mardi 5 mars 2013

Espagne : Un général évoque une intervention militaire en cas d’autonomie catalane (Le journal du siècle)

Espagne : Un général évoque une intervention militaire en cas d’autonomie catalane

Juan Antonio Chicharo
On a tort de croire que la paix et la démocratie sont définitivement installées en Europe. Il suffit par exemple de s’arrêter sur la situation de l’Espagne pour se rendre compte qu’un changement de paradigme est possible à tout moment.
De nombreux observateurs pourront toujours affirmer que les principes démocratiques sont bien ancrés dans le pays et que le risque d’un changement de régime est infinitésimal. Pourtant, c’est faire l’impasse sur l’histoire récente de la péninsule que de croire cela. Le dernier coup d’Etat remonte en effet au début des années 80 et a échoué seulement grâce à l’aura du roi Juan Carlos qui a beaucoup terni depuis.
Ainsi, une conférence organisée le 6 février denier par un centre de réflexion à Madrid et qui portait sur les forces armées et la Constitution a mis en lumière un certain malaise au sein d’une partie des officiers supérieurs de l’armée, notamment face à la gestion de la question catalane.
Le Général Juan Antonio Chicharro, qui a commandé le corps d’élite de la marine jusqu’en 2010 et fait désormais partie de la réserve, a fait part « d’un sentiment général de préoccupation, de peur, d’incertitude et de confusion » au sein de l’armée espagnole au sujet de la sécession possible de la Catalogne, allant jusqu’à regretter la démission en 2006 du Général José Mena qui s’était publiquement prononcé en faveur de la possibilité d’une intervention militaire afin de mettre un terme aux demandes d’autonomie plus importante de la région.
« La patrie est antérieure et plus importante que la démocratie. Le patriotisme est un sentiment et la Constitution n’est rien de plus qu’une loi » a affirmé Juan Antonio Chicharro.
Il a demandé ensuite, pendant son discours, d’imaginer un scénario qui a de grandes chances d’arriver : si le parti au pouvoir perd sa majorité absolue lors des prochaines élections générales et que les Catalans, en échange de leur soutien, demandent à abroger dans la Constitution la doctrine de « l’indissoluble unité » de l’Espagne, que pourra faire alors l’armée, s’est-il interrogé. Il n’a pas apporté de réponse mais tout le monde a plus ou moins compris ce qu’il sous-entendait.
Depuis, le général a été réprimandé par sa hiérarchie mais, les propos qu’il a tenu montrent en tout cas une déstabilisation évidente du cadre institutionnel dans le pays sous l’effet des manifestations quasi-quotidiennes contre l’austérité, d’un rejet grandissant de la Maison Royale et du gouvernement et sous les coups de boutoir de la Catalogne.
Une situation tout simplement explosive alors que le pays est entré dans une ère de difficultés croissantes et l’évolution actuelle de la situation n’augure rien de bon.
Le taux de chômage de l’Espagne est autour de 26%, avec un taux de chômage des jeunes qui est à près de 60% selon les derniers chiffres. L’actuel gouvernement est aux prises avec un scandale massif de corruption qui semble toucher tous les niveaux de décision au sein du Partido Popular et, enfin, le 23 janvier dernier, l’Assemblée de Catalogne a déclaré solennellement que la région est une « entité légale et politique souveraine ». En d’autres termes, la Catalogne est prête à faire sécession.
Bref, l’Espagne est au bord du précipice.