillet 2017

Macron méprise les gens qui ne sont rien( le grand soir via planète 360)

 
Macron devient-il notre roi délire ? Après avoir, pour les cérémonies du 18 juin, interdit l’entrée au public « ordinaire », il se prépare à intégrer le « droit » d’exception dans le droit commun. Sans parler du Code du travail mis à la poubelle, des retraites rognées et la Sécu au rabais. Nous roulons vers l’abîme ? Alors chantons, comme sur le pont du Titanic à l’instant du naufrage. Que diriez vous du Chant des Partisans ?
Sur le Mont-Valérien, Macron ne vaut pas grand-chose… Le 18 juin, lors de la commémoration rituelle de l’appel à la résistance lancé par De Gaulle, le tout neuf président de la France a refusé l’accès de la cérémonie aux Français ordinaires, aux dépourvus d’invitation, de Bristol à lettres d’or. Craignait-il que, saisi d’un syndrome mélenchonien, l’ombre du Général ressuscitée en hologramme ne vienne effacer la sienne ? Ce n’est pas le nouveau Jupiter, accouché de la pyramide du Louvre, qui nous dira le contraire : l’homme vit aussi de symboles et de rites. Là, devant les portes du fort qui coiffe le Mont-Valérien, c’est la première fois depuis le 1er novembre 1944 que les manants ont été interdits de ce recueillement collectif.
Hollande conchiait les « sans-dents », Macron, lui, les sans-grade, les sans-diplôme, les sans-Sciences-Po, les sans-famille qui ne sont pas issus des « deux-cents ». Et aussi les « illettrées ». C’est ainsi que le 17 septembre 2014 à Josselin il a qualifié les ouvrières bretonnes de l’usine Gad. Quand il aime la foule, le président de la France la veut comme les fans de Johnny à Bercy. Mais il déteste le peuple et lui interdit même d’entonner le Chant des Partisans. Un hymne lent et mortel, pas du tout écrit en marche, et que l’on n’a pas coutume d’écouter en posant la main droite sur le cœur, façon Hollywood. En gros, la société qui a fait la queue devant le fort où discourait le président n’était pas assez civile. Et les tricards ont compris le message : « Ben quoi ? C’est ça la nouvelle démocratie ! », a entendu le reporter du quotidien Le Parisien. Ou encore : « Une cérémonie de l’entre-soi… C’est quoi, ça ? » Enfin, la phrase d’une femme âgée expliquant sa raison d’être et d’être ici : « Parce que c’est l’appel du général de Gaulle et pour que la France reste la France. »
Puisque nous parlons de Résistance, la discrète protestation des exclus du Mont-Valérien me fait penser à l’Indignez-vous lancé par Stéphane Hessel en 2010. Qu’est devenu le grand espoir né de ces quelques pages, l’impression en petit livre d’un discours prononcé par ce héros de la France libre lors d’une cérémonie sur les cendres du maquis des Glières ? Aurait-il muté en macronmanie ? Pourtant, 4 millions d’exemplaires d’un fascicule incandescent traduit en 34 langues, ça devrait laisser des traces. Où sont les indignés désormais invisibles ?
Soyons optimistes, les futurs révoltés finissent d’avaler leur dégoût avant de monter aux barricades. C’est dans un moment d’histoire noire, où se croisaient bien des douleurs, que le texte d’Hessel est né. L’excellent Stéphane était alors ému par le sort des sans-papiers, par la « réforme » des retraites, le sabotage de la planète et l’écart de plus en plus abyssal entre riches et pauvres. « Réveil public d’un peuple qui était jusqu’à présent très passif », a alors écrit Edgar Morin. Réveillé. Et aussi sec rendormi. Et de nouveau les yeux ouverts après l’atterrissage d’un néo-Jupiter à la tête de la France ? Puisqu’il est certain, vu les poignards que Macron s’apprête à lancer contre les ultimes lambeaux de notre pacte national issu de la Résistance, que le réveil va sonner, dur comme une sirène.
Résistance, Conseil national de la Résistance, Mont-Valérien, Glières… autant de gros mots. Si peu modernes, si peu start-up, si peu Davos pour notre génie de la pastille, celle amère qu’il veut nous faire avaler de force. Certes, s’ils tiennent le coup et ne se disloquent pas, les 500 000 Insoumis de Mélenchon sont une cohorte prometteuse, prête à se coucher en travers de la route du bulldozer éradicateur lancé depuis Wall Sreet, avec Emmanuel au volant.
Observons que dans sa courte invite à l’indignation, parvis de la révolte, Hessel n’a pas oublié de citer – dans le lot des injustices majeures commises dans le monde – celui de la Palestine. Ce rappel, qui n’était que l’accomplissement d’un devoir, a pourtant déclenché une tempête. Un certain Marc Knobel, « chercheur au Crif », a alors accusé l’espiègle et rigoureux Stéphane de « tenter de légitimer le terrorisme ». Alors que Boris Cyrulnik, un savant de kiosques de gare, critique le principe même d’indignation et que Pierre Assouline, en pompier de service, détruit le texte qui « dégouline de bons sentiments ». Rescapé des fusilleurs de l’occupation, Hessel est symboliquement flingué en retard.
Si je fais ce rappel à la Palestine, qui sombre doucement dans un silence digne, c’est pour en revenir à Macron. J’ai déjà décrit ici comment chaque militant d’En marche, candidat à la députation, avait été passé au scanner afin d’être certain que l’impétrant n’avait pas prononcé de toute sa vie une syllabe contre la politique d’Israël. C’est clair, Macron et son équipage sont bien des sionistes compulsifs, avec pour arbitre des élégances une dénommée Laurence Haïm. Une star de la police de la pensée qui cumule les fonctions d’attachée de presse de Jupiter, de propagandiste de Netanyahu et aussi d’un marchand de costumes du 2e arrondissement de Paris.
Si, dans la politique de Hollande, le sort de la Palestine a été mis au congélateur, dès l’arrivée de Macron il est déplacé vers la poubelle. Alors, que dire du sort de Georges Ibrahim Abdallah, militant révolutionnaire qui, luttant pour la libération de la Palestine à l’époque de massacre du Sabra et Chatila, meurt dans une prison française depuis 34 ans ! En passe de battre le titre de « plus vieux prisonnier politique du monde ». Puisque son groupe, les Fractions armées révolutionnaires libanaises, est accusé d’avoir, en 1982 à Paris, abattu un officier américain, chaque année le département d’État américain n’oublie pas de renouveler l’ordre donné à la France, celui de conserver Abdallah en prison. Dans une missive exprès, Hillary Clinton n’a pas manqué à la coutume. Aujourd’hui, Abdallah n’est plus un prisonnier, mais un otage de la France. En 2003, le tribunal correctionnel de Pau a accordé la mise en liberté de ce combattant en lutte pour une Palestine libre et indépendante. Voilà donc treize années qu’une première mesure d’élargissement a été prise, puis réitérée en 2012, en vain, pour un homme qui « n’a pas de sang sur les mains ». Les amateurs de comparaisons noteront que Jean-Marc Rouillant, le chef d’Action directe condamné pour des crimes (dont l’assassinat du PDG de Renault), se promène librement dans nos rues…
Interdictions de manifester, promulgation attendue d’une loi d’exception réduisant les libertés publiques : la conjonction d’une idéologie policière et d’un désir d’ordre – si utile pour le business –, et la France s’enfonce dans le classement qui mesure les indices de la liberté. Il suffit pour le constater de cliquer sur le site d’Amnesty International, une structure qui, pourtant, ne veut que le meilleur pour les pays de l’Otan.
Le new deal français est aujourd’hui le suivant : « Nous vous protégeons, vous citoyens, du terrorisme, mais laissez-nous, nous autres, terroriser le Code du travail. » Convaincu par le matraquage médiatique qu’un djihadiste peut aisément se cacher sous son lit, le Français n’a plus qu’un choix, pousser un « hosannah ! » destiné au Jupiter qui le sauve. Pourtant, le très savant Michel Serres qui n’est pas un énergumène a calculé que le risque d’être victime d’un attentat était comparable à celui d’être touché par une météorite. « La stratégie de la tension » éprouvée en Italie il y a quarante ans semble être un outil politique qui ne vieillit pas. C’est sans doute pour en faire une bonne lecture que, dans le magazine Elle, Emmanuel Macron, sans même sourire, a conseillé aux jeunes Français de « lire Karl Marx ». Tout va bien.
Jacques-Marie BOURGET
Article publié dans le mensuel Afrique Asie de juillet 2017

samedi 1 juillet 2017

Allocations chômage, diagnostics immobiliers, retraites… Tout ce qui change au 1er juillet…(Les moutons enragés)

0.19 centimes d’euro de revalorisation pour les chômeurs, c’est une aumône méprisante. Pourquoi se gêner tout le monde accepte… Pendant ce temps, POLEMIQUE, le maire d’Orléans n’est plus député: il s’augmente de 300%. Également élu président de la Métropole d’Orléans, sa rémunération globale s’élève à environ 8000 euros par mois.
Nouveau mois, nouvelles règles. Comme chaque été, le début du mois de juillet coïncide avec la mise en application de nouvelles réglementations et de nouveaux tarifs. Tour d’horizon des principaux changements qui auront un impact sur votre vie quotidienne.
L’absence de vignette Crit’Air verbalisée à Paris
Fin de la « période pédagogique. Après six mois d’expérimentation (sans sanction) les automobilistes parisiens qui n’ont pas apposé la vignette Crit’Air sur leur pare-brise s’exposeront à une amende d’un montant de 68 euros à partir du 1er juillet 2017. La capitale, première Zone à circulation restreinte (ZCR) de France, a imposé depuis le 15 janvier le port de ce système de macaron. Cette vignette de diverses couleurs, délivrée par le ministère de l’Environnement, identifie les véhicules selon leurs émissions polluantes (oxydes d’azote, particules). Si vous ne l’avez pas encore commandée, il est plus que temps de le faire : dirigez-vous sur le site dédié www.certificat-air.gouv.fr., muni du certificat d’immatriculation (anciennement carte grise) de votre véhicule et croisez les doigts pour ne pas vous faire contrôler dans les 30 prochains jours (la durée indicative d’expédition).
Par ailleurs, la circulation des véhicules Crit’Air 5 sera restreinte. « Les véhicules légers, poids lourds et véhicules utilitaires légers portant la vignette Crit’Air 5 ne pourront plus circuler à Paris de 8h à 20h, du lundi au vendredi », précise la ville sur son site Internet.
Des allocations-chômage (légèrement) revalorisées (*0.19€*)
A partir du 1er juillet 2017, l’allocation minimale, la partie fixe de l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE) et l’allocation minimale pour les allocataires effectuant une formation sont revalorisés de 0,65 %. « Cette revalorisation concerne près de 94 % des demandeurs d’emploi indemnisés par l’Assurance chômage au 1er juillet 2017, soit environ 2,5 millions de personnes », a précisé l’Unedic. Dans le détail, l’allocation minimale passera ainsi au 1er juillet à 28,86 euros par jour (contre 28,67 actuellement).. À Mayotte, elle sera portée à 14,42 euros par jour.
Les diagnostics électricité et gaz obligatoires aussi pour les locations
Nouvelles obligations pour les propriétaires qui souhaitent louer leur logement vide ou meublé : à partir du 1er juillet, deux nouveaux diagnostics concernant les installations d’électricité et de gaz devront être réalisés par un professionnel accrédité et annexé au contrat de location du locataire. L’obligation porte dans un premier temps sur les immeubles antérieurs à 1975. Elle sera étendue à tous les baux dès janvier 2018. Les logements concernés sont ceux dont l’installation du gaz ou d’électricité a plus de 15 ans ou dont le dernier certificat de conformité date de plus de 15 ans.
Un seul format de plaque d’immatriculation autorisé pour les deux roues et quads
Préfet du Gard (Twitter)
Une mesure qui fait grogner. A partir de ce samedi 1er juillet, tous les véhicules à deux ou trois roues motorisés, ainsi que les quads, devront être équipés d’une plaque d’immatriculation de 21×13 cm.Objectif officiel : « simplifier le contrôle des forces de l’ordre » en rendant tous les conducteurs égaux devant les radars. Et gare aux sanctions à partir de samedi : « Tout conducteur de véhicule intercepté avec une plaque non conforme, illisible ou amovible sera sanctionné d’une amende de 4e classe (135 euros) », précise le ministère. Toutefois, le contrevenant ne subit aucun retrait de points pour cette infraction.
Liquidation unique des retraites pour les « polypensionnés »
La liquidation unique des régimes alignés (Lura), instituée par la loi Touraine de 2014, entre en vigueur. A partir du 1er juillet, les personnes ayant cotisé à plusieurs régimes de retraite dits « alignés » (régime général, salariés agricoles, RSI), vont pouvoir bénéficier de la liquidation unique des pensions de retraite. Selon une note transmise au Conseil d’orientation des retraites par la Caisse nationale d’assurance-vieillesse (CNAV), consultée par Les Echos cette mesure technique se traduira « par une perte moyenne de pension de l’ordre de 0,9 % chez l’ensemble des nouveaux retraités qui y sont affiliés entre 2018 et 2037 ». Dans le détail, entre 2017 et 2030, deux tiers des polypensionnés venant de liquider leurs droits risquent de percevoir une pension plus faible. Mais entre un quart et un tiers toucheront, au contraire, plus d’argent.

Europe en crise cherche stratégie française, par Jacques Sapir (via les crises)

source : Russeurope, Jacques Sapir, 26-06-2017
La presse commence, enfin, à s’inquiéter de la crise bancaire que l’on connaît en Espagne et en Italie[1]. Cela montre l’importance d’une crise, sur laquelle on ne peut que recommander à nos lecteurs d’écouter l’émission réalisée vendredi 23 sur Radio-Sputnik[2], une crise donc qui a été pourtant niée avec la dernière énergie jusqu’à ces derniers jours. Ceci devrait nous interroger sur la manière dont les grands médias d’information rendent compte des problèmes au sein de l’Union européenne. Et cette interrogation est d’autant plus importante que ces mêmes médias nous ont présenté une image idyllique, et fort éloignée de la réalité, du premier sommet européen auquel Emmanuel Macron a participé[3]. La réalité qui se dégage d’un examen des faits montre qu’il y a un lien très net entre la crise des banques en Italie et en Espagne et le blocage structurel de l’Union européenne, blocage auquel Emmanuel Macron s’est heurté de plein fouet jeudi et vendredi dernier[4]. Cette situation pose un problème existentiel pour l’Union européenne.

Macron à Bruxelles : chronique d’un échec
Emmanuel Macron a développé un discours qui cherche à présenter comme compatibles des mesures minimales de protection dans le cadre de l’UE et une alliance avec l’Allemagne visant à faire progresser l’UE sur le chemin du fédéralisme. Dans la logique de ce discours c’est en étant associées que la France et l’Allemagne pourront convaincre leurs partenaires de mettre en œuvre les mesures de protection, concernant les travailleurs détachés ou les investissements, que la France réclame. Ce discours part du principe qu’un intérêt général théorique peut être défini avant que ne s’engage le moindre débat, et que cet intérêt peut s’imposer par la seule force de sa simple logique.
Emmanuel Macron a rapidement été confronté à la réalité des relations internationales. Lors du Conseil des 22 et 23 juin 2017 rien n’a été fait sur la question des travailleurs détachés, sujet sur lequel la France avait demandé un durcissement immédiat de la réglementation. La France ne fut d’ailleurs nullement soutenue par l’Allemagne, et ceci contrairement à ce qui avait été prétendu à la veille de ce Conseil. Le bilan est un peu meilleur sur la question de la protection des investissements. Le Conseil a accepté de se saisir de ce sujet, mais uniquement pour rappeler que les règles de l’OMC s’imposent et qu’aucune réglementation européenne ne peut s’y opposer. Enfin, sur la question du « Buy European Act », une idée qui avait figurée dans le programme d’Emmanuel Macron, il s’est heurté là aussi à une fin de non recevoir.
Emmanuel Macron s’est donc fendu d’une magnifique déclaration dans la langue de bois la plus pure en affirmant à la fin de ce Conseil : « Je veux dire ici combien à la fois le fait que nous ayons très étroitement préparé ensemble nos remarques à ce Conseil, que nos interventions aient été constamment en ligne et que nous puissions en rendre compte en commun est à mes yeux important. C’est en tout cas ce que je m’attacherai à faire, dans les années à venir, parce que je pense que quand l’Allemagne et la France parlent de la même voix, l’Europe peut avancer ; ce n’est parfois pas la condition suffisante mais c’est en tout cas la condition nécessaire. » Autrement dit, il accepte de se mettre sous la coupe de l’Allemagne et nous dit, mais est-ce étonnant alors que Paris va concourir pour les jeux olympiques de 2024, que l’importante n’est pas de gagner mais de participer. C’est, certes, une belle logique sportive, mais elle n’a rien à voir dans une situation où les intérêts supérieurs du pays et de ses habitants sont en cause.

Macron face à la réalité de l’UE
Emmanuel Macron s’est heurté de plein fouet à la réalité. Et celle-ci est d’une part que l’UE est aujourd’hui dans un état de paralysie avancé, et que d’autre part cet état de paralysie correspond à ce qui intéresse l’Allemagne et cette dernière ne fera rien pour s’y opposer ou pour le changer. Cette paralysie de l’UE implique le maintien d’un statu-quo qui est hautement favorable à l’Allemagne. Elle lui garantit que rien ne viendra combattre la politique mercantiliste qu’elle met en œuvre à l’intérieur de l’UE en se fournissant en produits et en hommes au moindre coût, et que l’UE ne se constituera nullement en autorité capable de contester la politique internationale de l’Allemagne. Elle est gagnante sur les deux tableaux, et l’erreur fondamentale d’Emmanuel Macron a été, et reste, d’ignorer cet état des choses.
Mais, Emmanuel Macron n’est pas le seul à s’être heurté à cette réalité. Le gouvernement italien a fait le même constat, remarquant que l’Union bancaire, dont l’UE avait fait une telle réclame en 2013 et 2014, s’est avérée incapable de résoudre la crise des banques en Italie. Il en a tiré les conséquences et il s’est engagé dans une logique de résolution de ces crises qui fait l’impasse sur l’Union bancaire et ses différents mécanismes[5]. En cela, il a été hautement symbolique que l’échec subi par Emmanuel Macron au Conseil européen des 22 et 23 juin soit survenu en même temps que la décision prise par le gouvernement italien d’agir de lui-même. Mais, cette décision du gouvernement italien peut avoir un effet à plus long terme. Elle va donner des arguments à l’Allemagne pour se refuser à avancer au-delà du point auquel elle est allée, sur la route de l’Union bancaire[6]. Le gouvernement italien n’avait certainement pas d’autre solution, mais ce faisant, il joue indirectement dans la main de l’Allemagne et renforce la position de cette dernière.
On voit ici comment les événements s’articulent. La réticence initiale de l’Allemagne avait compromis l’Union bancaire. L’Italie, faisant le constat de l’inachèvement de cette dernière, se décide d’agir par elle-même sans en respecter les règles. Si l’Union européenne a donné son aval, l’Allemagne voit ses réticences validées par le comportement italien et fera d’autant plus obstacle à la mise en place totale de l’Union bancaire. Cette dernière est morte de fait, et avec elle c’est un nouveau pan de l’Union Economique et Monétaire, autrement dit la zone Euro, qui disparaît.

La réalité de l’UE
Derrière ces événements différents, l’échec d’Emmanuel Macron et la décision italienne, ont voit se profiler la logique réelle de l’Union européenne. Cette dernière n’a actuellement pas d’autres buts, et pas d’autres fonctions, que d’imposer les conditions économiques voulues par l’Allemagne aux autres pays. Et, ces conditions économiques aboutissent à mettre les Etats sous la tutelle des marchés financiers et des grands groupes économiques, une situation qui correspond parfaitement aux intérêts actuels de l’Allemagne. Cette politique a pour symbole et pour instrument l’Euro, dont il est évident qu’il fonctionne économiquement comme une subvention pour l’Allemagne et politiquement comme un instrument disciplinaire dans les mains de l’Allemagne faisant en sorte que ce dernier pays n’ait pas à payer le prix pour sa domination qui ruine les autres pays. Toute politique vis-à-vis de l’UE qui ignorerait ces réalités est condamnée à l’échec.
Ce qui pose le problème de comment faire avancer les intérêts nationaux dans le cadre de l’UE. Si l’on considère que les intérêts nationaux de la France sont les mêmes que ceux de l’Allemagne, la réponse est simple. Et, en un sens, c’est ce que suppose implicitement l’attitude d’Emmanuel Macron. Pourtant, on connait bien toutes les différences et divergences qui existent, tant à l’échelle de la société (le taux de naissance) ou à l’échelle des structures des systèmes productifs. Cette position n’est guère réaliste. Une autre interprétation est qu’il pourrait exister une convergence entre les positions de la France et de l’Allemagne. Mais, cette convergence implique la définition d’un but commun. Or ce but doit être défini politiquement au travers d’un débat, et ce débat n’a jamais eu lieu. On est donc renvoyé à l’idée qu’Emmanuel Macron et ses conseillers ont adopté les intérêts allemands comme étant les intérêts français, sans tenir compte des différences et divergences citées. Mais si tel n’est pas le cas, si les intérêts de la France divergents de ceux de l’Allemagne, comment faire avancer ces intérêts ? Par ailleurs, dans ces intérêts, quels sont les intérêts que l’on peut définir comme « vitaux » et ceux sur lesquels des compromis sont possibles ? Faute de s’être livré cet exercice de définition des intérêts, la politique européenne d’Emmanuel Macron souffre d’un défaut irrémédiable. Et l’on retrouve ici le principe fondamental de la politique européenne d’Emmanuel Macron : chercher l’accord de l’Allemagne. Mais, ceci interdit à Emmanuel Macron de pouvoir définir les intérêts de la France, et surtout d’établir la distinction entre intérêts vitaux et intérêts non vitaux, car seul un conflit ouvert pourrait permettre de le faire. Il n’est pas d’intérêts existant en surplomb au débat. C’est dans ce dernier que ces intérêts se définissent.

L’erreur fondamentale d’Emmanuel Macron
On mesure ici l’erreur fondamentale que commet Emmanuel Macron en cherchant à priori un accord à tous prix avec l’Allemagne. C’est cette erreur qui explique l’échec qu’il a subi lors du Conseil européen des 22 et 23 juin. Et il ne pouvait en être qu’ainsi.
La question du levier politique qui pourrait (et qui devrait) être mobilisé par la France pour faire avancer ses intérêts se pose alors. Ce levier ne peut être qu’une crise imposant une autre logique que celle inscrite dans les traités. Mais, cette crise contient en elle la possibilité d’une rupture de l’Union européenne. Cette possibilité doit être acceptée comme telle, sinon, on se condamne d’emblée à l’immobilisme, et cet immobilisme est exactement ce qui convient à l’Allemagne.
Seule, une crise ouverte peut permettre de s’affranchir des règles internes de l’UE et provoquer un débat sur des règles alternatives. Mais, cette crise ne pourra être profitable que si nos partenaires sont persuadés de notre détermination, si certains intérêts ne sont pas reconnus, de sortir de l’UE. Pour établir cette détermination, et construire la crédibilité de notre position il convient de mettre en cause ce qui constitue aujourd’hui le cœur de la logique de l’UE (mais non le cœur de l’UE elle-même), soit l’Euro. La mise en cause ouverte et publique de la monnaie unique est le seul instrument qui soit à notre disposition pour forcer nos partenaires à accepter une refonte de l’Union européenne. L’atout qui est entre nos mains est que sans la France, l’Union européenne n’a plus guère d’intérêts pour l’Allemagne, mais aussi pour des pays comme l’Italie et l’Espagne. La France est politiquement, mais aussi économiquement et géographiquement (on l’oublie trop souvent), au cœur du projet de l’Union européenne. Qu’elle sorte de ce projet et ce dernier est mort. Il ne resterait alors aux autres pays que de rejoindre une « zone Mark », avec les effets de sujétion économique et politique qui en découleraient, ou construire des formes alternatives d’union, mais ces dernières les confronteraient directement à la politique française.
Dans le débat, et le conflit, qu’entraînerait une décision unilatérale de sortir de l’Euro, décision qui entraînerait rapidement un effet « boule de neige » pour les autres pays, il deviendrait possible de redéfinir les intérêts et les priorités de la France et des autres pays. Des formes de compromis découleraient de cela, et il conviendrait d’être alors constructif sur ces compromis. Mais, ceci constitue la seule, et sans doute la dernière, chance de transformer l’Union européenne et de dépasser la situation de blocage dans le statu-quo, situation qui correspond au choix, qu’il soit implicite ou explicite, de l’Allemagne.

L’histoire n’attend pas…
Emmanuel Macron est un homme intelligent. Mais, surmontera-t-il ses préjugés qui lui font croire que la survie de l’UE dans son état actuel est la moins mauvaise des solutions, de cela on peut en douter. S’il persiste dans sa politique, il ira d’échec en échec, et les français avec. Au-delà de cette question, au-delà de l’avenir immédiat de notre économie et de l’ampleur du chômage qui ronge notre société, il y a aussi la question des formes de coordination, tant économiques que politiques, entre les pays européens.
Mais, l’histoire n’attend pas. Emmanuel Macron devrait se souvenir de l’histoire de la crise du système soviétique en Europe et en URSS, une histoire dont il n’a de connaissance que livresque. La volonté de faire survivre à tous prix le système dans l’état où il se trouvait dans les années 1960 a été la cause politique profonde de sa mort. Ce qui est aujourd’hui en cause n’est rien d’autre que les formes de coordination entre les pays européens.
Emmanuel Macron entraîne tant l’économie de la France que la construction européenne dans une impasse du fait de sa politique actuelle de compromis avec l’Allemagne. Non que le compromis ne soit pas bon en lui-même, mais ce compromis ne peut être obtenu qu’une fois le conflit établi, et les marges d’action dans ce conflit clairement établies. En faisant du compromis un fétiche, une vache sacrée, il rend impossible la détermination et la définition des intérêts de la France et par conséquence la formation d’un réel compromis. Il ne laisse d’alternative qu’entre la capitulation la plus complète face à l’Allemagne et un sursaut désordonné, conduisant à un conflit d’autant plus inexpiable qu’il aurait été trop longtemps refoulé.
Source : Russeurope, Jacques Sapir, 26-06-2017

Pas de « droit à l’erreur » pour les allocataires de la Caf, soumis à des contrôles toujours plus invasifs (basta)

PAR 
Déclaration de revenus tous les trois mois, croisements de données avec les impôts, contrôle des relevés bancaires, visites à domicile… Il ne s’agit pas des nouvelles mesures concernant la transparence de la vie publique mais celles auxquelles se soumettent les bénéficiaires de minimas sociaux, en contrepartie d’un revenu de quelque 530 euros par mois. La Caf prévoit même, bientôt, de récupérer « à la source » les données personnelles des allocataires, auprès du Pôle emploi ou des services du fisc. En cas de contrôle, sans même une fraude avérée, les versements peuvent être suspendus. Et pas de « droit à l’erreur ». Parfois prompts à s’offusquer des nouvelles règles de transparence qui encadrent leur activité, nos élus se montrent pourtant moins choqués lorsqu’elles virent à l’abus de pouvoir contre les citoyens les plus précaires.
La transparence de la vie publique, appliquée aux élus, fait grincer des dents. Depuis quatre ans, les parlementaires français sont soumis à des obligations de transparence sur leurs revenus perçus en plus de leur salaire d’élu, ainsi que sur leur patrimoine. Plusieurs s’en sont plaint, y décelant une forme de populisme anti-parlementaire ou d’intrusion malsaine, d’autres s’y refusent en remplissant des déclarations plus qu’évasives. Certains gagnent pourtant des centaines de milliers d’euros annuels en plus de leurs indemnités en exerçant des activités parallèlement à leurs mandats. Outre le fait qu’ils doivent se tenir à l’écart de potentiels conflits d’intérêts, les élus de la République touchent pourtant de l’argent public : plus de 7200 euros bruts par mois pour les parlementaires, soit plus de 5700 euros nets. Quant à l’usage des frais de mandat – plus de 5000 euros nets par mois et par député – il n’est à ce jour soumis à aucun contrôle, pas même sur justificatifs.
A l’inverse, les personnes qui sont arrivées en fin de droits au chômage et reçoivent les minimas sociaux comme le Revenu de solidarité active (RSA) sont, elles, soumises à des obligations et contrôles draconiens, parfois jusqu’à leur domicile [1]. Elles doivent justifier de toutes rentrées d’argent, même des plus minimes, répondre à des questions sur la nature de leur relation avec leur éventuel colocataire… Et souvent, selon les témoignages que nous avons recueillis, les allocataires voient toutes leurs aides – RSA, aides au logement, prestations familiales – suspendues tant que le contrôle n’est pas terminé. Soit jusqu’à plusieurs semaines, voire plusieurs mois, passés sans aucun revenu.

Pendant les contrôles, la Caf coupe les vivres

« En mai, le RSA m’a été amputé de 50% de son montant, témoigne par exemple Dominique. Il m’a donc fallu passer le mois de juin avec 235 euros en poche. Tout cela parce que je n’ai pas reçu le courrier me demandant de prendre contact avec un travailleur social, pour signer le contrat d’insertion qui conditionne le versement du RSA. » Il y a aussi cette jeune mère qui, après le lancement d’une procédure de contrôle, a vu ses allocations suspendues pendant quatre mois, sans aucunes ressources, sans pouvoir s’acquitter de ses factures de fioul, de son loyer, des frais à régler pour l’école.
Ou Christine, mère de deux enfants dans l’Est de la France, dont le RSA, les prestations familiales et les aides au logement, ont été gelées pendant deux mois au printemps dernier, au cours d’un contrôle de situation : « Je me suis séparée de mon mari en novembre. Fin décembre, j’ai déposé une demande de RSA, qui a été acceptée début janvier. Mais début février, ma propriétaire m’a dit que le Caf lui avait signalé que les aides au logement, qu’elle recevait directement, n’allaient plus lui être versées. C’est mon assistante sociale qui s’est renseignée et a appris que j’étais sous le coup d’un contrôle de situation. En conséquence, la Caf avait coupé toutes les aides ! J’ai dû refaire un dossier. Les prestations n’ont été rétablies que deux mois plus tard. »
Pour faire une demande de RSA, il faut indiquer non seulement les revenus perçus au cours des trois derniers mois, mais aussi les économies détenues, les aides financières perçues, comme les allocations familiales, si l’on est propriétaire, locataire, ou logé à tire gratuit. Le formulaire de demande précise même que les parents isolés doivent faire une démarche de demande de pension alimentaire, et que les préfets peuvent enjoindre, « à titre exceptionnel » certes, les demandeurs de faire valoir leurs droits à une pension alimentaire vis-vis de leurs propres parents. C’est ce qui a été demandé à Margot, allocataire du RSA en Normandie depuis avril 2017. « J’ai reçu un courrier mi-juin où je devais préciser les ressources financières de mes parents, en vue de leur demander une pension alimentaire », rapporte-t-elle. Ayant retrouvé un emploi, je viens de me retirer par moi-même du dispositif de la Caf, donc je ne vais pas donner suite à cette demande du préfet. » Tout le monde n’a pas autant de chance.

Chasse à l’euro

Le RSA, c’est au maximum 535 euros pour une personne seule sans enfants, 802 euros pour un couple sans enfant. Tous les revenus du foyer en sont déduits. De même que, pour partie, les aides au logement. Concrètement, les allocataires doivent garder tous leurs relevés de compte pour pouvoir justifier de leurs revenus en cas de contrôle. Et faire une déclaration de revenus tous les trimestres, comprenant également les revenus non imposables. Les cadeaux en espèces de la famille, les indemnités de stage des enfants, le produit de la vente d’un meuble, d’une voiture, d’un vêtement lors d’un vide-grenier ou site de vente en ligne, tout cela est considéré comme faisant partie des revenus.
« J’ai subi un contrôle en février, raconte Sabine, une ancienne institutrice et libraire en Bretagne. Ce que je trouve normal, puisque cela fait deux ans que je perçois le RSA. Une contrôleuse est venue chez moi avec une collègue. J’avais préparé mes relevés de comptes en prévision. » À la vue de ses relevés, les contrôleurs ont jugé que Sabine avait omis de déclarer des revenus. La femme est présidente bénévole d’association, et est séparée du père de ses enfants. « En tant que présidente d’asso, j’avance parfois des achats que je me fais rembourser ensuite. Pour mes enfants, je ne touche pas de pension alimentaire mais je paie des vêtements, des choses dont ils ont besoin et que leur père me rembourse ensuite. Mais pour la Caf, ce sont des rentrées d’argent, alors que ce sont en fait des dépenses qu’on me rembourse, pas des revenus ! »

« Présumée coupable »

Résultat du contrôle : « J’ai été présumée fraudeuse », estime Sabine. La Caf lui a demandé de justifier des rentrées d’argent de quelques dizaines d’euros venant du père de ses enfants, et datant d’un an et demi. La mère célibataire a retrouvé les mails dans lesquels le père indiquait qu’il allait rembourser les sommes en question. Mais dans un premier temps, la Caf n’a pas considéré ces preuves comme suffisantes : « Il ne s’agit que d’échanges de mails que vous faites suivre et non une explication concernant tous les chèques ou virements perçus sur votre compte bancaire », lui a répondu la contrôleuse. La situation de Sabine a finalement été régularisée, mais ses aides ont été suspendues pendant plusieurs semaines.
Interrogé sur ces pratiques, le service de presse de la Caf assure qu’il n’y a que deux cas dans lesquels les droits peuvent être suspendus lors des contrôles : premièrement, lorsqu’un allocataire ne peut répondre aux questions qui lui sont posées (des demandes de justificatifs). Ses prestations peuvent alors être suspendues après un délai censé lui permettre d’apporter des clarifications. Deuxième cas : lorsqu’un allocataire « refuse de coopérer ».
Mais pour la Caf, en tout état de cause, « la suspension des prestations n’a lieu que si l’allocataire ne se soumet pas au contrôle. » Ce n’est pourtant pas l’expérience qu’a vécu Sabine : « En cas de contrôle, ils coupent tout en attendant les vérifications ! On est présumé coupable de fraude avant même que le contrôle soit terminé. J’ai la chance d’avoir des gens autour de moi qui peuvent m’aider, et assez d’assurance pour me rendre à la Caf et expliquer ma situation. Mais comment font les autres ? Avec ces pratiques, ils mettent les gens dans la panade. »

La moitié des allocataires contrôlés, moins de 1% de fraude

« Ils vont jusqu’à reprocher à des personnes d’avoir perçu une aide du Conseil départemental pour les aider à payer leur facture d’électricité, s’indigne aussi Joëlle Moreau, porte-parole de l’association AC ! (Agir ensemble contre le chômage). On leur demande alors de rembourser cette aide, car la Caf considère cela comme une fraude. Ils en sont là ! » « La Caf dispose d’un pouvoir de contrôle pour garantir la bonne utilisation des fonds publics »précise l’organisme sur son site. « Vous devez communiquer les informations et les pièces justificatives demandées, et dans les délais fixés », prévient-il. « Vous devez vous rendre disponible pour le contrôle selon les modalités proposées par le contrôleur. » À notre demande de précisions sur les contrôles pratiqués auprès des personnes au RSA, la Caf nous a envoyé ses « documents de presse » concernant sa politique de contrôle.
On y apprend qu’en 2016, sur 12,8 millions d’allocataires de la Caf (toutes prestations incluses), 7,2 millions ont été contrôlés, soit plus d’un allocataire sur deux. Mais qu’au final, les cas de « fraude » détectés par la Caf représentent seulement 0,36 % de la population des allocataires. En 2016, le montant moyen des fraudes détectées par la Caf s’élèverait à 6412 euros par fraude. Il s’agit cependant d’une moyenne, dont le chiffre peut être fortement amplifié par un nombre réduit de fraudes portant sur des montants importants.
Alors pourquoi contrôler plus de 50 % des allocataires pour 0,36 % de fraudeurs ? « Toutes les erreurs ne sont pas volontaires et elles ne profitent pas toujours à l’allocataire », reconnaît le directeur général de la Caisse nationale des allocations familiales, Daniel Lenoir, dans une newsletter de février 2017. Reste que la Caf, et les conseils départementaux qui sont chargés du paiement du RSA, ne lésinent pas sur les moyens.
En fait dans 90 % des cas, les allocataires ne savent pas qu’ils ont été contrôlés, assure la Caf. Car la plus grande partie de ces contrôles passent aujourd’hui par des échanges directs de données avec Pôle emploi ou les impôts, par exemple. « Les contrôleurs peuvent accéder aux informations et données des organismes privés tels que les employeurs, les fournisseurs d’énergie, les banques… », précise aussi la Caf. Qui dit même prévoir « accroitre les partenariats pour permettre la récupération à la source des données des allocataires. Des accords avec Pôle Emploi, l’Assurance maladie sont en cours. »

« Ils jettent les gens à la rue »

Les contrôles des bénéficiaires du RSA se font aussi à domicile. « Vivant en colocation depuis quelques années, d’abord avec une femme, puis avec un homme, j’ai subi un contrôle lors de ma seconde colocation afin de vérifier que nous n’étions pas un couple, témoigne Roland, qui habite dans le sud-ouest de la France. Après m’avoir d’abord coupé le versement du RSA et envoyé à plusieurs reprises un courrier d’avertissement, j’ai dû recevoir au bout de plusieurs mois un contrôleur à mon domicile. Et seulement après cette visite et de longs mois d’interruption des versements, ayant eu des conséquences financières graves, j’ai pu récupérer une vie normale », rapporte-t-il.
« Les contrôles les plus visibles, ce sont évidemment les contrôles à domicile, pour vérifier si le logement correspond à ce qui est déclaré, si la personne vit bien là, avec qui elle vit, si elle est en relation avec quelqu’un… Il faut justifier de tout, absolument tout déclarer, résume Christophe, de la Coordination des intermittents et précaires d’Ile-de-France. Le contrôle fait intrinsèquement partie du système RSA. En effet le montant est tellement bas qu’on ne peut en fait pas vivre avec, surtout à Paris. Du coup, à la limite, si l’on est pas mort, cela devient déjà suspect ! », ironise le conseiller bénévole.
Le RSA étant versé par les départements, l’ampleur des contrôles dépend aussi de leurs différentes politiques. L’an dernier, dans le Nord, le département a lancé une véritable traque en annonçant que 45 000 bénéficiaires du RSA, n’étant pas inscrits au Pôle emploi, allaient être contrôlés. 15 000 auraient déjà été sanctionnés. Or, en cas de RSA suspendu, les recours sont difficiles. « Le recours, c’est auprès du conseil départemental, mais c’est aussi lui qui abrite la commission disciplinaire des allocataires du RSA. Ensuite, le seul recours, c’est le tribunal administratif, mais peu de gens y vont, constate Joëlle Moreau. Ils se permettent de couper les minimas sociaux en sachant qu’en faisant cela, ils jettent les gens à la rue. Ces obligations de transparence, c’est en fait un moyen de couper les moyens de subsistance aux gens, pour faire des économies ». Des économies, mais à quel prix humain, social et collectif ?
Une loi accordant un « droit à l’erreur » face à l’administration sera présentée dans les prochaines semaines. Ce « droit à l’erreur » concernera les contribuables – particuliers ou employeurs – face au risque de sanction administrative en cas de déclaration fiscale ou Urssaf erronée. Sauf surprise, ce « droit à l’erreur » ne sera pas accordé aux allocataires de prestations familiales et aux bénéficiaires du RSA.
Rachel Knaebel
Dessins : Rodho
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Notes

[1
Depuis le 1er janvier 2016, le RSA activité a été remplacé par la Prime d’activité. Le RSA socle subsiste et a été (très légèrement) revalorisé le 1er avril 2017.

Guillaume Ancel, Lieutenant Colonel / Force d'action rapide (thinkerview)


Pierre Yves Rougeyron Curée de campagne 10