jeudi 25 décembre 2014

Taubira réforme en catimini et par ordonnance le code civil (wikistrike)


Publié par wikistrike.com sur 24 Décembre 2014

Taubira réforme en catimini et par ordonnance le code civil
Vieux de 210 ans, notre code civil s’apprête à vivre une réforme inédite bien contraire à son esprit. Ce vieux code Napoléon méritait certainement une remise à jour et, du reste, ce fut des décennies durant un de ces serpents de mer dont les politiques ont le secret. Il est toutefois déroutant (oserions-nous dire inquiétant ?) que ce que Jean Carbonnier appelait la « Constitution civile des Français » soit revue en catimini, par ordonnance, et sans aucun débat. La violence d’une telle procédure est aussi grande que si nous changions de Constitution par décret du Président de la république. Or cette refonte du texte fondateur du droit français risque bien de n’être qu’une émanation de la Chancellerie, et ce dans le plus absolu silence.
Nous sommes loin des années de débats mouvementés qui ont vu la promulgation par le premier Consul Bonaparte ce 30 ventôse an XII (31 mars 1804) de ce pilier de notre nation. Issu des milieux révolutionnaires, et donc bourgeois, ce texte est pourtant tissé des longues traditions coutumières locales, autant que du droit romain dont Portalis fut ici le porte-parole.
Taubira rené le honzecDès avant la révolution, une lente tentative d’uniformisation du droit français fut impulsée, par le truchement de la jurisprudence. Mais les rois de France, tout absolus qu’ils furent, n’avaient pas le pouvoir de changer les lois civiles, ce dont devait se réjouir Montesquieu, très hostile à l’idée de supprimer les droits coutumiers locaux pour une dangereuse uniformisation. C’est donc une sorte de synthèse de ces droits coutumiers et de certains aspects du droit romain qui servit de base à la rédaction de ce qui allait, après les nombreuses tentatives de Cambacérès, devenir notre code civil.
Toutefois, un texte de loi n’est jamais que le reflet d’une philosophie. Le droit romain, lié aux choses, est ainsi (dès le XVIème siècle) rendu plus subjectif. Coïncidant avec l’émergence d’une pensée et d’une spiritualité plus personnaliste, le droit s’est lui-même attaché à considérer non plus les choses, mais la personne comme sujet de l’action. Ce dont nous héritons aujourd’hui, du moins jusqu’à cette insidieuse remise en cause dans le projet actuel. De cette synthèse des coutumes et du droit romain, naît donc un esprit législatif original, très français, mais aussi très marqué par les Lumières et le triomphe d’une bourgeoisie des affaires. Point fondamental qu’on oublie souvent, le code Napoléon ne reconnaît plus la famille comme personne juridique et sanctionne sa disparition.
La réforme actuelle ne vise rien moins qu’à donner au droit français une toute autre philosophie que celle héritée d’une révolution bourgeoise, promulguée par un régime politique fort et nationaliste. Outre le fait que ce texte, mal ficelé, court le risque de plonger la jurisprudence et le droit français dans le désarroi pour les décennies à venir ; nonobstant le risque d’inflation législative ultérieure, en réduisant un document fondateur à une succession de cas ; indépendamment de sa tendance à faire du code civil un énième code de protection sociale, cette constitution du droit civil français consacre l’ingérence des juges dans le droit des contrats, ouvre 15 ans de chaos jurisprudentiel, réduit la force obligatoire des contrats et nous ferait passer « insidieusement du règne du droit au règne de l’expertise technocratique » pour reprendre le Pr Olivier Tournafond.
L’air de rien, Madame Taubira, par la toute-puissance des ordonnances, s’étant fait octroyer par le parlement un droit que Louis XIV lui-même n’avait pas, est en train de révolutionner le droit français, de restreindre les libertés privées et d’immiscer l’État et les juges dans les derniers espaces privés qui restaient à un peuple qui n’aura bientôt, si nous n’y prenons pas garde, plus qu’à s’en remettre à des juges qui auront toute liberté pour nous faire figurer sur leur mur des cons.