vendredi 5 septembre 2014

Chroniques de la MERDE. Quatrième partie : la crise (Les moutons enragés)

Chroniques de la MERDE. Quatrième partie : la crise

La Crise

Chez nous c’est la crise. Tous les experts l’affirment ( ils sont innombrables et leur nombre augmente sans cesse), de même que tous les politiciens : le Bouffisme traverse une crise sans précédent. Impossible ! me direz-vous, car comme tout le monde en convient chez nous depuis longtemps (sauf bien entendu les socio-traitres, fonctionnaires acariâtres, et réactionnaires de tout poil) le Bouffisme est le système économique et social le plus performant (d’ailleurs on n’a pas trouvé mieux, allez donc voir chez Eux comment ça se passe !) et le seul qui permette le développement exponentiel du Progrès.
Tous les experts l’affirment ainsi que l’immense majorité de nos politiciens, depuis quelques temps tout n’augmente pas aussi vite que d’habitude, pire, l’augmentation générale de tout serait en diminution. Invraisemblable ! Comment tout ne pourrait-il pas augmenter puisque le Bouffisme consiste précisément en l’augmentation de tout ? Face à l’incompréhension de nos concitoyens (ou alors il s’agit d’agents de chez Eux spécialement entraînés…) les experts et les politiciens se sont donc livrés à un exercice difficile, voir extrêmement difficile ( il fut même parfois qualifié d’impossible par certains mais il s’agissait probablement de socio-traitres) : ils ont expliqué quelles étaient les causes de la diminution de l’augmentation de tout ainsi que ses conséquences les plus probables. Bien évidemment personne n’a crû un seul de leurs bobards car comme tout le monde l’a compris depuis longtemps (chez nous nous sommes lucides, contrairement à Eux) les experts n’ont jamais rien compris à quoi que ce soit (dans le cas contraire on aurait pas besoin de leurs services) et les politiciens sont incompétents. D’ailleurs s’ils étaient bons à quelque chose ils travailleraient comme tout le monde.
Selon les experts et les politiciens donc, la crise aurait pour cause un simple excès de Bouffisme (elle fut plus tard répertoriée parmi les affections économiques sous la dénomination d’Enflure Bouffique). Cet excès localisé et bénin à l’origine (imaginez que vous repreniez 2 fois du fondant au chocolat par exemple, alors que vous avez par ailleurs déjà repris 3 fois de la charlotte aux fraises…) aurait été aggravé sous l’effet du GLURB qui l’aurait démultiplié et étendu à l’ensemble de ses membres sans que ces derniers en aient été informés, voir même sans qu’ils l’aient voulu. Les représentants du GLURB (c’est à dire les Patrons) prétendirent par la suite qu’ils avaient prit l’excès en question pour une avancée significative dans le développement de la globalisation et qu’ils avaient trouvé naturel d’en faire profiter tous leurs membres.
Rien de bien dramatique donc. En fait de crise, il faudrait plutôt parler d’indigestion. D’où le remède envisagé par les membres du GLURB réunis en session extraordinaire : à l’avenir, limiter les excès (à cette occasion nombre d’entre eux apprirent qu’ils faisaient parti du GLURB, chose qu’ils ignoraient jusque là).
Evidemment il s’est trouvé quelques extrémistes pour objecter : comment le Bouffisme pourrait-il être excessif puisque sa conséquence la plus immédiate et la plus visible est le Progrès ? Il serait proprement scandaleux de limiter la croissance exponentielle du Progrès ! Les experts et les politiciens se trouvèrent forts embarrassés (ce qui fit dire à certains que les extrémistes étaient en fait des agents à Eux spécialement entraînés afin de salir les idéaux immaculés du Bouffisme). Ils décidèrent finalement de lancer un vaste Plan de Relance du Bouffisme (le PROUT) destiné à relancé la croissance de l’augmentation de tout et ce sans aucune limitation puisque finalement les excès s’étaient corrigés d’eux même grâce à la diminution de l’augmentation de tout qui avait en fin de compte permis au Bouffisme de digérer. Les représentants du Bouffisme applaudirent, les membres du GLURB se congratulèrent (il s’agit en partie des mêmes personnes). Ils décidèrent ensuite à l’unanimité de se réunir régulièrement afin de se tenir informés les uns les autres des dernières nouveautés en matière de Bouffisme et pour prendre de nouvelles mesures. Les représentants les plus hardis suggérèrent aux membres de renforcer d’ors et déjà le PROUT, afin de prévenir tout risque de rechute, proposition qui fut spontanément reprise par plusieurs représentants, certains allant même jusqu’à envisager la création d’un Grand Emprunt National de Soutien du Bouffisme.
Le Nain adopta pour sa part toutes les propositions avec enthousiasme et décida même de créer le premier Ministère de la Relance du Bouffisme, le BLURP, destiné à évacuer l’excès au cas où le PROUT fut trop timoré.