jeudi 9 janvier 2014
Loi de programmation militaire: "Sommes nous tous des terroristes?"
Pendant qu'on nous bourre le crane avec une polémique sur la quenelle, cette loi est passé dans la quasi indifférence générale, preuve que l'affaire Snowden et ses révélations auront davantage donné des ailes au gouvernement français qu'autre chose en se disant: "si eux le font, pourquoi pas nous?". Même Jacques Attali, l'adepte des puces RFID, se dit choqué par cette loi...c'est dire.
Cette loi autorisera telle qu'elle a été votée la collecte de données de tout opposant au pseudo Nouvel Ordre Mondial (qui n'a pourtant rien de nouveau et qui n'a rien à voir avec l'ordre non plus). A ce titre, cette loi vise précisément à considérer tout opposant au gouvernement comme un terroriste potentiel. Dites vous bien que cette loi n'arrive pas là par hasard et qu'elle nous concerne tous. Fawkes
Le JDD:
TRIBUNE - Jacques Attali, économiste et président de PlaNet Finance, met en garde contre les dangers de l’article 20 de la nouvelle loi de programmation militaire. Retrouvez cette tribune dimanche dans le JDD.
Personne ne peut contester l’importance de se donner tous les moyens pour lutter contre le terrorisme, y compris celui de violer la vie privée de ceux qui en sont soupçonnés. Personne ne peut contester non plus la nécessité de donner à la justice les moyens de tout savoir sur les agissements d’une personne en relation avec un crime ou un délit dont elle serait soupçonnée.
Mais en mêlant les deux, l’article?20 de la nouvelle loi de programmation militaire (LPM) vient de donner à l’administration tout pouvoir de traiter tout citoyen soupçonné d’un délit quelconque comme un terroriste, c’est-à-dire de pénétrer dans sa vie privée sans contrôle a priori d’un juge.
"Tout citoyen devient un terroriste qui s’ignore"
En voulant transcrire le texte de loi qui régit les écoutes administratives en cas de soupçon de terrorisme, le texte de l’article?20 (ex-article 13) de la loi de programmation militaire est en effet allé beaucoup plus loin en y introduisant toutes les "?infractions mentionnées à l’article 695?23 du code de procédure pénale", c’est-à-dire pratiquement tous les crimes et délits. Autrement dit, tous les crimes et délits seront désormais traités comme les actes de terrorisme. Toutes les personnes suspectées d’un délit quelconque seront traitées comme des gens soupçonnés de terrorisme. Tout citoyen devient un terroriste qui s’ignore.
Concrètement, il deviendra possible, à partir de janvier?2015, si la loi n’est pas modifiée, de pénétrer dans votre ordinateur sans contrôle d’un juge si vous êtes soupçonné d’avoir téléchargé un fichier musical ou un film ou soupçonné de "fraude" ou de "piratage". Juste par la volonté d’une "autorité administrative", c’est-à-dire d’un être humain anonyme, investi d’une autorité.
"La tyrannie de la transparence vient de trouver sa traduction dans une loi"
Sans vouloir mettre en doute l’intégrité de ceux qui auront cette charge, la nature humaine est ainsi faite que tout homme utilise jusqu’au bout le pouvoir dont il dispose. Nous sommes déjà suivis, surveillés, et nous le serons de plus en plus, en raison de l’Internet des objets, du cloud computing et autres technologies à venir.
La tyrannie de la transparence, dont j’annonce le danger depuis longtemps, vient, pour la première fois, de trouver sa traduction dans une loi. Une loi française.
Il est ahurissant qu’un tel texte ait pu être voté sans que nulle voix au Parlement ou dans les grands médias ne s’élève, malgré l’indignation des associations de droits de l’homme. Comme si chacun considérait déjà qu’il était l’ennemi de tous les autres. Et qu’il devait s’en garder par tous les moyens. Ainsi meurent les démocraties.
Source:
Jean-Jacques Urvoas, assumez le vrai contenu de la loi de programmation militaire
En oubliant encore et toujours de dire qu'il est l'un des trois membres du seul organe de contrôle prévu par la loi, Jean-Jacques Urvoas (PS) continue de défendre l'article 20 de programmation militaire en déformant son contenu ou sa portée.
Nous nous étions déjà énervés contre le député socialiste et président de la commission des lois de l'Assemblée Nationale Jean-Jacques Urvoas, qui avait ouvertement déformé le contenu et la portée de l'article 20 de la loi de programmation militaire (ancien article 12), en osant prétendre que ceux qui analysent la loi n'y comprennent rien aux "délices de la légistique". Un argument d'autorité aussi minable qu'insultant.
Comme le ministre de l'intérieur Manuel Valls avant lui, Jean-Jacques Urvoas avait multiplié les contre-vérités pour défendre un texte ouvrant les portes à une collecte massive de données personnelles. Il est d'ailleurs grave pour la République de voir que PS et UMP ont fini par s'entendre pour ne pas que le Conseil Constitutionnel examine la loi de programmation militaire, et ainsi permettre la promulgation d'un article de loi qui sans doute n'aurait pas été accepté en l'état par les Sages.
Dans un premier texte publié sur son blog avant la promulgation de la loi, Jean-Jacques Urvoas avait défendu le rôle de gendarme des libertés conféré par la loi à la Commission Nationale de Contrôle des Interceptions de Sécurité (CNCIS), en saluant son "bilan (qui) plaide sans conteste en faveur de son efficacité". Mais c'est Numerama qui avait dû rappeler que M. Urvoas était justement l'un des membres de la CNCIS, ce qu'il ne dit jamais, et que celle-ci ne compte au total que trois membres très politiques, puisque deux sont des parlementaires, et le troisième est un magistrat désigné par le président de la République (actuellement il s'agit d'un ancien directeur de cabinet du ministère de la Justice).
La loi étant désormais promulguée, Jean-Jacques Urvoas aurait pu se contenter de sa victoire et tenter de faire oublier son rôle majeur dans son adoption.
Mais non. Voici qu'il revient sur le sujet dans une tribune publiée par Le Monde (où il oublie encore de dire qu'il est membre de la CNCIS, ce qui ne l'empêche pas de dire qu'il "s'étonn[e] des doutes formulés quant à [son] indépendance"...).
A nouveau, Jean-Jacques Urvoas charge ses contestataires, accusés d'être "des exégètes amateurs et de mauvaise foi", pour qui le "soupçon tient lieu de raisonnement".
Et à nouveau, Jean-Jacques Urvoas masque la portée du texte.
Ainsi par exemple, il affirme que seules les "personnes suspectées de mettre en danger la sécurité nationale, de pratiquer l'espionnage, de concevoir des projets terroristes, d'appartenir à des réseaux de criminalité organisée ou à des mouvements visant à renverser la forme républicaine des institutions" sont susceptibles de voir leurs données collectées par les agents de l'Etat.
"Il semble pour le moins aventureux de tirer prétexte des cibles concernées par ce dispositif pour invoquer une « surveillance généralisée », à moins de considérer qu'une majorité de nos concitoyens œuvre à la destruction de notre système démocratique", ajoute-t-il.
"Rappelons-le, seuls les terroristes, les espions ou les factieux seraient légitiment en mesure de se plaindre d'une potentielle atteinte à leurs libertés individuelles !".
Mais jamais la loi ne limite la collecte des données à celles des personnes soupçonnées. Elle autorise les interceptions "ayant pour objet de rechercher des renseignements" dans les domaines énoncés, ce qui peut impliquer de les rechercher chez tous les internautes, justement pour se donner la possibilité d'identifier d'éventuels suspects à surveiller plus étroitement. C'est exactement ce qui est reproché à la NSA aux Etats-Unis.
Par ailleurs, Jean-Jacques Urvoas affirme que "les exégètes précités apprécieront la capacité de saisine dont dispose tout citoyen au titre de l'article 243-9 (du code de la sécurité intérieure)".
"Comment dès lors invoquer une absence de recours ?", demande-t-il.
Simple, il suffit de lire cet article 243-9 du code de la sécurité intérieure. Il dispose que "de sa propre initiative ou sur réclamation de toute personne y ayant un intérêt direct et personnel, la commission peut procéder au contrôle de toute interception de sécurité en vue de vérifier si elle est effectuée dans le respect des dispositions du présent titre". Pour avoir un "intérêt direct et personnel" à demander un contrôle, il faut déjà avoir connaissance de la collecte de données dont l'on fait éventuellement l'objet. Or toute la procédure est secrète. Par ailleurs, la CNCIS "peut procéder au contrôle", mais la réclamation d'un individu ne l'y oblige pas.
Source:Numerama