mercredi 18 juin 2014

France : Votre patron va pouvoir modifier votre contrat de travail... Et baisser votre salaire (Le veilleur)

France : Votre patron va pouvoir modifier votre contrat de travail... Et baisser votre salaire

                 
Licenciements à la pelle, multiples réforme des retraites, modifications des systèmes de protection sociale, changement de fiscalité des assurances vie, nouvelle loi sur les comptes bancaires inactifs, nouvelles taxes concernant l'épargne privée, augmentation des cotisations du régime auto entrepreneur à venir, et maintenant les baisses de salaire autorisées.

Dans la même période en 2013, je publiais sous le titre «
L'élite et les banques comptent se servir de la crise pour abaisser les salaires de 30 à 50% », information précédée de l'avertissement « Les citoyens doivent se préparer à une baisse de leur salaire ». Bien entendu, si ces informations provenant des hautes sphères ont filtré jusqu'à nos oreilles, c'était probablement pour étudier les réactions qui s'en suivraient en vue d'évaluer l'opposition.

Celle-ci ayant été quasi-nulle, tout comme la réaction du peuple face a la loi de la « sécurisation de l'emploi »,
marquant la fin du CDI tel que nous le connaissions, il était donc prévisible que la doctrine du choc continue son cours comme elle l'a déjà fait en Grèce, et plus récemment en Espagne. Gageons que la catastrophe qui nous guette par la ratification du pacte transatlantique, et qui sera bien plus accentuée par l'accord économique sino-russe qui commence déjà à impacter le dollar - et de facto l'euro -, va accentuer cette tendance avant la fin de cette année.

Le veilleur

La Cour de cassation considère désormais qu'un salarié ne peut plus refuser toute modification de son contrat voulue par l'employeur. Y compris une baisse de salaire, si elle reste mineure.

Un salarié ne peut plus refuser toute modification de son
contrat de travail décidée unilatéralement par son patron. La Cour de cassation a modifié son point de vue dans un arrêt du 12 juin 2014. Alors qu'elle l'excluait formellement depuis de nombreuses années, elle juge désormais qu'un employé peut se voir imposer une modification de son contrat, à condition qu'elle n'empêche pas, objectivement, sa poursuite, et donc qu'elle soit mineure.

Il s'agit, de la part du juge, de l'introduction d'une certaine souplesse dans les relations employeur-employé, qui était absolument exclue jusqu'à présent. La Cour jugeait invariablement que ce qui avait fait l'objet d'un contrat signé ne pouvait en aucun cas être modifié par une partie sans l'accord de l'autre. Elle admettait seulement que la modification refusée, si elle était nécessaire, puisse justifier un
licenciement, mais avec indemnités.

Cette modification mineure, que le salarié doit désormais accepter, peut même porter sur des éléments essentiels, comme le
montant de la rémunération. Ce que les juges considéraient jusque-là comme absolument intangible, sauf accord des deux parties pour la modifier. La Cour de cassation n'admettait même pas que le mode ou le montant de la rémunération prévus au contrat soient modifiés dans un sens favorable au salarié, sans l'accord exprès de celui-ci.

Le salarié ne peut plus s'estimer licencié

Si le changement n'est pas un obstacle à la poursuite des relations de travail dans des conditions normales, le salarié ne peut plus s'estimer licencié, ni demander aux
prud'hommes de constater la résiliation de son contrat aux torts de son entreprise. Ceci lui donnait droit à des indemnités de licenciement et dommages-intérêts pour licenciement abusif.

« Il ne peut plus sauter sur l'occasion pour quitter l'entreprise avec indemnités »
, résume un magistrat. La Cour de cassation vient en l'espèce d'admettre qu'un patron impose à son salarié une
baisse de son taux de rémunération, parce que cette baisse « représentait une faible partie de la rémunération ».

L'employeur peut-il diminuer les salaires en temps de crise ?

Tout salarié redoute aujourd'hui d'être un jour confronté à un terrible ultimatum : baisser son salaire ou être licencié. Le Code du travail a anticipé cette éventualité, très encadrée par la loi.

Une entreprise peut-elle imposer de manière unilatérale une diminution de salaire ? La réponse est non. Que le salarié soit en CDD ou en CDI. Ainsi, même si l'employeur connaît les pires difficultés financières, mais que contractuellement le salarié doit bénéficier d'une augmentation, d'un coefficient plus important pour le calcul de sa rémunération ou d'une évolution de poste, il est dans l'obligation de respecter ses engagements. Idem pour les rémunérations divisées en deux parties, fixe et variable.

L'accord obligatoire du salarié

Certes, le « chantage à l'emploi » est une donnée à laquelle on peut être confronté dans un secteur en crise. Mais « le mode de rémunération d'un salarié constitue un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié sans son accord » (arrêt de la Cour de cassation du 2 novembre 2005, n°03-44.278). S'il veut le changer, même de manière minime, l'employeur a l'obligation constante d'obtenir l'accord « non équivoque » du salarié : « l'acceptation de cette modification ne peut résulter de la seule poursuite, par [le salarié], du travail » (cass. 16 novembre 2005, n° 03-47.560) et « l'absence de contestation, même pendant plusieurs années, ne saurait faire la preuve de l'acceptation » (cass., 6 octobre 2010, n° 09-68.962). 

Un avenant au contrat de travail

Dans tous les cas, l'employeur qui souhaite baisser la rémunération d'un salarié doit l'en informer par écrit (lettre recommandée) en lui proposant un avenant qui modifie le contrat de travail (
article L1222-6 du Code du travail). 

Le salarié a un mois pour en accepter ou refuser les termes (sans justification dans ce dernier cas). Ce nouveau contrat doit indiquer les fonctions, la durée du travail (passage fréquent d'un temps plein à un temps partiel), la rémunération et la durée de l'avenant.

Si le salarié refuse, son employeur ne peut le considérer comme démissionnaire (cass., 28 janvier 1998, n° 95-40.275). S'il décide de le licencier, il devra invoquer un motif réel et sérieux, mais ne pourra s'appuyer sur ce refus. 

Les contreparties nécessaires

Les relations contractuelles restent soumises à un barème minimal : un employeur ne peut pas baisser le montant du SMIC (9,40 € brut l'heure depuis le 1er juillet 2012). Il n'a qu'une solution lorsqu'il propose un avenant à cette catégorie de salariés : assortir la diminution du salaire d'une diminution du temps de travail. Pour les salaires supérieurs au SMIC, une baisse est envisageable sous réserve de négociations entre les salariés et l'employeur.

La baisse de salaire s'accompagne aussi généralement d'une baisse du temps de travail, même si
l'employeur n'a aucune obligation dans ce domaine. Ainsi, plusieurs cas restent dans les mémoires, comme celui des ouvriers de Continental à Clairoix (60), qui, en 2007, avaient accepté de travailler quarante heures hebdomadaires, payées trente-cinq, pour assurer leur travail sur le site jusqu'en 2012.

Envisager d'autres solutions

Dans les entreprises de plus de 10 salariés, la direction doit consulter le représentant du personnel ou le CE pour que toutes les solutions, telles que la prise de congés, de RTT, ou la mise en oeuvre du chômage partiel, soient choisies avant la réduction du salaire. Quelles que soient les solutions envisagées et proposées, le salarié reste seul maître de son contrat de travail.
 

Sources :
 •
informaction.info
 • lexpress.fr