jeudi 2 octobre 2014

Discours du Président Obama à l’Assemblée générale des Nations Unies (Les crises)

J’avais lu beaucoup de critiques dénonçant un discours délirant – c’est en effet largement mérité…
Merci aux traducteurs œuvrant pour la communauté
A vous de comparer avec le discours de Lavrov et de vous faire votre opinion.
24 septembre 2014
Salle des séances de l’Assemblée générale des Nations unies – New York
PRÉSIDENT OBAMA : M. Le Président, M. le Secrétaire général, MM. les délégués, Mesdames et Messieurs. Nous nous retrouvons à la croisée des chemins entre guerre et paix, entre désordre et intégration, entre peur et espoir.
Tout autour du globe, il y a des signes de progrès. L’ombre de la Guerre mondiale qui existait au moment de la fondation de cette institution a été levée et les perspectives de guerre entre les puissances majeures réduites. Le nombre d’états membres a plus que triplé et plus de gens vivent sous des gouvernements qu’ils ont élus. Des centaines de millions d’êtres humains ont été libérés de la prison de la pauvreté, la proportion de ceux vivant dans l’extrême pauvreté ayant été divisée par deux. L’économie mondiale continue de se renforcer après la pire crise financière que nous ayons jamais connue.
Aujourd’hui, que vous viviez dans le centre de Manhattan ou dans le village de ma grand-mère à plus de 300 kilomètres de Nairobi, vous pouvez tenir dans votre main plus d’informations que n’en possèdent les plus grandes bibliothèques du Monde. Ensemble, nous avons appris à guérir la maladie et à exploiter la puissance du vent et du soleil. L’existence même de cette institution est un accomplissement unique — les peuples du monde s’engageant à résoudre pacifiquement leurs différends et leurs problèmes ensemble. Je dis souvent aux jeunes aux États-Unis que malgré les gros titres, ceci est le meilleur moment de tout l’Histoire humaine pour vivre, car vous avez plus de chances que jamais auparavant d’être alphabétisé, d’être en bonne santé, d’être libre de poursuivre vos rêves.
Et pourtant il y a un malaise omniprésent dans notre monde — un sentiment que les forces mêmes qui nous ont réunis ont créé de nouveaux dangers et ont rendu difficile pour n’importe quelle nation de s’isoler des forces mondiales. Alors que nous nous réunissons ici, une épidémie d’Ebola submerge les systèmes de santé publique en Afrique occidentale et menace de se répandre rapidement à travers les frontières. L’agression russe en Europe rappelle les jours où de grandes nations en ont piétiné de petites dans une quête d’ambition territoriale. La brutalité des terroristes en Syrie et en Irak nous oblige à examiner le cœur des ténèbres.
Chacun de ces problèmes exige une attention urgente. Mais ce sont aussi les symptômes d’un problème plus large — l’échec de notre système international à suivre le rythme d’un monde interconnecté. Nous, collectivement, n’avons pas investi en juste proportion dans le système de santé publique des pays en voie de développement. Trop souvent, nous avons échoué à faire respecter des normes internationales quand il était inopportun de le faire. Et nous n’avons pas lutté assez puissamment contre l’intolérance, le sectarisme et le désespoir qui alimentent l’extrémisme violent dans de trop nombreuses parties du monde.
MM. les délégués, nous venons ensemble en tant que nations unies avec un choix à faire. Nous pouvons renouveler le système international qui a permis tant de progrès, ou nous pouvons nous laisser emporter par un courant sous-jacent d’instabilité. Nous pouvons réaffirmer notre responsabilité collective à nous confronter aux problèmes mondiaux, ou nous pouvons être submergés par de plus en plus de crises d’instabilité. Et pour l’Amérique, le choix est clair : nous choisissons l’espoir plutôt que la crainte. Nous voyons l’avenir non pas comme quelque chose qui nous échappe, mais comme quelque chose que nous pouvons façonner pour le meilleur grâce à un effort concerté et collectif. Nous rejetons le fatalisme ou le cynisme lorsqu’il s’agit des affaires humaines. Nous choisissons de travailler pour un monde comme il devrait être, comme nos enfants méritent qu’il soit.
Il y a beaucoup de choses qui doivent être faites pour répondre aux épreuves de ce moment. Mais aujourd’hui je voudrais me concentrer sur deux questions-clés à la base de tant de nos défis — est-ce que les pays ici aujourd’hui vont être capables de renouveler la mission fondatrice de l’ONU ; et est-ce que nous rassemblerons pour rejeter ensemble le cancer de l’extrémisme violent.
Premièrement, nous tous — grandes et petites nations — devons faire face à nos responsabilités d’observer et de faire respecter les normes internationales. Nous sommes ici parce que d’autres ont réalisé que nous gagnons plus par la coopération que par la conquête. Il y a 100 ans, une guerre mondiale a eu raison de la vie de millions d’hommes, montrant qu’avec la puissance terrible de l’armement moderne, la cause de l’empire aboutit au cimetière. Il aura fallu une autre guerre mondiale pour faire reculer les forces du fascisme, les notions de suprématie raciale, et former les Nations Unies pour s’assurer que plus jamais aucune nation ne pourrait subjuguer ses voisins et réclamer leur territoire.
Récemment, les actions de la Russie en Ukraine ont défié cet ordre de l’après-guerre. Voici les faits. Après que le peuple d’Ukraine se soit mobilisé par des manifestations populaires et un appel aux réformes, leur président corrompu s’est enfui. Contre la volonté du gouvernement de Kiev, la Crimée fut annexée. La Russie a déversé un flot d’armes sur l’est de l’Ukraine, alimentant des séparatistes violents et un conflit qui a fait des milliers de victimes. Quand un avion civil a été abattu depuis les régions contrôlées par ces intermédiaires, ils ont refusé l’accès au site de l’écrasement pendant des jours. Quand l’Ukraine a commencé à réaffirmer le contrôle sur son territoire, la Russie a abandonné le simple soutien des séparatistes et a déplacé ses troupes au-delà de la frontière.
C’est une vision du monde où la force dicte le droit – un monde dans lequel les frontières d’une nation peuvent être redessinées par une autre, et où des gens civilisés ne sont pas autorisés à récupérer les restes de leurs proches parce que la vérité pourrait être révélée. L’Amérique soutient une autre vision. Nous croyons que le droit fait la force – que les nations les plus importantes ne devraient pas pouvoir tyranniser les plus petites, et que les gens devraient pouvoir choisir leur propre destin.
Et ce sont de simples vérités, mais elles doivent être défendues. L’Amérique et nos alliés soutiendront le peuple de l’Ukraine dans le développement de leur démocratie et de leur économie. Nous allons renforcer nos alliés de l’OTAN et tenir notre engagement de défense collective. Nous ferons payer à la Russie le prix de son agression et nous opposerons aux mensonges la vérité. Et nous appelons les autres à nous rejoindre du bon côté de l’Histoire – car bien qu’on puisse obtenir des gains modestes au bout du canon d’un fusil, ceux-ci seront finalement anéantis si assez de voix soutiennent le droit des nations et des peuples à décider par eux-mêmes.
Par ailleurs, une autre voie est disponible — la voie de la diplomatie et de la paix, et les idéaux que cette institution est conçue pour promouvoir. Le récent accord de cessez-le-feu en Ukraine offre une ouverture pour atteindre ces objectifs. Si la Russie s’engage dans cette voie — une voie qui au long de la période d’après-Guerre Froide amena la prospérité au peuple russe — alors nous lèverons nos sanctions et ferons bon accueil à la Russie pour relever les défis communs. Après tout, c’est ce que les États-Unis et la Russie ont réussi à faire durant les années précédentes — de la réduction des stocks d’armements nucléaires afin de remplir nos obligations selon le traité de non-prolifération nucléaire, à la coopération pour retirer et détruire les armes chimiques déclarées par la Syrie. Et c’est le genre de coopération que nous sommes préparés à mener à nouveau — si la Russie change de cap.
Ceci soulève une question centrale de notre ère de mondialisation : allons-nous résoudre nos problèmes ensemble, dans un esprit d’intérêt et de respect mutuels, ou allons-nous nous enfoncer dans les rivalités destructrices du passé ? Lorsque les nations trouvent un terrain d’entente, pas simplement basé sur la puissance, mais sur les principes, nous pouvons faire d’énormes progrès. Et je me tiens aujourd’hui devant vous déterminé à investir la puissance américaine dans un travail avec tous les pays pour résoudre les problèmes auxquels nous sommes confrontés au XXIe siècle.
Au moment où nous parlons, l’Amérique déploie ses médecins et ses scientifiques — soutenus par nos militaires — pour aider à contenir l’épidémie d’Ebola et rechercher de nouveaux traitements. Mais nous avons besoin d’un effort plus large afin d’arrêter une maladie qui pourrait tuer des centaines de milliers de gens, infligeant d’horribles souffrances, déstabilisant les économies, et passant rapidement les frontières. Il est facile de considérer ceci comme un problème lointain — jusqu’à ce qu’il ne le soit plus. Et c’est pourquoi nous continuerons à mobiliser d’autres pays pour se joindre à nous en prenant des engagements concrets, des engagements significatifs pour combattre l’épidémie et améliorer notre système de sécurité sanitaire mondial sur le long terme.
L’Amérique recherche une solution diplomatique à la question nucléaire iranienne, dans le cadre de notre engagement à arrêter la propagation des armes nucléaires et à rechercher la paix et la sécurité d’un monde sans elles. Et cela ne peut avoir lieu que si l’Iran saisit cette occasion historique. Mon message aux dirigeants et au peuple de l’Iran a été simple et cohérent : ne laissez pas passer cette occasion. Nous pouvons parvenir à une solution qui répond à vos besoins en énergie tout en assurant au monde que votre programme est pacifique.
L’Amérique est et continuera d’être une puissance pacifique, promouvant la paix, la stabilité et le libre exercice du commerce parmi les nations. Mais nous insisterons pour que tous les pays respectent les règles de circulation et résolvent leurs différends territoriaux pacifiquement, conformément au droit international. C’est ainsi que la région Asie-Pacifique s’est développée. Et c’est la seule façon de protéger ces progrès à l’avenir.
L’Amérique s’est engagée à un ordre du jour de développement visant à supprimer la pauvreté extrême avant 2030. Nous ferons ce que nous avons à faire pour aider les populations à se nourrir elles-mêmes, faire fonctionner leurs économies et prendre soin de leurs malades. Si le monde agit de concert, nous pouvons nous assurer que tous nos enfants jouiront de vies riches en possibilités et dignité.
L’Amérique poursuit des réductions ambitieuses de nos émissions de carbone et nous avons augmenté nos investissements dans les énergies propres. Nous y prendrons notre part et aiderons les pays en voie de développement à prendre la leur. Mais la science nous dit que nous ne pouvons réussir dans le combat contre le changement climatique que si nous sommes rejoints dans cet effort par chacune des autres nations, par chaque puissance majeure. C’est ainsi que nous pouvons protéger cette planète pour nos enfants et nos petits-enfants.
Autrement dit, enjeu après enjeu, nous ne pouvons pas nous appuyer sur un règlement écrit pour un autre siècle. Si nous regardons au-delà de nos frontières — si nous pensons globalement et si nous agissons de façon coopérative — nous pouvons modeler le cours de ce siècle, comme nos prédécesseurs ont modelé la période qui a suivi la Seconde Guerre mondiale. Mais alors que nous regardons l’avenir, une question nous fait courir le risque d’un cycle de conflit qui pourrait faire dérailler tant de progrès accompli, c’est le cancer de l’extrémisme violent qui a ravagé tant de parties du monde musulman.
Bien sûr, le terrorisme n’est pas nouveau. S’exprimant devant cette assemblée, le Président Kennedy l’a souligné : « la terreur n’est pas une arme nouvelle ». « Tout au long de l’Histoire, elle a été utilisée par ceux qui ne pouvaient pas s’imposer, par la persuasion ou par l’exemplarité ». Au XXe siècle, la terreur a été utilisée par toutes sortes de groupes qui n’ont pu accéder au pouvoir par le soutien du public. Mais dans ce siècle, nous faisons face à une espèce de terroristes plus létale et idéologique qui a perverti une des plus grandes religions du monde. Avec l’accès à la technologie qui permet à des petits groupes de faire de grands dégâts, ces terroristes ont épousé une vision cauchemardesque qui divise le monde entre partisans et infidèles — tuant autant de civils innocents que possible, employant les méthodes les plus brutales pour intimider les personnes dans leurs communautés.
J’ai clairement fait savoir que l’Amérique ne fondera pas l’ensemble de notre politique étrangère sur la réaction au terrorisme. Au lieu de cela, nous avons mené une campagne ciblée contre Al-Qaïda et ses forces associées — en supprimant leurs dirigeants, leur refusant les refuges dont ils dépendent. Dans le même temps, nous avons inlassablement affirmé que les États-Unis ne sont pas et ne seront jamais en guerre avec l’islam. L’Islam enseigne la paix. Les musulmans du monde entier aspirent à vivre dans la dignité et la justice. Et quand il s’agit de l’Amérique et de l’islam, il n’y a pas eux et nous, il n’y a que nous : parce que des millions de musulmans américains font partie du tissu social de notre pays.
Donc, nous rejetons toute suggestion d’un choc des civilisations. La croyance en une guerre de religion permanente est le refuge erroné des extrémistes qui ne peuvent pas construire ou créer quoi que ce soit et ne colportent que le fanatisme et la haine. Et il n’est pas exagéré de dire que l’avenir de l’humanité dépend de notre union contre ceux qui voudraient nous diviser le long de lignes erronées de tribu ou de secte, de race ou de religion.
Mais ce n’est pas qu’une simple affaire de sémantique. Collectivement, nous devons prendre des mesures concrètes pour faire face au danger que représentent les fanatiques aux motivations religieuses, et les réseaux qui alimentent leur recrutement. De plus, cette campagne contre l’extrémisme dépasse un strict enjeu de sécurité. Alors que nous avons atteint méthodiquement le cœur d’Al-Qaïda et soutenu une transition vers un gouvernement souverain en Afghanistan, l’idéologie extrémiste s’est déplacée vers d’autres lieux, particulièrement au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, où un quart de la jeunesse est au chômage, où l’eau et la nourriture pourraient se raréfier, où la corruption est omniprésente et où les conflits tribaux sont devenus de plus en plus difficiles à contenir.
En tant que communauté internationale, nous devons répondre à ce défi, en nous concentrant sur quatre points. Premièrement, le groupe terroriste connu sous le nom d’EIIL doit être affaibli puis détruit.
Ce groupe a terrorisé tous ceux qu’ils ont rencontrés en Irak et en Syrie. Mères, sœurs, filles ont subi le viol comme arme de guerre. Des enfants innocents ont été abattus. Des cadavres ont été entassés dans des fosses communes. Des minorités religieuses ont subi une famine meurtrière. Dans un des crimes les plus horribles à imaginer, des êtres humains innocents ont été décapités et des vidéos de ces atrocités ont été diffusées pour choquer la conscience du monde.
Aucun Dieu n’absout cette terreur. Aucune revendication ne justifie ces actions. Il ne peut y avoir aucun échange raisonnable, aucune négociation avec cette expression du mal. Le seul langage compris par des tueurs comme ceux-ci est le langage de la force. Aussi, les États-Unis d’Amérique travailleront avec une large coalition pour démanteler ce réseau de mort.
Dans cet effort, nous n’agissons pas seuls — nous n’avons pas non plus l’intention d’envoyer des troupes américaines occuper des terres étrangères. Nous soutiendrons plutôt les Irakiens et les Syriens qui combattent pour reconquérir leurs villages. Nous utiliserons notre puissance militaire dans une campagne de frappes aériennes pour faire reculer EIIL. Nous entraînerons et équiperons les forces combattant contre ces terroristes sur le terrain. Nous nous emploierons à couper leurs financements et à faire cesser l’afflux de combattants depuis et vers la région. Et déjà plus de 40 nations ont proposé de se joindre à cette coalition.
Aujourd’hui, je demande au monde de se joindre à cet effort. Ceux qui ont rejoint l’EIIL doivent quitter le champ de bataille tant qu’ils le peuvent. Ceux qui continuent à combattre pour une cause haineuse se trouveront de plus en plus isolés. Car nous ne nous soumettrons pas aux menaces et nous démontrerons que l’avenir appartient à ceux qui construisent — et non à ceux qui détruisent. Voici donc un défi immédiat, le premier défi que nous devons relever.
Deuxièmement : il est temps pour le monde — tout particulièrement les communautés musulmanes — de rejeter explicitement, énergiquement et complètement l’idéologie des organisations comme Al-Qaïda et l’EIIL.
C’est une des tâches de toutes les grandes religions de faire coexister une foi fervente avec un monde multiculturel moderne. Aucun enfant ne naît plein de haine et aucun enfant — nulle part — ne devrait être élevé dans la haine d’autres gens. Il ne devrait plus y avoir de tolérance envers de soi-disant religieux qui appellent les gens à s’attaquer à des innocents parce qu’ils sont juifs, ou chrétiens, ou musulmans. Il est temps pour un nouveau pacte entre les peuples civilisés de ce monde pour éradiquer la guerre à sa source la plus fondamentale, qui est la corruption des jeunes esprits par une idéologie violente.
Cela signifie tarir le financement qui alimente cette haine. Il est temps de mettre fin à l’hypocrisie de ceux qui accumulent des richesses via l’économie mondiale et siphonnent ensuite des fonds vers ceux qui enseignent aux enfants à la démolir.
Cela signifie contester l’espace que les terroristes occupent, y compris Internet et les médias sociaux. Leur propagande a contraint des jeunes à voyager à l’étranger pour se battre avec leurs guerres et des étudiants — des jeunes pleins de potentiel — à se tourner vers des attentats-suicide. Nous devons offrir une vision alternative.
Cela signifie réconcilier les peuples de croyances différentes. Toutes les religions ont été attaquées par des extrémistes de l’intérieur à un moment donné et tous les gens de foi ont pour responsabilité de faire ressortir les valeurs au cœur de toutes les grandes religions : agissez envers votre voisin comme vous le feriez envers vous-même.
L’idéologie de l’EIIL, Al-Qaïda ou Boko Haram dépérira et mourra si elle est constamment exposée, confrontée et réfutée en pleine lumière. Voyez le nouveau Forum pour la Promotion de la Paix dans les Sociétés musulmanes — le cheikh bin Bayyah a décrit son but : « Nous devons déclarer la guerre à la guerre, afin que la paix s’ajoute à la paix ». Voyez les jeunes musulmans britanniques qui ont répondu à la propagande terroriste par la campagne “#NotInMyName” ( « Pas en mon nom »), déclarant que « l’EIIL se cache derrière un faux Islam ». Voyez les dirigeants chrétiens et musulmans qui se sont rassemblés en République centrafricaine pour rejeter la violence ; écoutez l’imam qui dit « la politique essaie de diviser le religieux dans notre pays, mais la religion ne devrait pas être une cause de haine, de guerre ou de conflits ».
Plus tard aujourd’hui, le Conseil de Sécurité adoptera une résolution qui souligne la responsabilité des États s’agissant de contrer l’extrémisme violent. Mais les résolutions doivent être suivies d’engagements tangibles, afin que nous soyons tenus pour responsables lorsque nous ne les respectons pas. L’année prochaine, nous devrions tous être prêts à annoncer les mesures concrètes que nous aurons entreprises afin de contrer les idéologies extrémistes dans nos propres pays — en chassant l’intolérance des écoles, en stoppant la radicalisation avant qu’elle ne se répande, et en promouvant des institutions et des programmes qui tissent de nouveaux liens pour une compréhension mutuelle.
Troisièmement, nous devons nous attaquer au cycle de conflit — en particulier de conflit sectaire — qui crée les conditions qui nourrissent le terrorisme.
Les guerres de religion n’ont rien de nouveau. La Chrétienté a enduré des siècles de cruel conflit sectaire. Aujourd’hui, c’est la violence parmi les communautés musulmanes qui est devenue la source de tant de misère humaine. Il est temps de reconnaître la destruction apportée par les guerres par procuration et les campagnes de terreur entre sunnites et chiites à travers tout le Moyen-Orient. Et il est temps pour les dirigeants politiques, civiques et militaires de rejeter les luttes sectaires. Soyons bien clairs : c’est un combat sans vainqueur. Une guerre civile brutale en Syrie a déjà tué près de 200 000 personnes, déplacé des millions d’autres. L’Irak est à nouveau dangereusement près de replonger dans l’abîme. Le conflit a créé un terreau fertile pour le recrutement de terroristes qui exporteront inévitablement cette violence.
La bonne nouvelle, c’est que nous avons également des signes que la marée pourrait s’inverser. Nous avons un nouveau gouvernement de coalition à Bagdad : un nouveau Premier ministre dont l’arrivée est saluée par ses voisins ; des factions libanaises qui rejettent ceux qui essaient de provoquer la guerre. Et ces progrès doivent être suivis d’une trêve plus vaste. Il n’y a nulle part où cela soit aussi nécessaire qu’en Syrie.
Ensemble avec nos partenaires, l’Amérique entraîne et équipe l’opposition syrienne pour être un contrepoids aux terroristes de l’EIIL et à la brutalité du régime Assad. Mais la seule solution durable à la guerre civile en Syrie est politique – une transition politique incluant toutes les parties et qui réponde aux aspirations légitimes de tous les citoyens syriens, quelle que soit leur appartenance ethnique, quelles que soient leurs croyances.
Les cyniques pourront arguer qu’un tel résultat n’arrivera jamais. Mais il n’y a pas d’autre chemin pour que cette folie cesse – que ce soit dans un an ou dans dix. Et cela conduit au fait que le temps est venu pour une négociation plus large dans la région, au cours de laquelle les principales puissances traiteront de leurs différends directement, honnêtement et de façon pacifique, l’une en face de l’autre autour d’une même table plutôt qu’au travers de groupes armés alliés. Je peux vous promettre que l’Amérique restera engagée dans la région et que nous sommes prêts à nous engager dans cet effort.
Mon quatrième et dernier point est simple : les pays du monde arabo-musulman doivent se concentrer sur le potentiel extraordinaire de leur population, spécialement les jeunes.
Et ici j’aimerais parler directement aux jeunes du monde musulman. Vous êtes les héritiers d’une grande tradition qui soutient l’éducation, pas l’ignorance, l’innovation, pas la destruction, l’existence digne, pas le meurtre. Ceux qui vous détournent de ce chemin trahissent cette tradition, au lieu de la défendre.
Vous avez démontré que lorsque les jeunes ont les outils pour réussir — de bonnes écoles, une éducation en mathématiques et en sciences, une économie qui favorise la créativité et l’esprit d’entreprise — alors les sociétés seront florissantes. Aussi l’Amérique sera-t-elle partenaire de ceux qui promeuvent cette vision.
Là où les femmes participent pleinement à la politique et à l’économie du pays, les sociétés sont les plus à même de réussir. Et c’est pourquoi nous soutenons la participation des femmes aux parlements et aux processus de paix, aux écoles et à l’économie.
Lorsque la jeunesse vit dans des endroits où la seule alternative est entre la dictature d’un État et l’attrait de mouvances extrémistes, alors aucune stratégie ne peut réussir contre le terrorisme. Mais là où une véritable société civile a la possibilité de fleurir – où l’on peut exprimer son point de vue et se mobiliser de manière paisible pour une vie meilleure – alors on accroît nettement le champ des alternatives à la terreur.
Et un tel changement positif ne se fait pas nécessairement aux dépens de la tradition et de la foi. On le voit en Irak, où un jeune homme a lancé une bibliothèque pour ses pairs. « Nous relions l’héritage de l’Irak à leurs cœurs », a-t-il dit, et « leur donnons une raison de rester ». Nous le voyons en Tunisie, où les partis laïques et islamistes ont travaillé ensemble dans le cadre d’un processus politique destiné à produire une nouvelle constitution. Nous le voyons au Sénégal, où une société civile prospère à côté d’un gouvernement démocratique fort. Nous le voyons en Malaisie, où l’entrepreneuriat vibrant est en train de propulser une ancienne colonie dans les rangs des économies les plus avancées. Et nous le voyons en Indonésie où ce qui a commencé par une violente transition a évolué en une véritable démocratie.
En dernier lieu, rejeter le sectarisme et l’extrémisme est une tâche générationnelle – et qui incombe aux populations du Moyen-Orient elles-mêmes. Aucun pouvoir extérieur ne peut parvenir à les faire changer. Mais l’Amérique sera un partenaire constructif et respectueux. Nous ne tolérerons jamais qu’il existe des lieux de refuge pour les terroristes ni n’agirons comme une armée d’occupation. Nous prendrons des mesures pour contrer les menaces envers notre sécurité et nos alliés, en mettant en place un dispositif de coopération antiterroriste. Nous augmenterons nos soutiens à ceux qui s’opposent aux idéologies extrémistes et qui cherchent à résoudre les conflits sectaires. Nous augmenterons aussi nos programmes de soutien aux entrepreneurs et à la société civile, l’éducation et la jeunesse – puisqu’en dernière analyse il s’agit là des meilleurs antidotes contre la violence.
Nous reconnaissons également qu’une gouvernance sera nécessaire pour traiter le conflit entre Palestiniens et Israéliens. Aussi morne que le paysage apparaisse, l’Amérique n’abandonnera pas la recherche de la paix. Comprenez : la situation en Irak et en Syrie et en Libye devrait guérir chacun de l’illusion que le conflit israélo-arabe est la principale source de problèmes de la région. Depuis trop longtemps, cette excuse a été utilisée pour distraire les peuples de leurs problèmes internes. La violence qui engloutit la région aujourd’hui a fait abandonner par trop d’Israéliens le dur travail vers la paix. Et c’est quelque chose à quoi il vaut vraiment la peine de réfléchir au sein d’Israël.
Car que cela soit clair : le statu quo en Cisjordanie et à Gaza n’est pas tenable. Nous ne pouvons nous permettre de nous détourner de cet effort – pas lorsque des missiles sont tirés sur des Israéliens innocents ou quand les vies de si nombreux enfants palestiniens nous sont retirées à Gaza. Aussi longtemps que je serai Président, nous défendrons le principe qu’Israéliens, Palestiniens, toute la région et le monde seront plus justes et plus sûrs avec deux États vivant côte à côte, dans la paix et la sécurité.
C’est ce à quoi l’Amérique est prête : agir immédiatement contre les menaces tout en visant un monde dans lequel la nécessité de telles actions se fera moins ressentir. Les États-Unis ne reculeront jamais dans la défense de leurs intérêts, mais ils ne reculeront pas non plus par rapport à la promesse de l’ONU et de la Déclaration universelle des Droits de l’homme – cette notion que la paix n’est pas simplement l’absence de guerre, mais la présence d’une vie meilleure.
Je suis conscient que les critiques de l’Amérique s’empresseront de souligner que nous aussi avons parfois échoué à incarner cet idéal ; que l’Amérique a beaucoup de problèmes au sein de ses propres frontières. Tout cela est vrai. Cet été, marqué par l’instabilité au Moyen-Orient et en Europe de l’Est, je sais que le monde a aussi remarqué la petite ville de Ferguson, Missouri – où un jeune homme a été tué et où une communauté a été divisée. Donc oui, nous avons nos propres tensions ethniques et raciales. Et comme tout pays, nous luttons continuellement pour concilier les énormes changements introduits par la mondialisation et une plus grande diversité avec les traditions qui nous sont chères.
Mais nous souhaitons que le monde nous observe – car ce que vous voyez en l’Amérique, c’est un pays qui a travaillé petit à petit à traiter ses problèmes, à rendre son union plus parfaite, à combler les clivages qui existaient à la fondation de cette nation. L’Amérique est différente de ce qu’elle était il y a 100 ans, ou 50 ans, ou même une décennie. Parce que nous combattons pour nos idéaux et que nous sommes prêts à nous critiquer nous-mêmes quand nous échouons. Parce que nous traitons nos différences dans l’espace ouvert de la démocratie – dans le respect de la règle du droit ; en faisant une place pour les personnes de toutes les races et toutes les religions ; et avec une croyance inflexible dans la capacité des individus hommes et femmes à changer leurs communautés et leurs conditions et leurs pays pour le meilleur.
Après bientôt six années comme Président, je crois que cette promesse peut éclairer le monde. Parce que j’ai vu des changements positifs sur la durée – pour la paix et la liberté, les perspectives d’avenir et la fin du sectarisme – dans les yeux des jeunes que j’ai rencontrés à travers le monde.
Ils me rappellent que, qui que vous soyez, d’où que vous veniez, quelle que soit votre silhouette, ou le Dieu que vous priez, ou encore qui vous aimez, il y a quelque chose de fondamental que nous pouvons partager. Eleanor Roosevelt (une grande figure pour les Nations Unies et le rôle de l’Amérique à l’ONU) se demandait : « Où commencent les Droits de l’homme ? Près de chez vous, répondit-elle, des endroits si proches et si petits qu’ils ne peuvent être vus sur aucune carte du monde. Et pourtant, ils représentent le monde à l’échelle d’un individu : le quartier où il vit habituellement ; l’école ou l’université qu’il fréquente ; l’usine, la ferme ou le bureau où il travaille ».
À travers le monde, la jeunesse a soif d’un monde meilleur. À travers le monde, par endroits, la haine, le fanatisme, et le sectarisme triomphent. Et ces jeunes apprennent à se respecter mutuellement, en dépit de leurs différences.
Le monde entier nous regarde maintenant, ici, attend de nous la même dignité, la même décence et le même courage que celui dont ils font preuve dans leur vie quotidienne. À cette croisée des chemins, je peux vous promettre que les États-Unis d’Amérique ne seront pas distraits ni dissuadés de faire ce qu’il y a à faire. Nous sommes les héritiers d’une fière tradition de liberté et sommes prêts à faire tout ce qui conviendra pour assurer cet héritage pour les générations futures. Je vous demande de nous rejoindre dans cette mission commune, pour les enfants d’aujourd’hui et ceux de demain.
Merci beaucoup (Applaudissements)
Source : Maison-Blanche, 24/09/2014
Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.