Grèce: de la « faillite sanitaire » organisée par l’Union européenne à la « crise humanitaire »
Vu sur Le blog de Lucien Pons
La Grèce, laboratoire de la barbarie de l’Union européenne du capital. En 2004, Giscard louait les origines « grecques » de la civilisation démocratique européenne pour faire passer sa constitution anti-démocratique. Dix ans après, l’Europe détruit la civilisation grecque, ce qu’il pouvait en rester de démocratique.
Le rapport publié dans la prestigieuse revue médicale britannique « The Lancet », impliquant des chercheurs de Londres, Cambridge et Oxford ne nous apprend hélas pas de scoops, elle ne fait que confirmer, synthétiser l’ampleur du désastre humanitaire, de la crise sanitaire que vit la Grcèe.
« Greece’s health crisis: from austerity to denialism », ce rapport publié en février dernier, ne permet plus le déni (denialism) face au développement de maladies que l’on croyait éradiquées, l’explosion des troubles psychologiques, des épidémies, de la mortalité infantile.
On a peine à croire que l’OMS classait encore au début des années 2000 le système de santé public grec parmi les 15 plus performants au monde, devant celui allemand ou britannique. Aujourd’hui, le système de santé grec est en « tiers-mondisation », résultat d’un choix politique.
Saigné par les mesures de rigueur imposées par la « Troïka », le gouvernement grec a réduit le budget de la santé grecque de près de 40 % depuis 2009.Pour la seule année 2014, le budget de la santé subit une baisse de 19 %, celui de la Sécurité sociale de 30 % !
Pour l’hôpital public, la saignée
Les premières victimes, les hôpitaux grecs dont le budget a baissé de 26 % entre 2009 et 2011, et qui va connaître une réduction de 32 % seulement en 2014. Ils manquent de tout : lits, médicaments, matériels de base – y compris seringues, compresses, gants – et personnel.
Sur les 132 hôpitaux que compte le pays, 50 sont menacés de fermeture d’ici l’an prochain. 12 hôpitaux publics ont déjà fermé leurs portes à Athènes et Salonique au nom des « restructurations-fusions ». L’intégralité des hôpitaux psychiatriques devrait être démantelés en 2015.
En termes de lits, 10 000 ont été supprimés depuis le début de la crise.
Seconde victime, les travailleurs de la santé, dont l’embauche en contrat permanent est gelé.
On estime que 35 000 travailleurs de la santé, infirmières, docteurs ont perdu leur emploi depuis le début de la politique d’austérité, en premier lieu les travailleurs en CDD. Selon l’OMS, 26 000 travailleurs de la santé, dont 9 000 médecins, pourraient être licenciés dans les prochaines années.
En quatre ans, le salaire des personnels de santé – médecins, infirmiers, aides – a subi des baisses allant de 30 à 100 %. Désormais, le recrutement des médecins hospitaliers se réalise à 1 000 € pour des horaires extensibles jusqu’à 48 h ou plus.
Troisième victime, les patients bien sûr. Selon le rapport de la revue « The Lancet », 800 000 Grecs seraient privés de toute couverture médicale. Le chiffre serait en réalité beaucoup plus élevé, sachant qu’en Grèce l’accès aux soins médicaux est conditionné au travail.
Selon le président de l’EOPYY (Instiut de sécurité sociale grec), Dimitris Kontos, ce seraient 3,1 millions de Grecs qui auraient perdu toute couverture médicale publique, soit près de 30 % de la population. Selon lui, 3,3 millions de personnes – notamment les commerçants au bord de la faillite – seraient sur le point de la perdre également.
Désormais, comme dans les pays du Tiers-monde, ce sont les ONG – tant locales qu’internationales – ainsi que les centres de santé communautaires qui constituent la seule alternative à cette faillite organisée du système public de santé.
… au profit du privé, vive le serment d’Hypocrite !
A qui profite le crime ? On serait tenté de dire que le secteur privé subit la crise autant que le public, voire plus dans un pays où en 2010 près de 40 % des dépenses de santé étaient assurés par un secteur privé bien implanté dans les cliniques privées, centres de diagnostic, médecins libéraux.
En fait, l’emprise du secteur privé sur la santé grecque tend à se renforcer. D’une part, car le gouvernement – tout en diminuant les moyens accordés à l’hôpital public – continue de favoriser l’expansion des cliniques privées.
Ainsi, en 2012, comble du cynisme, le gouvernement grec parie encore sur le « tourisme médical », la marchandisation d’opérations cosmétiques ou bénignes (ex : chrirurgie esthétique), espérant faire venir en Grèce 100 000 touristes en cinq ans, attirés par l’expertise médicale grecque.
D’autre part, les cliniques privées ont affirmé, en octobre 2013, refuser désormais tous les « clients » assurés par l’organisme public de Sécurité sociale(l’EOPYY), pour la raison que l’EOPYY devait 800 millions de $ aux institutions de santé privées.
La marchandisation devient la norme, comme aux Etats-unis, présenter la carte bleue devient le passe pour espérer un traitement des pathologies les plus lourdes tels les cancers.
On se rappelle que le ministre de la Santé grec avait osé déclarer en 2013 que « les maladies comme le cancer ne sont pas considérées comme urgentes, sauf si vous êtes dans la phase avancée. » Avec un tel ministre de la Santé, vive le serment d’hypocrite!
Les déremboursements ont explosé depuis 2011, les patients devant prendre à leur charge en moyenne 25 % de leurs médicaments – plus 50 autres % si il n’est pas dans la liste de la Sécurité sociale.
Toutefois, la dette de l’organisme de Sécurité sociale envers les pharmaciens a poussé ces derniers à exiger des patients à « avancer » la somme intégrale de leur traitement. Ceux qui le peuvent, le font espérant un remboursement ultérieur, les autres qui ne peuvent pas payer se privent de traitement.
En 2011, le gouvernement avait augmenté le coût des consultations externes de 3 à 5 $. En 2014, il devait augmenter le coût de toute consultation médicale de 1 $, tout en faisant payer un forfait hospitalier de 25 $ par jour.
La responsabilité des grands laboratoires pharmaceutiques multi-nationaux ne peut non plus être minimisée, eux qui sont à l’origine d’une pénurie de médicaments en Grèce, aux conséquences désastreuses pour la santé des Grecs.
Les Roche, Pfizer, Sanofi, GSK fuient tous la Grèce, déclarée insolvable, empêchant la livraison de 200 médicaments parfois vitaux, ceux contre l’arthrose, l’hépatite C, le choléstérol, les anti-psychotiques, les anti-biotiques ou les produits anésthésiques.
Ces entreprises ont reconnu ne plus livrer de médicaments aux hôpitaux publics, aux pharmacies conventionnées en raison d’une dette de 2 milliards de $ contractée à partir de 2011, surtout face à la faible profitabilité du marché grec, la nécessité objective de casser les prix.
Enfin, la logique du privé s’impose de plus en plus dans les hôpitaux publics, celle de la tarification à l’activité, du « coût-profit » y compris au détriment de la vie humaine.
Le bilan, un « désastre humanitaire et sanitaire »
C’est le constat dressé dans l’article publié dans « The Lancet », il fait froid dans le dos, encore il s’appuie essentiellement sur les chiffres portant sur la période 2008-2011, et non sur la période maximale des coupes budgétaires, depuis 2011.
Ainsi, le nombre de personnes infectées par le virus du SIDA a doublé depuis 2008, passant de plus de 650 malades à 1 200 en 2012. Parmi les consommateurs de drogue, le chiffre a explosé, passant de 9 à 484.
En effet, les distributions de préservatifs, de seringues aux personnes dépendantes de la drogue – dans le cadre de travail de rue réalisé par les personnels de santé – ont chuté respectivement de 25 et 10 %, pour la seule année 2010.
Des maladies que l’on croyait disparues refont leur apparition. La malaria, que l’on imaginait éradiquée depuis 40 ans, se développe à nouveau en Grèce, avec la réduction des budgets locaux pour les dispositifs de prévention anti-moustiques.
Le virus du Nil occidental a également refait son apparition – pour les mêmes raisons. En 2011, il avait fait un retour foudroyant, contaminant une centaine de personnes, causant le décès de 9 résidents grecs.
L’indicateur souvent pris pour mesurer le degré de « développement » d’un pays peut nous aider à mesurer le degré de civilisation :le taux de mortalité infantile a grimpé de 43 % entre 2008 et 2010, après avoir connu une tendance séculaire à la baisse.
Le nombre de bébés souffrant d’un poids insuffisant à la naissance a augmenté de 19 % entre 2008 et 2010. On sait que le nombre d’enfants, par la suite, se rendant à l’école dans une situation de « précarité alimentaire » approche les deux-tiers, des chiffres bien supérieurs à ceux de pays africains comme le Malawi ou le Zimbabwe.
Enfin, la santé mentale des Grecs en pâtit, le taux de dépression dans la population a quasiment triplé, passant de 3 à 8 % entre 2008 et 2011. Le nombre de personnes ayant commis un suicide a augmenté de 45 % entre 2007 et 2011.
Au moment où la demande pour des aides psychologiques a augmenté de 120 % depuis le début de la crise, le gouvernement a déjà divisé par deux le soutien aux institutions publiques consacrées à la santé mentale.
Se souvenir du désastre sanitaire dans la transition au capitalisme en Russie
Le « traitement de choc » consacré à la Grèce n’est pas le premier. Nombre de pays africains, sud-américains, asiatiques ont connu les recettes miracles du FMI, elles l’ont payé par des tragédies humaines.
Comparaison adaptée, le traitement réservé à la Russie après la dissolution de l’URSS, le renversement du régime communiste, qui avait causé la vie à une million de personnes, selon une autre étude réalisée par la revue médicale « The Lancet » (voir ici : http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/article-1-million-de-morts-imputables-directement-aux-politiques-de-privatisation-en-europe-de-l-est-apres-1989-39087819.html)
Une analyse extrêmement prudente, cherchant une corrélation directe entre privatisation de la santé et mortalité restreinte ici aux hommes en âge de travailler.
La conclusion du million de mort causé directement par la privatisation de la santé en Russie post-sovétique est donc sans doute sous-estimée. Certaines agences de l’ONU ont parlé de trois millions de morts. Où sont les pourfendeurs des « millions de morts » du communisme ?
En tout cas, le peuple grec, tout comme le peuple français, n’a qu’à regarder le sort tragique du peuple russe.
Les médecins, infirmières, personnels de santé, tout comme les usagers grecs ne s’y trompent pas. Eux qui mènent la lutte depuis quatre ans contre les fermetures d’hôpitaux, les licenciements dans la santé, les déremboursements.
Ce 27 mars, les pharmaciens ont lancé une grève de 24 heure contre le projet de la « Troika » d’accorder des licences à des chaînes de pharmacie privées, ou à des points de vente dans les supermarchés du pays.
La lutte continue en Grèce pour redonner au « serment d’Hippocrate » sa raison d’être, en repoussant toute logique de marchandisation de ce besoin inaliénable de l’homme, la santé !
Source du rapport publié
dans la revue « The Lancet » : http://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736%2813%2962291-6/abstract
Source: Le Blog de Lucien Pons, http://lucien-pons.over-blog.com/article-la-grece-de-la-faillite-sanitaire-organisee-par-l-union-europeenne-a-la-crise-humanitaire-123191396.html
Vu sur Le blog de Lucien Pons
La Grèce, laboratoire de la barbarie de l’Union européenne du capital. En 2004, Giscard louait les origines « grecques » de la civilisation démocratique européenne pour faire passer sa constitution anti-démocratique. Dix ans après, l’Europe détruit la civilisation grecque, ce qu’il pouvait en rester de démocratique.
Le rapport publié dans la prestigieuse revue médicale britannique « The Lancet », impliquant des chercheurs de Londres, Cambridge et Oxford ne nous apprend hélas pas de scoops, elle ne fait que confirmer, synthétiser l’ampleur du désastre humanitaire, de la crise sanitaire que vit la Grcèe.
« Greece’s health crisis: from austerity to denialism », ce rapport publié en février dernier, ne permet plus le déni (denialism) face au développement de maladies que l’on croyait éradiquées, l’explosion des troubles psychologiques, des épidémies, de la mortalité infantile.
On a peine à croire que l’OMS classait encore au début des années 2000 le système de santé public grec parmi les 15 plus performants au monde, devant celui allemand ou britannique. Aujourd’hui, le système de santé grec est en « tiers-mondisation », résultat d’un choix politique.
Saigné par les mesures de rigueur imposées par la « Troïka », le gouvernement grec a réduit le budget de la santé grecque de près de 40 % depuis 2009.Pour la seule année 2014, le budget de la santé subit une baisse de 19 %, celui de la Sécurité sociale de 30 % !
Pour l’hôpital public, la saignée
Les premières victimes, les hôpitaux grecs dont le budget a baissé de 26 % entre 2009 et 2011, et qui va connaître une réduction de 32 % seulement en 2014. Ils manquent de tout : lits, médicaments, matériels de base – y compris seringues, compresses, gants – et personnel.
Sur les 132 hôpitaux que compte le pays, 50 sont menacés de fermeture d’ici l’an prochain. 12 hôpitaux publics ont déjà fermé leurs portes à Athènes et Salonique au nom des « restructurations-fusions ». L’intégralité des hôpitaux psychiatriques devrait être démantelés en 2015.
En termes de lits, 10 000 ont été supprimés depuis le début de la crise.
Seconde victime, les travailleurs de la santé, dont l’embauche en contrat permanent est gelé.
On estime que 35 000 travailleurs de la santé, infirmières, docteurs ont perdu leur emploi depuis le début de la politique d’austérité, en premier lieu les travailleurs en CDD. Selon l’OMS, 26 000 travailleurs de la santé, dont 9 000 médecins, pourraient être licenciés dans les prochaines années.
En quatre ans, le salaire des personnels de santé – médecins, infirmiers, aides – a subi des baisses allant de 30 à 100 %. Désormais, le recrutement des médecins hospitaliers se réalise à 1 000 € pour des horaires extensibles jusqu’à 48 h ou plus.
Troisième victime, les patients bien sûr. Selon le rapport de la revue « The Lancet », 800 000 Grecs seraient privés de toute couverture médicale. Le chiffre serait en réalité beaucoup plus élevé, sachant qu’en Grèce l’accès aux soins médicaux est conditionné au travail.
Selon le président de l’EOPYY (Instiut de sécurité sociale grec), Dimitris Kontos, ce seraient 3,1 millions de Grecs qui auraient perdu toute couverture médicale publique, soit près de 30 % de la population. Selon lui, 3,3 millions de personnes – notamment les commerçants au bord de la faillite – seraient sur le point de la perdre également.
Désormais, comme dans les pays du Tiers-monde, ce sont les ONG – tant locales qu’internationales – ainsi que les centres de santé communautaires qui constituent la seule alternative à cette faillite organisée du système public de santé.
… au profit du privé, vive le serment d’Hypocrite !
A qui profite le crime ? On serait tenté de dire que le secteur privé subit la crise autant que le public, voire plus dans un pays où en 2010 près de 40 % des dépenses de santé étaient assurés par un secteur privé bien implanté dans les cliniques privées, centres de diagnostic, médecins libéraux.
En fait, l’emprise du secteur privé sur la santé grecque tend à se renforcer. D’une part, car le gouvernement – tout en diminuant les moyens accordés à l’hôpital public – continue de favoriser l’expansion des cliniques privées.
Ainsi, en 2012, comble du cynisme, le gouvernement grec parie encore sur le « tourisme médical », la marchandisation d’opérations cosmétiques ou bénignes (ex : chrirurgie esthétique), espérant faire venir en Grèce 100 000 touristes en cinq ans, attirés par l’expertise médicale grecque.
D’autre part, les cliniques privées ont affirmé, en octobre 2013, refuser désormais tous les « clients » assurés par l’organisme public de Sécurité sociale(l’EOPYY), pour la raison que l’EOPYY devait 800 millions de $ aux institutions de santé privées.
La marchandisation devient la norme, comme aux Etats-unis, présenter la carte bleue devient le passe pour espérer un traitement des pathologies les plus lourdes tels les cancers.
On se rappelle que le ministre de la Santé grec avait osé déclarer en 2013 que « les maladies comme le cancer ne sont pas considérées comme urgentes, sauf si vous êtes dans la phase avancée. » Avec un tel ministre de la Santé, vive le serment d’hypocrite!
Les déremboursements ont explosé depuis 2011, les patients devant prendre à leur charge en moyenne 25 % de leurs médicaments – plus 50 autres % si il n’est pas dans la liste de la Sécurité sociale.
Toutefois, la dette de l’organisme de Sécurité sociale envers les pharmaciens a poussé ces derniers à exiger des patients à « avancer » la somme intégrale de leur traitement. Ceux qui le peuvent, le font espérant un remboursement ultérieur, les autres qui ne peuvent pas payer se privent de traitement.
En 2011, le gouvernement avait augmenté le coût des consultations externes de 3 à 5 $. En 2014, il devait augmenter le coût de toute consultation médicale de 1 $, tout en faisant payer un forfait hospitalier de 25 $ par jour.
La responsabilité des grands laboratoires pharmaceutiques multi-nationaux ne peut non plus être minimisée, eux qui sont à l’origine d’une pénurie de médicaments en Grèce, aux conséquences désastreuses pour la santé des Grecs.
Les Roche, Pfizer, Sanofi, GSK fuient tous la Grèce, déclarée insolvable, empêchant la livraison de 200 médicaments parfois vitaux, ceux contre l’arthrose, l’hépatite C, le choléstérol, les anti-psychotiques, les anti-biotiques ou les produits anésthésiques.
Ces entreprises ont reconnu ne plus livrer de médicaments aux hôpitaux publics, aux pharmacies conventionnées en raison d’une dette de 2 milliards de $ contractée à partir de 2011, surtout face à la faible profitabilité du marché grec, la nécessité objective de casser les prix.
Enfin, la logique du privé s’impose de plus en plus dans les hôpitaux publics, celle de la tarification à l’activité, du « coût-profit » y compris au détriment de la vie humaine.
Le bilan, un « désastre humanitaire et sanitaire »
C’est le constat dressé dans l’article publié dans « The Lancet », il fait froid dans le dos, encore il s’appuie essentiellement sur les chiffres portant sur la période 2008-2011, et non sur la période maximale des coupes budgétaires, depuis 2011.
Ainsi, le nombre de personnes infectées par le virus du SIDA a doublé depuis 2008, passant de plus de 650 malades à 1 200 en 2012. Parmi les consommateurs de drogue, le chiffre a explosé, passant de 9 à 484.
En effet, les distributions de préservatifs, de seringues aux personnes dépendantes de la drogue – dans le cadre de travail de rue réalisé par les personnels de santé – ont chuté respectivement de 25 et 10 %, pour la seule année 2010.
Des maladies que l’on croyait disparues refont leur apparition. La malaria, que l’on imaginait éradiquée depuis 40 ans, se développe à nouveau en Grèce, avec la réduction des budgets locaux pour les dispositifs de prévention anti-moustiques.
Le virus du Nil occidental a également refait son apparition – pour les mêmes raisons. En 2011, il avait fait un retour foudroyant, contaminant une centaine de personnes, causant le décès de 9 résidents grecs.
L’indicateur souvent pris pour mesurer le degré de « développement » d’un pays peut nous aider à mesurer le degré de civilisation :le taux de mortalité infantile a grimpé de 43 % entre 2008 et 2010, après avoir connu une tendance séculaire à la baisse.
Le nombre de bébés souffrant d’un poids insuffisant à la naissance a augmenté de 19 % entre 2008 et 2010. On sait que le nombre d’enfants, par la suite, se rendant à l’école dans une situation de « précarité alimentaire » approche les deux-tiers, des chiffres bien supérieurs à ceux de pays africains comme le Malawi ou le Zimbabwe.
Enfin, la santé mentale des Grecs en pâtit, le taux de dépression dans la population a quasiment triplé, passant de 3 à 8 % entre 2008 et 2011. Le nombre de personnes ayant commis un suicide a augmenté de 45 % entre 2007 et 2011.
Au moment où la demande pour des aides psychologiques a augmenté de 120 % depuis le début de la crise, le gouvernement a déjà divisé par deux le soutien aux institutions publiques consacrées à la santé mentale.
Se souvenir du désastre sanitaire dans la transition au capitalisme en Russie
Le « traitement de choc » consacré à la Grèce n’est pas le premier. Nombre de pays africains, sud-américains, asiatiques ont connu les recettes miracles du FMI, elles l’ont payé par des tragédies humaines.
Comparaison adaptée, le traitement réservé à la Russie après la dissolution de l’URSS, le renversement du régime communiste, qui avait causé la vie à une million de personnes, selon une autre étude réalisée par la revue médicale « The Lancet » (voir ici : http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/article-1-million-de-morts-imputables-directement-aux-politiques-de-privatisation-en-europe-de-l-est-apres-1989-39087819.html)
Une analyse extrêmement prudente, cherchant une corrélation directe entre privatisation de la santé et mortalité restreinte ici aux hommes en âge de travailler.
La conclusion du million de mort causé directement par la privatisation de la santé en Russie post-sovétique est donc sans doute sous-estimée. Certaines agences de l’ONU ont parlé de trois millions de morts. Où sont les pourfendeurs des « millions de morts » du communisme ?
En tout cas, le peuple grec, tout comme le peuple français, n’a qu’à regarder le sort tragique du peuple russe.
Les médecins, infirmières, personnels de santé, tout comme les usagers grecs ne s’y trompent pas. Eux qui mènent la lutte depuis quatre ans contre les fermetures d’hôpitaux, les licenciements dans la santé, les déremboursements.
Ce 27 mars, les pharmaciens ont lancé une grève de 24 heure contre le projet de la « Troika » d’accorder des licences à des chaînes de pharmacie privées, ou à des points de vente dans les supermarchés du pays.
La lutte continue en Grèce pour redonner au « serment d’Hippocrate » sa raison d’être, en repoussant toute logique de marchandisation de ce besoin inaliénable de l’homme, la santé !
Source du rapport publié
dans la revue « The Lancet » : http://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736%2813%2962291-6/abstract
Source: Le Blog de Lucien Pons, http://lucien-pons.over-blog.com/article-la-grece-de-la-faillite-sanitaire-organisee-par-l-union-europeenne-a-la-crise-humanitaire-123191396.html