mercredi 24 décembre 2014

L’Estonie, un État policier au sein de l’Union européenne (The French Saker)

Alors qu’il était à Tallinn, en Estonie, le 15 décembre dernier en vue de participer à un débat international ayant pour thème « La Russie est-elle vraiment l’ennemie de l’Europe ? », Giulietto Chiesa a été arrêté à sa chambre d’hôtel et emprisonné. Ce qui pourrait passer pour un simple fait divers revêt néanmoins une signification symbolique et révélatrice de l’état d’esprit d’une certaine Europe pour peu que l’on s’intéresse au parcours et à l’engagement de cet homme.
Giulietto Chiesa
Giulietto Chiesa
Né en 1940 dans le Piémont, Giuletto Chiesa est connu comme homme politique, en tant que député élu en 2004 au Parlement européen ce qui lui valu l’occasion d’être membre du groupe d’amitié parlementaire Union européenne-Russie. Il participa également en qualité de vice-président à la Commission pour le commerce international,  et fût notamment membre de la sous-commission pour la sécurité et la défense, de la délégation à la Commission de coopération parlementaire Union européenne (UE)–Russie, ainsi que de la délégation à la commission de coopération parlementaire UE-Kazakhstan, UE-Kirghizistan et UE-Ouzbékistan et pour les relations avec le Tadjikistan, le Turkménistan et la Mongolie. Connaissant bien la langue russe, il s’est lié à Mikhaïl Gorbatchev et a fondé avec lui le World Political Forum. Il est également membre du Valdai International Discussion Club [1].
En sa qualité de journaliste et d’écrivain, il forma un groupe de réflexion, dont le fruit des investigations menées à propos des attentats du 11 septembre 2001 lui permit de mettre en doute le résultat des enquêtes officielles des autorités américaines, ce qui se retrouve résumé dans son livret de 48 pages édité en 2004 aux éditions Timéli avec pour titre Guerre et Mensonge – Terrorisme d’Etat américain… tout un programme.
Plus récemment, Giuletto Chiesa se distingua par ses prises de position virulentes à propos du putsch de la place Maïdan, pointant du doigt que cette énième révolution de couleur permit aux élites mondialistes d’introniser des néo-fascistes, créant de fait un rempart avec le grand frère voisin de Russie mais aussi cette guerre civile innommable [2].
Ce bref rappel permet de mieux appréhender l’expérience tragique que connu cet homme à l’occasion de son arrivée en Estonie, quand quatre policiers se présentèrent à sa chambre d’hôtel précisément au moment où l’intéressé s’apprêtait à prendre part à un débat car en effet, les pays baltes ne cachent pas leur soutien inconditionnel aux nouvelles autorités de Kiev, accueillant avec emphase les hordes guerrières de l’Otan et affichant leur hostilité, pour ne pas dire, leur haine de la Russie.
Giulietto Chiesa a fait l’objet d’un décret d’expulsion signé le 13 décembre 2014 et valable un mois, que les policiers n’ont pu lui présenter lorsque celui-ci demanda le motif et le justificatif de son arrestation.
Il avoue avoir : « été arrêté et mis en prison dans une cellule normale avec les toilettes par terre, un banc pour s’asseoir, sans drap ni coussin, une cellule en forme de couloir sans fenêtre et la lumière allumée en permanence » [3].
Il y resta quatre heures. Après quoi il reçut la visite de l’ambassadeur d’Italie, avec lequel il s’entretint deux heures et demie durant. Il a ensuite été libéré et a pu rejoindre sa chambre d’hôtel.
L’information relayée par l’AFP [4] nous renseigne quant au motif de l’arrestation :
« Les actions et les opinions exprimées par Giulietto Chiesa donnent des raisons de croire qu’il soutient les activités d’influence de la Russie » et qu’il « pourrait constituer une menace pour la sécurité et l’ordre public estoniens ». L’homme politique et journaliste italien se voit également reproché le fait d’avoir « à plusieurs occasions exprimé son hostilité à l’égard de l’Estonie ».
Cet État membre de l’Union européenne semble, de façon fâcheuse, oublier le fait que des droits fondamentaux sont garantis aux citoyens européens, notamment la libre circulation des personnes et le droit d’exprimer ses opinions. En d’autres termes, la décision d’arrestation et d’expulsion est entachée d’arbitraire, faute de pouvoir exhiber un motif légalement admis dans un État de droit et une démocratie qui se respectent. Ce n’est pas un secret pour personne que les pays baltes avec la Pologne sont les tenants d’une position délibérément anti-russe, source de dissension au sein de l’Union européenne, et cause notable de l’impossibilité de conserver des relations respectueuses avec la Russie, ce grand voisin européen.
Il sera intéressant d’examiner l’éventuel écho que recevra ce tragique événement au sein des instances européennes… 
Plus fondamentalement, à l’heure où l’Europe organise des cérémonies du souvenir de la Grande Guerre, ne serait-il pas honteux, par rapport à la mémoire de tous ceux qui ont donné leur vie pour la liberté et la souveraineté de leur nation, de passer sous silence les agissements de ce qu’il convient d’appeler un État policier qui ne peut souffrir l’opinion d’une personnalité se démarquant du politiquement correct ?
Je vous laisse le soin de formuler les interrogations qu’il conviendra.
Pauvre Europe : je suis triste et ne peut qu’espérer, en cette vigile de Noël, que luira prochainement cette étoile annonciatrice d’un monde nouveau, purifié.
Joyeux Noël à tous et à toutes !
L+40 (et toute l’équipe du Saker francophone)
Notes
[1] Informations issues du site Wikipedia