Par , , (9 juillet 2012)
Les grands projets ne connaissent pas l’austérité : un stade à 600 millions d’euros, une autoroute à 2 milliards, une gare à 4 milliards, une centrale nucléaire à 6 milliards, un tunnel à 8 milliards, un parc de loisirs à 26 milliards... De Nantes à Moscou en passant par les Alpes ou Berlin, tour d’horizon de ces chantiers pharaoniques jugés inutiles.
L’aéroport de Notre-dame-des-Landes
Lieu : Nantes, France
Coût : 600 millions d’€ pour la collectivité
Bénéficiaire : Vinci
Prévu au Nord-Ouest de Nantes depuis 40 ans, le futur aéroport international du Grand-Ouest est ressorti des cartons dans les années 2000, sous le gouvernement Jospin. Il a été déclaré d’utilité publique en février 2008. Deux ans plus tard, l’État en confie la construction et la gestion (pour cinquante-cinq ans) au groupe de BTP Vinci, qui vante les aspects écologiques de son aéroport... Une étude économique indépendante publiée en novembre 2011 chiffre son coût pour la collectivité à 600 millions d’euros. Outre cet impact financier, les opposants à l’aéroport (réunis au sein de l’ACIPA) dénoncent la destruction de terres agricoles (44 exploitations seraient impactées dont 5 ayant leur siège dans la zone destinée à être bétonnée). L’actuel premier ministre, Jean-Marc Ayrault, ancien député-maire de Nantes, est un farouche défenseur de ce projet, auquel sont opposés les membres d’Europe-écologie les Verts...
Le chantier de l’EPR
Lieu : Flamanville, France
Coût : 6 milliards d’euros
Bénéficiaire : Areva, EDF
Le réacteur pressurisé européen (EPR) a été conçu et développé par Areva. Objectif : améliorer la sûreté et la rentabilité économique. Selon les opposants à l’EPR, ce type de réacteur est encore plus dangereux que les précédents, en raison de sa puissance et du combustible utilisé : le MOX, un mélange d’oxydes de plutonium et d’uranium. L’EPR, c’est aussi un gouffre financier. Les diverses malfaçons enregistrées sur le chantier de Flamanville en Normandie ont multiplié la note par deux, pour atteindre 6 milliards d’euros. Pour l’instant... Idem à Olkiluoto, en Finlande. Deux autres EPR sont actuellement en construction en Chine. Pour le collectif Stop EPR les problèmes rencontrés au moment de la construction « pourraient avoir des conséquences graves en cas de situation accidentelle ». Une étude menée par les 7 vents du Cotentin montre qu’avec 3 milliards d’Euros (la somme de départ investie dans l’EPR), on aurait pu pourvoir aux mêmes besoins énergétiques, développer des sources d’énergie locales, respectueuses de l’environnement, et créer des emplois au moins 15 fois plus nombreux et mieux répartis sur l’ensemble du territoire.
Le stade de l’OL Land
Lieu : Décines-Charpieu (Est de Lyon), France
Coût : 450 millions d’euros
Bénéficiaire : OL Group, Vinci
« L’OL Land » est un projet pharaonique concocté par Jean-Michel Aulas, président de l’Olympique lyonnais, en vue de l’Euro 2016. Au menu pour 450 millions d’euros : un nouveau stade de 60 000 places, un centre d’entraînement, les bureaux du siège de l’OL Groupe, une boutique OL Stade, 7 000 places de stationnement, 8 000 mètres carrés d’immeubles de bureaux, deux hôtels de luxe… Le tout à 15 kilomètres du centre de Lyon. L’OL Groupe a sélectionné Vinci pour construire son grand stade. Mais depuis l’annonce du projet en 2007, le chantier n’a toujours pas démarré. Incapable de boucler son plan de financement qui nécessite au minimum 200 millions d’euros de fonds publics, l’OL Groupe est accusé de spéculations immobilières. La Foncière du Montout, propriétaire des terrains et dont l’OL est actionnaire majoritaire, vaudrait maintenant 200 millions d’euros pour des terrains acquis 22 millions d’euros ! L’OL Groupe se heurte également à la multiplication des recours déposés par les associations locales qui défendent la trentaine de paysans menacés d’expropriation. Depuis mai 2012, un campement a été installé sur le tracé du chantier. Le 26 juin dernier, le rapporteur public a requis devant le tribunal administratif l’invalidation de la Déclaration d’intérêt général du stade. Si la demande est suivie, elle pourrait conduire à l’arrêt des expropriations (Lire notre enquête).
Le grand stade de la Fédération française de rugby
Lieu : Évry Centre-Essonne, France
Coût : 600 millions d’euros
La Fédération française de rugby (FFR) ambitionne de devenir propriétaire de son propre stade d’ici 2017 pour y faire jouer le XV tricolore. Le coût de cet équipement de 82 000 places, doté d’un toit rétractable et d’une pelouse amovible, est estimé à 600 millions d’euros. La FFR assure « autofinancer » ce nouveau stade, mais compte néanmoins sur les collectivités locales pour se porter garantes des 450 millions d’euros d’emprunt nécessaires… et financer en prime les aménagements locaux autour du stade. Si le stade de la FFR voit le jour à Évry Centre-Essonne, à 25 kilomètres au sud de Paris, il pourrait déstabiliser l’économie de toutes les autres enceintes de la région (Stade de France, Racing 92, Stade Français, Charléty et Parc des Princes). Aménagement régional déséquilibré, utilité sociale douteuse, risques budgétaires élevés… L’inflation de stades de rugby inquiète aussi directement sur les territoires concernés. En l’absence de stratégie globale coordonnée, l’Île-de-France pourrait se transformer en cimetière « d’éléphants blancs », vastes équipements de rugby construits sans garanties pour l’avenir. Des paris inquiétants alors que les budgets publics pour l’accès au sport pour tous sont menacés (Lire notre enquête).
Une ligne de train grande vitesse entre Lyon et Turin
Lieu : Vallées de Suse, Alpes (France, Italie)
Coût : 8,5 milliards d’euros pour la partie internationale, 7 milliards d’euros pour les aménagements côté français.
Bénéficiaires : Réseau ferré de France, Réseau ferré d’Italie
Le projet de ligne ferroviaire entre Lyon et Turin, dont le percement d’un tunnel de 52 km sous les Alpes, est confirmé par un accord franco-italien signé le 30 janvier 2012. Les opposants à la TAV (« Treno alta velocità », Train à grande vitesse en italien) regrettent l’absence de véritable débat public sur l’utilité de ce projet pharaonique. Et préfèrent la modernisation de la ligne « historique » qui relie déjà les deux métropoles [1]Pour les promoteurs du projet, les capacités de la ligne existante seraient trop limitées. Les « pro-TAV » tablent sur 3,5 millions de voyageurs par an. D’autres estimations, reprises par les No-Tav n’en prévoient pas plus de 500 000, soit l’équivalent de deux aller-retour TGV par jour. Sans compter les nuisances d’un tel chantier : « C’est l’équivalent de 12 pyramides de Khéops qu’il faudra déplacer et stocker en Maurienne, Belledonne et dans le Sillon alpin ! Cela représente à peu près 460 camions-benne tous les jours, pendant quinze ans », illustre le Collectif No-TAV Savoie. 18 millions de m3 de déblais qui pourraient en plus contenir des poussières d’uranium et d’amiante présents dans la roche.
Le parc de loisirs espagnol Eurovegas
Lieu : Barcelone ou Madrid, Espagne
Coût : 26,6 milliards d’euros d’€
Bénéficiaire : Las Vegas Sands
Sheldon Adelson, 16e fortune mondiale prévoit de construire à Madrid ou Barcelone un immense complexe de loisirs : 12 hôtels de villégiature de 3 000 chambres chacun, incluant casinos ou terrains de golf, pour un investissement total de 26,6 milliards d’euros. Avec, à la clé, la promesse de 164 000 emplois directs et 97 000 indirects. En échange, le milliardaire demande une remise en cause du droit du travail, la révision de la loi sur le droit des étrangers, ou encore l’exonération de cotisations à la Sécurité sociale pendant deux ans... Deux collectifs, Eurovegas No à Madrid et Aturem Eurovegas à Barcelone ont décidé d’informer les citoyens sur l’impact social, économique et urbanistique du projet du magnat de Las Vegas. D’après un rapport qu’il ont récemment publié, l’investissement public pourrait s’envoler de 950 millions à 2,5 milliards d’euros ! En plus du financement de 60 % des coûts de formation des employés, Sheldon Adelson demande aussi la construction d’une station de métro qui débouche dans le complexe, la construction de nouvelles sorties d’autoroute pour faciliter l’accès au casino, et un héliport. Au fait quelqu’un a-t-il entendu parler d’austérité ? (Lire notre enquête)
La gare souterraine Stuttgart 21
Lieu : Stuttgart, Allemagne
Coût : 4,3 milliards d’euros
Bénéficiaire : Deutsche Bahn
Lancé par la Deutsche Bahn l’année de sa privatisation, en 1994, Stuttgart 21 prévoit la démolition d’une partie de la gare actuelle de cette ville du Sud de l’Allemagne, la construction d’une nouvelle gare souterraine au même endroit et de 57 km de trajet de ligne à grande vitesse vers Ulm. Pour les opposants à Stuttgart 21, la nouvelle gare n’apportera rien à la ville, déjà desservie par plusieurs lignes à grande vitesse, vers Paris, Amsterdam, Berlin, ou Zurich. Ils contestent la disproportion du projet, son coût élevé pour les collectivités et surtout le manque de transparence qui l’a accompagné depuis son lancement, tant de la part de la Deutsche Bahn que de la municipalité. Celle-ci a rejeté en 2007 une demande de référendum local sur le sujet. De 3 milliards d’euros envisagés en 2009, le projet est passé à 4,3 milliards aujourd’hui (pour le seul volet ferroviaire), dont seulement 1, 4 milliard payés par la Deutsche Bahn. Le reste vient des pouvoirs publics. L’hostilité des Verts au projet a porté les écologistes au pouvoir dans le Land au printemps 2011, après 60 ans de règne conservateur. Mais le référendum organisé en novembre dernier par la nouvelle équipe a donné une majorité (58 %) pour la poursuite de Stuttgart 21.
Le 4ème aéroport de Berlin
Lieu : Berlin, Allemagne
Coût : au moins 1,2 milliards d’€
Le projet de construire un nouvel aéroport international pour la capitale allemande réunifiée est acté depuis 1996 entre la ville et la société aéroportuaire. Pourtant, la ville compte déjà trois aéroports. Qui ont le tort de ne pas proposer de longs courriers. Impossible aujourd’hui de voler directement de Berlin vers New York, Sydney ou Johannesburg. Les deux aéroports de la ville desservent en revanche toute l’Europe, la Russie, la Turquie et le Proche-Orient. L’Allemagne compte déjà deux grands aéroports internationaux, à Francfort, la capitale financière, et Munich. Prévue le 3 juin dernier, l’ouverture du nouvel aéroport a été reportée à ... mars 2013. Pour l’instant. En cause : les travaux de sécurité incendie, qui ne sont pas du tout terminés. Coût du retard : 580 millions d’euros supplémentaires pour la ville-État aux finances déjà très fragiles, auxquels il faut ajouter 600 millions pour les mesures de protection des riverains contre le bruit, que la société aéroportuaire n’avait pas prises avant qu’un tribunal ne l’y oblige, en juin.
L’autoroute de la forêt de Khimki.
Lieu : Moscou, Russie
Coût : 1,8 milliard d’€
Bénéficiaire : Vinci
Vinci 2 ! Notre géant national prévoit de construire un segment d’autoroute de 15 kilomètres à travers la forêt de Khimki, poumon vert de la Moscou, qui abrite sur près de 1.000 hectares, une biodiversité unique au monde. Pour un chantier estimé à 1,8 milliard d’euros, le groupe français prévoit une rente annuelle de 700 millions d’euros de péage. Malgré les violences et les arrestations arbitraires, la lutte menée par la dynamique Evgenia Chirikova est très populaire en Russie. 66% de la population serait opposée au projet autoroutier, d’autant que 11 tracés alternatifs ont été proposés par des experts indépendants. Le « Khimki Forest Movement » s’attaque également à la corruption. Selon une ONG russe, le coût de construction d’une autoroute reviendrait à 237 millions de dollars par kilomètre chez eux, alors qu’il n’en coûterait que 6 millions de dollars aux États-Unis !
+ d’infos
Un « Forum européen contre les grands projets inutiles imposés » s’est tenu à Notre-Dame-des-Landes, près de Nantes, des 7 au 11 juillet 2012 : pour consulter le programme.
Textes : Sophie Chapelle, Rachel Knaebel, Nolwenn Weiler
Photo : © Alberte Couto
Lieu : Nantes, France
Coût : 600 millions d’€ pour la collectivité
Bénéficiaire : Vinci
Prévu au Nord-Ouest de Nantes depuis 40 ans, le futur aéroport international du Grand-Ouest est ressorti des cartons dans les années 2000, sous le gouvernement Jospin. Il a été déclaré d’utilité publique en février 2008. Deux ans plus tard, l’État en confie la construction et la gestion (pour cinquante-cinq ans) au groupe de BTP Vinci, qui vante les aspects écologiques de son aéroport... Une étude économique indépendante publiée en novembre 2011 chiffre son coût pour la collectivité à 600 millions d’euros. Outre cet impact financier, les opposants à l’aéroport (réunis au sein de l’ACIPA) dénoncent la destruction de terres agricoles (44 exploitations seraient impactées dont 5 ayant leur siège dans la zone destinée à être bétonnée). L’actuel premier ministre, Jean-Marc Ayrault, ancien député-maire de Nantes, est un farouche défenseur de ce projet, auquel sont opposés les membres d’Europe-écologie les Verts...
Le chantier de l’EPR
Lieu : Flamanville, France
Coût : 6 milliards d’euros
Bénéficiaire : Areva, EDF
Le réacteur pressurisé européen (EPR) a été conçu et développé par Areva. Objectif : améliorer la sûreté et la rentabilité économique. Selon les opposants à l’EPR, ce type de réacteur est encore plus dangereux que les précédents, en raison de sa puissance et du combustible utilisé : le MOX, un mélange d’oxydes de plutonium et d’uranium. L’EPR, c’est aussi un gouffre financier. Les diverses malfaçons enregistrées sur le chantier de Flamanville en Normandie ont multiplié la note par deux, pour atteindre 6 milliards d’euros. Pour l’instant... Idem à Olkiluoto, en Finlande. Deux autres EPR sont actuellement en construction en Chine. Pour le collectif Stop EPR les problèmes rencontrés au moment de la construction « pourraient avoir des conséquences graves en cas de situation accidentelle ». Une étude menée par les 7 vents du Cotentin montre qu’avec 3 milliards d’Euros (la somme de départ investie dans l’EPR), on aurait pu pourvoir aux mêmes besoins énergétiques, développer des sources d’énergie locales, respectueuses de l’environnement, et créer des emplois au moins 15 fois plus nombreux et mieux répartis sur l’ensemble du territoire.
Le stade de l’OL Land
Lieu : Décines-Charpieu (Est de Lyon), France
Coût : 450 millions d’euros
Bénéficiaire : OL Group, Vinci
« L’OL Land » est un projet pharaonique concocté par Jean-Michel Aulas, président de l’Olympique lyonnais, en vue de l’Euro 2016. Au menu pour 450 millions d’euros : un nouveau stade de 60 000 places, un centre d’entraînement, les bureaux du siège de l’OL Groupe, une boutique OL Stade, 7 000 places de stationnement, 8 000 mètres carrés d’immeubles de bureaux, deux hôtels de luxe… Le tout à 15 kilomètres du centre de Lyon. L’OL Groupe a sélectionné Vinci pour construire son grand stade. Mais depuis l’annonce du projet en 2007, le chantier n’a toujours pas démarré. Incapable de boucler son plan de financement qui nécessite au minimum 200 millions d’euros de fonds publics, l’OL Groupe est accusé de spéculations immobilières. La Foncière du Montout, propriétaire des terrains et dont l’OL est actionnaire majoritaire, vaudrait maintenant 200 millions d’euros pour des terrains acquis 22 millions d’euros ! L’OL Groupe se heurte également à la multiplication des recours déposés par les associations locales qui défendent la trentaine de paysans menacés d’expropriation. Depuis mai 2012, un campement a été installé sur le tracé du chantier. Le 26 juin dernier, le rapporteur public a requis devant le tribunal administratif l’invalidation de la Déclaration d’intérêt général du stade. Si la demande est suivie, elle pourrait conduire à l’arrêt des expropriations (Lire notre enquête).
Le grand stade de la Fédération française de rugby
Lieu : Évry Centre-Essonne, France
Coût : 600 millions d’euros
La Fédération française de rugby (FFR) ambitionne de devenir propriétaire de son propre stade d’ici 2017 pour y faire jouer le XV tricolore. Le coût de cet équipement de 82 000 places, doté d’un toit rétractable et d’une pelouse amovible, est estimé à 600 millions d’euros. La FFR assure « autofinancer » ce nouveau stade, mais compte néanmoins sur les collectivités locales pour se porter garantes des 450 millions d’euros d’emprunt nécessaires… et financer en prime les aménagements locaux autour du stade. Si le stade de la FFR voit le jour à Évry Centre-Essonne, à 25 kilomètres au sud de Paris, il pourrait déstabiliser l’économie de toutes les autres enceintes de la région (Stade de France, Racing 92, Stade Français, Charléty et Parc des Princes). Aménagement régional déséquilibré, utilité sociale douteuse, risques budgétaires élevés… L’inflation de stades de rugby inquiète aussi directement sur les territoires concernés. En l’absence de stratégie globale coordonnée, l’Île-de-France pourrait se transformer en cimetière « d’éléphants blancs », vastes équipements de rugby construits sans garanties pour l’avenir. Des paris inquiétants alors que les budgets publics pour l’accès au sport pour tous sont menacés (Lire notre enquête).
Une ligne de train grande vitesse entre Lyon et Turin
Lieu : Vallées de Suse, Alpes (France, Italie)
Coût : 8,5 milliards d’euros pour la partie internationale, 7 milliards d’euros pour les aménagements côté français.
Bénéficiaires : Réseau ferré de France, Réseau ferré d’Italie
Le projet de ligne ferroviaire entre Lyon et Turin, dont le percement d’un tunnel de 52 km sous les Alpes, est confirmé par un accord franco-italien signé le 30 janvier 2012. Les opposants à la TAV (« Treno alta velocità », Train à grande vitesse en italien) regrettent l’absence de véritable débat public sur l’utilité de ce projet pharaonique. Et préfèrent la modernisation de la ligne « historique » qui relie déjà les deux métropoles [1]Pour les promoteurs du projet, les capacités de la ligne existante seraient trop limitées. Les « pro-TAV » tablent sur 3,5 millions de voyageurs par an. D’autres estimations, reprises par les No-Tav n’en prévoient pas plus de 500 000, soit l’équivalent de deux aller-retour TGV par jour. Sans compter les nuisances d’un tel chantier : « C’est l’équivalent de 12 pyramides de Khéops qu’il faudra déplacer et stocker en Maurienne, Belledonne et dans le Sillon alpin ! Cela représente à peu près 460 camions-benne tous les jours, pendant quinze ans », illustre le Collectif No-TAV Savoie. 18 millions de m3 de déblais qui pourraient en plus contenir des poussières d’uranium et d’amiante présents dans la roche.
Le parc de loisirs espagnol Eurovegas
Lieu : Barcelone ou Madrid, Espagne
Coût : 26,6 milliards d’euros d’€
Bénéficiaire : Las Vegas Sands
Sheldon Adelson, 16e fortune mondiale prévoit de construire à Madrid ou Barcelone un immense complexe de loisirs : 12 hôtels de villégiature de 3 000 chambres chacun, incluant casinos ou terrains de golf, pour un investissement total de 26,6 milliards d’euros. Avec, à la clé, la promesse de 164 000 emplois directs et 97 000 indirects. En échange, le milliardaire demande une remise en cause du droit du travail, la révision de la loi sur le droit des étrangers, ou encore l’exonération de cotisations à la Sécurité sociale pendant deux ans... Deux collectifs, Eurovegas No à Madrid et Aturem Eurovegas à Barcelone ont décidé d’informer les citoyens sur l’impact social, économique et urbanistique du projet du magnat de Las Vegas. D’après un rapport qu’il ont récemment publié, l’investissement public pourrait s’envoler de 950 millions à 2,5 milliards d’euros ! En plus du financement de 60 % des coûts de formation des employés, Sheldon Adelson demande aussi la construction d’une station de métro qui débouche dans le complexe, la construction de nouvelles sorties d’autoroute pour faciliter l’accès au casino, et un héliport. Au fait quelqu’un a-t-il entendu parler d’austérité ? (Lire notre enquête)
La gare souterraine Stuttgart 21
Lieu : Stuttgart, Allemagne
Coût : 4,3 milliards d’euros
Bénéficiaire : Deutsche Bahn
Lancé par la Deutsche Bahn l’année de sa privatisation, en 1994, Stuttgart 21 prévoit la démolition d’une partie de la gare actuelle de cette ville du Sud de l’Allemagne, la construction d’une nouvelle gare souterraine au même endroit et de 57 km de trajet de ligne à grande vitesse vers Ulm. Pour les opposants à Stuttgart 21, la nouvelle gare n’apportera rien à la ville, déjà desservie par plusieurs lignes à grande vitesse, vers Paris, Amsterdam, Berlin, ou Zurich. Ils contestent la disproportion du projet, son coût élevé pour les collectivités et surtout le manque de transparence qui l’a accompagné depuis son lancement, tant de la part de la Deutsche Bahn que de la municipalité. Celle-ci a rejeté en 2007 une demande de référendum local sur le sujet. De 3 milliards d’euros envisagés en 2009, le projet est passé à 4,3 milliards aujourd’hui (pour le seul volet ferroviaire), dont seulement 1, 4 milliard payés par la Deutsche Bahn. Le reste vient des pouvoirs publics. L’hostilité des Verts au projet a porté les écologistes au pouvoir dans le Land au printemps 2011, après 60 ans de règne conservateur. Mais le référendum organisé en novembre dernier par la nouvelle équipe a donné une majorité (58 %) pour la poursuite de Stuttgart 21.
Le 4ème aéroport de Berlin
Lieu : Berlin, Allemagne
Coût : au moins 1,2 milliards d’€
Le projet de construire un nouvel aéroport international pour la capitale allemande réunifiée est acté depuis 1996 entre la ville et la société aéroportuaire. Pourtant, la ville compte déjà trois aéroports. Qui ont le tort de ne pas proposer de longs courriers. Impossible aujourd’hui de voler directement de Berlin vers New York, Sydney ou Johannesburg. Les deux aéroports de la ville desservent en revanche toute l’Europe, la Russie, la Turquie et le Proche-Orient. L’Allemagne compte déjà deux grands aéroports internationaux, à Francfort, la capitale financière, et Munich. Prévue le 3 juin dernier, l’ouverture du nouvel aéroport a été reportée à ... mars 2013. Pour l’instant. En cause : les travaux de sécurité incendie, qui ne sont pas du tout terminés. Coût du retard : 580 millions d’euros supplémentaires pour la ville-État aux finances déjà très fragiles, auxquels il faut ajouter 600 millions pour les mesures de protection des riverains contre le bruit, que la société aéroportuaire n’avait pas prises avant qu’un tribunal ne l’y oblige, en juin.
L’autoroute de la forêt de Khimki.
Lieu : Moscou, Russie
Coût : 1,8 milliard d’€
Bénéficiaire : Vinci
Vinci 2 ! Notre géant national prévoit de construire un segment d’autoroute de 15 kilomètres à travers la forêt de Khimki, poumon vert de la Moscou, qui abrite sur près de 1.000 hectares, une biodiversité unique au monde. Pour un chantier estimé à 1,8 milliard d’euros, le groupe français prévoit une rente annuelle de 700 millions d’euros de péage. Malgré les violences et les arrestations arbitraires, la lutte menée par la dynamique Evgenia Chirikova est très populaire en Russie. 66% de la population serait opposée au projet autoroutier, d’autant que 11 tracés alternatifs ont été proposés par des experts indépendants. Le « Khimki Forest Movement » s’attaque également à la corruption. Selon une ONG russe, le coût de construction d’une autoroute reviendrait à 237 millions de dollars par kilomètre chez eux, alors qu’il n’en coûterait que 6 millions de dollars aux États-Unis !
+ d’infos
Un « Forum européen contre les grands projets inutiles imposés » s’est tenu à Notre-Dame-des-Landes, près de Nantes, des 7 au 11 juillet 2012 : pour consulter le programme.
Textes : Sophie Chapelle, Rachel Knaebel, Nolwenn Weiler
Photo : © Alberte Couto