CICE : François Hollande vient de me faire cadeau de 50 000 euros !
Je ne fais pas d’export et ne compte pas en faire. Je paiera 591 153 euros d’impôts à titre personnel cette année. Bref, je n’en avais pas besoin, mais un petit billet de 50 000 c’est toujours bienvenu. Franchement merci, François Hollande.
C’est donc aussi ça, le fameux crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) ? Un gros cadeau qui ne se voit pas donné à des gens qui n’en ont pas forcément besoin ? Combien d’entreprises, comme la mienne ou encore plus rentables, ont touché le pactole ? Qu’en ont-elles fait ?
Le coût du CICE risque d’exploser
Cette histoire a d’ailleurs pour moi un goût déjà vu. Entre 2009 et 2012, la fabuleuse baisse de la TVA dans la restauration [PDF] m’avait permis d’empocher quelques centaines de milliers d’euros avec lesquels j’avais d’ailleurs produit le film « République de la Malbouffe » dans lequel je dénonçais les incohérences d’une des mesures les plus emblématiques du sarkozysme.Faudra certainement que je ponde quelque chose sur cette mesure phare du hollandisme. Si au final la mesure bling-bling de l’ancien Président des riches a coûté une dizaine de milliards aux deniers de l’Etat pour des résultats médiocres voir contraires aux objectifs fixés, le coût global du CICE sauce Hollande risque d’exploser au-delà de 50 milliards s’il est maintenu dans les conditions actuelles jusqu’à la fin du quinquennat.
Sans contreparties ciblées comme je le réclamais déjà dans une lettre adressée au Président en janvier 2014, ce nouveau cadeau aura des résultats assez similaires à ce qui s’est passé dans la restauration avec la baisse de la TVA. Peu d’emplois et peu d’activité, beaucoup d’effets d’aubaine et pas mal de dividendes. Et surtout, des miettes pour les TPE, des lichettes pour les PME et des grosses parts de gâteau pour les grandes entreprises.
Du fric empoché discrètement
Après avoir amélioré ses marges de 190 millions d’euros par an grâce à la baisse de la TVA pendant trois ans, combien une entreprise comme McDonald’s va-t-elle déduire de ses impôts ? McDo qui emploie massivement des salariés au smic et s’arrangerait depuis 2009 pour payer le minimum d’impôts en France va donc réclamer un très gros chèque auprès des services de Bercy.La France est décidément un eldorado inépuisable pour la marque du clown. D’ailleurs, le Président habitera-t-il encore à l’Elysée lorsque la publication des datas sur cette mesure, entreprise par entreprise, permettra d’en faire le vrai bilan ?
Certes, des petites et moyennes entreprises profitent certainement de cette mesure pour renflouer leur trésorerie, investir ou embaucher mais était-il nécessaire de sortir le canon à eau pour bien arroser quelques spécimens ? A moins que l’on me prouve que le doublement des bénéfices de la Poste grâce aux 297 millions d’euros de son CICE ait permis à cette entreprise d’investir, d’embaucher ou d’innover plus qu’à l’accoutumée, il n’y aura que les actionnaires et les boites largement arrosées pour croire aux vertus de ce dispositif.
L’angoisse réelle ou feinte du patronat avant la conférence sociale ne servirait-elle pas à occulter ce joli paquet de fric que les entreprises empochent discrètement avec la mise en œuvre du CICE ?
Le nouveau Président des grands patrons
En remettant à mes salariés les bulletins de paye du mois de juin que j’ai agrémenté d’une « prime exceptionnelle de CICE » correspondant à un mois de salaire de base sous certaines conditions d’ancienneté, je me suis rendu compte qu’aucun d’entre eux comme la grande majorité des salariés de ce pays ne savait ce que recouvrait le CICE. Je leur avais pourtant bien écrit :« Suite à la réunion du début de l’année avec 75% des salariés de l’entreprise, suite à la réalisation du bilan 2013, suite au dépôt de ma déclaration d’impôts 2013 et après consultation de la déléguée du personnel, j’ai décidé d’attribuer l’ensemble du montant du CICE à l’amélioration de votre pouvoir d’achat bien écorné par des hausses d’impôts successifs et la fin (brutale et maladroite) du dispositif sur les heures supplémentaires. »Alors qu’il serait temps d’atténuer les tensions sociales et de réduire les inégalités, d’inciter massivement à l’investissement productif et à la formation des salariés dans les TPE et PME, le gouvernement n’a pas eu le courage d’imposer des contreparties aux organisations patronales. A la fin de son mandat, le nouveau Président des grands patrons mettra certainement en avant le fait que les petits chefs d’entreprises à l’agonie n’auraient pas survécu sans ce dispositif. Une rhétorique déjà entendue et qui cette fois-ci risque de ne pas passer comme une lettre à la poste.
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