jeudi 6 mars 2014

Pourquoi je n’ai plus de téléviseur (Cercle des volontaires)

Pourquoi je n’ai plus de téléviseur
broken-tv-300Du désamour des médias dominants
Cette tribune sur la défiance croissante du peuple vis-à-vis des médias n’a pas pour but de faire une analyse factuelle, objective, des causes de cette désaffection, mais de donner mes raisons, sans aucune prétention à la représentativité. Tout juste rappellerai-je cette étude publiée dans l’Observatoire des Journalistes et de l’Information Médiatique (OJIM), dont les chiffres accablent le lecteur : 77 % des sondés n’ont « plutôt pas confiance » ou « pas du tout confiance » dans les médias, 74 % pensent que « les journalistes sont coupés des réalités » et « ne parlent pas des vrais problèmes » et 71 % estiment que « les journalistes ne sont pas indépendants ». Et ces chiffrent empirent quand on sonde les internautes. Dans cette dernière étude, je retiendrai qu’à la question « dans un contexte de crise de la presse, pensez-vous que les journaux doivent ?… », 82 % des sondés mettent la priorité sur le fait de « rétablir le pluralisme idéologique des rédactions » bien au dessus des 13% qui insistent sur « l’amélioration du contenu », des 4 % qui pensent qu’on doit « changer la forme de diffusion » et du petit 1 % en faveur de « l’augmentation des subventions de la part de l’État ».
Personnellement, je fais fais partie des 82 % qui déplorent le mimétisme idéologique, voire langagier des journalistes. Une chose qui me choqua, pendant l’affaire Dieudonné, fut l’emploi répété ad nauseam du terme « nauséabond ». Je ne pouvais l’éviter et fut stupéfait de l’omniprésence de ce mot, rarement employé dans le langage courant. Pourquoi pas puant, repoussant, dégoûtant, répugnant, dégueulasse, malsain, écœurant, fétide, ou même infect ? Dieudonné méritait bien un peu de recherche lexicale, de la part de ceux qui lui crachèrent dessus tous en chœur, pendant un mois. Ce mois de janvier 2014 où nous fûmes tous priés de nous joindre à la horde des hyènes politico-médiatiques pour conspuer dans l’unité nationale un humoriste, tellement honni qu’il perdit même dans la presse le droit de s’appeler ainsi.
Résultat des courses, Dieudonné M’Bala M’Bala, n’a jamais été aussi populaire, quoi qu’en disent les membres de la caste journalistique, au national comme à l’international. Il tourne partout en France à guichet fermé, et s’exporte même sur d’autres continents. Pourtant, il n’est pas le héros qu’il voudrait nous faire croire. Comme tout le monde il a sa part d’ombre, et il a joué de provocations en provocations pour des motifs qu’on ne peut réduire à « la liberté d’expression ».
Pourtant, moi et tant d’autres refusons de lui cracher dessus, de le boycotter et de le juger. Pourquoi ? Parce qu’on nous somme de le faire. Même si j’ai de sérieuses critiques à lui adresser, je m’en abstiendrai pour l’instant, car je refuse de hurler avec les loups. Quel est le courage d’un Nicolas Bedos qui se fend d’une chronique au vitriol sur celui que tout le système attaque ? Quel est l’honneur d’un Stéphane Guillon, qui, en perte de vitesse, réclame l’interdiction de son spectacle pour rentrer en grâce auprès de ses employeurs ?
Je ne suis pas dupe de ce cirque. Comme beaucoup de français, je fus choqué par l’aspect odieux de ce lynchage, et quels que ce soient les torts de Dieudonné, la hausse spectaculaire du nombre de ses fans sur Facebook et le triomphe de son nouveau spectacle fut une des quenelles que le commun, auquel j’appartiens, mit dans le fion de ce système abject (abject à cause de la transformation des médias en tribunaux, même pas populaires).
A la manifestation « Jour de colère » à laquelle je participai (et, non, je ne fais pas partie des quelques dizaines de nazillons qui ont scandé « juifs, juifs, juifs », et qui reçurent un écho disproportionné dans les médias par rapport à leur nombre réel), je fus marqué par l’incroyable colère et le ressentiment des manifestants envers les médias. « Journalistes collabos ! », fut le seul slogan commun que j’entendis dans tous les cortèges, d’une incroyable diversité. Dès mon arrivée, je voulus m’entretenir tranquillement avec une journaliste de BFM TV, qui s’enfuit presque en courant avant que j’eusse le temps de finir ma phrase. Et certains de ses confères subirent même des attaques physiques, particulièrement BFM TV et Canal Plus (peut-être à cause de ce genre de « reportage » confectionné par le Petit Journal).
Même si cette agglomération de colères fut plutôt confuse, une ligne directrice la porta : la défiance vis-à-vis des médias, des multinationales, de la finance et du gouvernement, identifiés comme faisant partie d’un seul et même système de domination, spoliation et manipulation.
La vérité pourtant émerge si l’on prend le temps de réfléchir à un plus haut niveau : les médias portent une idéologie libérale-libertaire, qu’on peut faire remonter au 18ème siècle avec l’émergence des « Lumières », et qui se caractérise par la volonté d’une élite de faire sauter tous les freins aux désirs et pulsions individuels.
Sur le plan économique, le libéralisme (initié par les physiocrates) entend, au nom d’une prétendue « liberté » (celle du renard dans le poulailler pour reprendre les mots de Jean Jaurès), détruire les protections sociales (acquises par les corporations, et ensuite les syndicats) qui protégeaient partiellement le peuple des appétits des loups. L’objectif est de transformer le monde du travail en un immense marché, où les efforts et compétences de chacun sont traités comme de la simple marchandise, qui n’a plus de valeur mais seulement un prix. Les travailleurs sont mis en concurrence les uns avec les autres, la coopération est remplacée par la concurrence de tous contre tous, et la société devient une jungle (justifiée par un darwinisme social), qui détruit le fondement de toute vie en communauté, à savoir la solidarité et le partage. Et ceux qui détiennent l’appareil productif, financier et monétaire peuvent mettre en place un nouveau type d’esclavage sournois, global, impersonnel et impitoyable.
Sur le plan sociétal, le libertarisme (initié par le libertinage) prétend que la « liberté » consiste à assouvir toutes ses pulsions, tous ses désirs. Si l’on se connaît un peu, c’est exactement le contraire qui est vrai. Le nirvana dans le bouddhisme signifie précisément « extinction, apaisement et libération » vis-à-vis des désirs qui enchaînent notre esprit aux contraintes du corps et du mental. Quand le conscient est dominé par le subconscient, nous sommes esclaves, et si les plaisirs du corps ne doivent pas être dénigrés, ils doivent demeurer nos serviteurs et non nos maîtres.
La société moderne, avec la théorie du genre dans son dernier avatar, est une entreprise de domination de l’Homme par ce qu’il porte en lui de plus inférieur, au nom d’une suprématie du désir individuel. D’abord par la mise en place de la société de consommation, où l’on a appris aux gens à désirer des choses dont ils n’ont pas besoin. Ensuite par une exaltation du droit au bonheur individuel, qui a détruit pas mal de couples (car on se marie pour le meilleur ET pour le pire), et enfin par une promotion déguisée de l’homosexualité (qui ne pose pas de problème en tant que pratique individuelle mais en tant que pratique reconnue par l’État comme équivalente à l’hétérosexualité dans le domaine de la famille et de la parentalité), de la bisexualité, au nom de la tolérance, pour aller peut-être vers un plus grand relâchement de nos mœurs (zoophilie, pédophilie, et pourquoi pas sadisme). La théorie du genre n’est-elle pas qu’une étape d’un processus de décadence bien plus ancien et profond ?
Toute société est fondée sur la restriction des appétits individuels, tout à fait légitimes dans une certaine mesure, mais qui deviennent destructeurs quand ils ne sont pas limités par la nécessité du respect d’autrui et de la solidarité collective. Sans quoi on aboutit à une logique de psychopathe, définie par le refus de toute restriction des désirs et appétits. Poussé à son extrême terme, ce processus aboutit, sur le plan individuel, à la légitimation de la pédophilie, du viol, voire du sadisme, et sur le plan collectif, à la légitimation du pillage des ressources, de l’exploitation des hommes par les multinationales, et du racket bancaire par les institutions financières et monétaires.
Voilà pourquoi je ne regarde quasiment plus la télévision et je ne lis plus la presse institutionnelle depuis sept ans maintenant. Les journalistes de télévision, qu’ils soient de gauche ou de droite, propagent à leur niveau cette vision du monde, qui s’installe par petites touches, pour habituer la population à devenir déracinée, démoralisée, désolidarisée, abêtie, pervertie, déspiritualisée, et donc au final, déshumanisée.
Et ils la défendent à travers un dogmatisme creux. Cette absence de pensée militante et totalisante se fait à travers un ensemble de mots-clés qui divise le monde en deux : d’un côté « tolérant, humaniste, antiraciste, progressiste, moderne, laïque, ouvert » face à « réactionnaire, raciste, antisémite, intégriste, complotiste, révisionniste, extrémiste, xénophobe ». Le camp du bien face au camp du mal. Une idée est vraie ou fausse et non pas bien ou mal. La morale s’applique aux actions et non à la pensée. Difficile de dialoguer avec ce logiciel idéologique binaire qui exclut tout ce qu’il ne peut inclure.
Je suis conscient que les journalistes ne se rendent pas compte de ce qu’ils font (même si ils sont conscients des petites manipulations qu’ils commettent pour imposer leur vision du monde), car ils sont les premiers touchés par ce mouvement global d’inversion des valeurs, et c’est bien cela qui me dérange : qu’ils n’aient pas l’intelligence de voir les choses d’une perspective plus haute, plus profonde et plus claire.
Ils défendent avec acharnement une vision de l’Homme qu’ils ne comprennent pas eux-mêmes.
Mais ce processus d’inversion, décrit si bien par René Guénon, ne peut qu’aboutir à son contraire, et lorsque tous les yeux s’ouvriront, l’inversion s’inversera, la restauration adviendra, et l’humanité connaîtra un nouvel Âge d’or.
Abraxas