mercredi 10 octobre 2012

Pigeon vole (Bakchich)

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Pigeon vole

Quand les riches pigeons voyageurs menacent la France d'envol fiscal, notre cher Gouvernement ne tarde pas à plier...
L’offensive fut foudroyante et personne n’a très bien compris pourquoi le gouvernement a cédé si vite.
Nous parlons évidemment de l’attaque en piqué des pigeons ! Les pigeons en question, qui sont voyageurs car certains d’entre eux sont déjà installés à Genève, ont mené contre le pouvoir socialiste un de ses combats fiscaux qui sont historiquement consubstantiels à l’existence même de l’impôt.
Caillaux, qui inventa l’impôt sur le revenu, dut affronter déjà le Figaro dans un mélange de mauvaise foi, d’outrance et de calomnie. Mais à l’époque, la gauche avait du courage et madame Caillaux n’hésita pas à se faire justice elle-même en tuant le rédacteur en chef de cette noble mais déjà très droitière institution. Quant à Poujade et ses commerçants en lutte contre les contrôles fiscaux, s’il envoya de nombreux députés à l’Assemblée, cela avait le mérite de déclarer ouvertement que la haine de l’impôt était également une haine de la gauche.
La gauche d’aujourd’hui n’ayant plus les convictions des radicaux des débuts de la Troisième République a compris que d’emblée, elle devait reculer car elle avait beaucoup à se faire pardonner. Se faire pardonner quoi au juste ? De défendre des idées économiquement idiotes ? Mais c’est cela qui fait son charme ! De ne savoir qu’augmenter les impôts ? Mais c’est pour cela qu’elle est élue ! En fait, les énarques d’aujourd’hui qui hantent Solferino sont comme les avocats sans cause de l’entourage de Blum que décrivait le philosophe radical Alain au moment du Front populaire : ils ont honte de n’avoir jamais travaillé et jamais créé et sont donc prêts à se soumettre aux moindres desiderata de ceux qu’ils prennent pour des créatifs.
Naguère, ils se soumettaient aux foucades des artistes au nom de la création, aujourd’hui de celles des millionnaires du net qui rentabilisent sans vergogne des impostures. Le trader, qui lui n’a pas l’audace de clamer que les modèles mathématiques qui l’inspirent relèvent également de la création, de la dynamique de croissance et de la capacité à faire émerger une nouvelle société de l’immatériel, restera voué aux gémonies et restera l’ennemi sans visages à abattre. Il paiera plein pot des impôts sur son salaire dont le revendeur hâtif d’une coquille vide sera exonéré.
Car le problème est là, le riche est devenu compliqué et vu du post mitterrandisme ambiant, il y a de bons riches et de mauvais riches. L’argent qui naguère corrompait corrompt moins quand il est gagné par une fumisterie sur Internet.
Et puisqu’il est des argents plus ou moins corrupteurs, de nouveaux pigeons devraient bientôt prendre leur envol, achevant le travail des pigeons, qui fut de discréditer un pouvoir qu’ils détestent parce qu’il parle de solidarité.
De fait, si les pigeons ont pris leur envol, simultanément, la popularité de l’exécutif s’est écrasée au sol. Au point que déjà, les couloirs de Matignon bruissent des noms des successeurs potentiels de l’actuel premier ministre. Et comme pour achever de faire moderne, il devient de plus en plus évident que ce sera une femme, des valeurs nouvelles montent au box office. La jeune Fleur Pellerin a son fan club : elle fait moderne, très « diversité » tout en étant énarque de la Cour des comptes. Or, finalement, pour Hollande, l’esprit de corps, dans ces périodes où tout fout le camp, c’est ce qui résiste à tout….