Jour de Colère
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By upassuello on jan 30, 2014
Suite à l’appel du collectif Jour de Colère du 30 octobre 2013 qui avait beaucoup circulé sur internet, une grande manifestation s’annonçait dimanche 26 janvier à Paris. Ce groupe anonyme soi-disant apolitique, revendiquant une indépendance totale, a été capable de rassembler les moyens nécessaires pour payer un site internet performant et sécurisé au Panama et pour avancer les fonds nécessaires à la mise en place d’infrastructures dignes d’un meeting politique (tracts, affiches, sécurité, sonorisation, scène). D’où vient l’argent ? La plupart des motifs de colère invoqués sur le tract étaient des thèmes largement repris par la droite dans son ensemble. L’écrasante majorité des collectifs affichant leur soutien sur le site Jour de Colère étaient soit issus de la Manif pour Tous, soit anti-hollande. Seul Dieudonné en amenant son soutien paraissait détonner et embarrasser à la fois.
Même si la plupart des gens savaient que cette manifestation n’était pas sans connotation politique, on a pu y croiser tout type de manifestants. On ainsi pu voir dissidence française, le GUD, les Homen, des dénonciateurs de la pédophilie dans la classe politique, les promoteurs d’une démocratie par le tirage au sort, les royalistes, les identitaires, les anti-mariage gay, les pro-Dieudo et toutes sortes de comités anti-hollande défiler dans le même cortège. Mis à part les Femen qui ont tenté de s’inviter au bal mais qui sans la protection des CRS auraient rencontré une vive opposition, aucun heurt majeur n’a été a déploré au cours de la journée.
Tous les manifestants – 17.000 selon la police, 120.000 selon les organisateurs, 30 à 40.000 selon moi – se sont rendu de la place de la Bastille jusqu’à la place Vauban aux pieds des Invalides. Dans le cortège nous avons pu entendre et voir toutes sortes de slogans et de banderoles. Certains plutôt anti-système prônaient une réflexion sur le fonctionnement de l’Europe, appelaient à un débat sur la perte de souveraineté nationale, proposaient des systèmes différents de démocratie, certains appelaient même à un retour à une monarchie. La majorité des groupes reprenaient les thèmes de la Manif pour Tous en abordant le refus d’une remise en cause de la structure familiale traditionnelle, les peurs liées à l’instauration de la GPA et de la PMA ou encore la question de l’intégration de la théorie du genre dans l’éducation nationale. D’autres étaient groupés autour du rejet d’une fiscalité abusive étouffant les PME et empêchant les innovations de voir le jour. D’autres tenaient des propos tout simplement xénophobes, insultants envers les juifs ou les musulmans.
Même si des citoyens de toute obédience politique ont finalement participé à la manifestation, la « colère » qu’elle souhaitait symboliser va être récupéré politiquement par l’UMP, le PCD et le FN, voulant attirer vers eux toutes les contestations. François Asselineau accuse même le Front National d’avoir mené une opération sous faux drapeaux en organisant la manifestation. Pour l’arrivée du cortège, une scène avait été installée place Vauban. Une dizaine de discours se sont succédés reprenant chacun un des thèmes de l’appel. Aucun de ces discours n’abordait les vrais problèmes de la France, tous se contentaient d’une démagogie à toute épreuve tendant à prouver que tous les maux actuels de notre pays seraient résolus si l’on parvenait à révoquer François Hollande …. Affligeant …. Personne pour parler des évolutions de l’Union Européenne vers une sorte de dictature technocratique des lobbies. Ils ont tapé sur les doigts de la finance mais là encore la solution tenait dans la démission de François Hollande. Personne pour parler de notre politique étrangère belliqueuse ni de notre soutien indéfectible à Israël. Pour un rassemblement censé vouloir changer les choses les intervenants parlaient surtout de changer de président. Mais qui mettrons nous à sa place ?
Il faut bien sûr mettre en garde les manifestants de bonne foi contre les beaux discours prononcés uniquement dans le but de récupérer un électorat en colère. Il faut le faire aujourd’hui lorsqu’il s’agit de la droite tout comme lorsqu’il s’agit de Monsieur Jean-Luc Mélenchon s’insurgeant contre la finance et pleurant Hugo Chavez mais appelant à voter François Hollande dans la minute qui suit les résultat du premier tour de 2012 …. Mais ce n’est pas ce qui me choque car je ne m’attendais pas à beaucoup mieux.
Ce qui m’a choqué c’est la manière dont ce sont déroulés les évènements qui ont suivis. Peu après l’appel à se disperser des organisateurs, un petit groupe de personnes a commencé à agir de manière violente tout en exhortant le maximum de monde à les imiter. Les avis divergent, pour certains la LDJ serait à l’origine des troubles, pour d’autres ce serait les Ultras. Il semblerait, finalement, qu’il s’agisse de policiers en civil provoquant délibérément un trouble à l’ordre public violent afin de pouvoir ensuite qualifier cette manifestation de regroupement d’extrémistes. Réponse évidente de la gauche qui désire que ce genre de regroupement soit perçu comme un rassemblement des franges les plus extrêmes de la société alors que ce n’est pas toujours le cas.
Après une quarantaine de minutes d’affrontements violents les policiers ont repris le contrôle de la place Vauban. La grande majorité des « casseurs » avaient à ce moment déjà évacué les lieux. Seuls quelques manifestants restés sur place volontairement ou non se sont retrouvés encerclés par un cordon de CRS. Quel que soit l’obédience politique d’un citoyen, quelle que soit la manière dont il a manifesté, PERSONNE ne devrait être traité comme l’ont été les 262 personnes qui ont été détenues illégalement pendant 7 heures avant d’être placé en Garde à Vue jusqu’à 19 heures le lendemain. Il s’agit d’une preuve flagrante que la république ne défend même plus ses propres valeurs puisque les articles 3,5 et 9 de la déclaration universelle des droits de l’homme et du citoyen garantissant la sureté du citoyen, la dignité humaine et le caractère non-arbitraire du pouvoir, ont été violés. La France avait été condamnée à deux reprises en 2008 et en 2009 par la CEDH afin de réaffirmer l’obligation de la présence d’un avocat lors de toute privation de liberté. Suite à une troisième condamnation en 2010 impliquant directement le régime de la Garde à Vue, le conseil constitutionnel avait obligé le gouvernement français a modifié la loi en rendant la présence d’un avocat obligatoire dès le début de la garde à vue. Une fois de plus le gouvernement n’a respecté ni la constitution ni le droit européen !
Durant la nuit de Dimanche à Lundi, l’estime que j’ai pour notre soi-disant république démocratique est encore descendue d’un cran. Notre société s’achemine de plus en plus rapidement vers un régime totalitaire. N’importe qui peut être arrêté et maintenu en détention sans aucune raison apparente. En plus d’être privé de notre liberté, nous avons été traités comme des chiens. Les CRS nous ont obligé à rester dehors pendant des heures sous la pluie et le froid, sans eau, sans toilettes et sans nourriture.
Paul de Bary