lundi 2 mars 2015

Renforcement du pouvoir citoyen et des droits sociaux, sanctions envers les États-Unis : le Venezuela répond à la tentative de coup d’État (Le grand soir)

Alors qu’en 1973 il restait des médias occidentaux pour s’émouvoir du coup d’État perpétré au Chili, ceux d’aujourd’hui scandent à l’unisson : “Président du Venezuela, laisse-toi te renverser ! C’est pour ton bien ! Renonce à défendre le choix des électeurs ! Renonce à la loi, à la Constitution. Si tu arrêtes un putschiste, nous dénoncerons la répression au Venezuela !”. Le bulldozer des news, déjà bien rodé pour créer le personnage Chavez, a été réactivé pour fabriquer le tyran Maduro qui agite au loin un poing brutal pour mieux écraser des foules fanatisées alors que la voix feutrée de l’opposition de droite ou du porte-parole de la Maison Blanche, de face, en plan proche, s’étonne de tant de violence.
Même lors du coup d’État manqué contre Chavez en 2002, jamais on n’avait observé une telle intensité dans le bombardement médiatique pour nous faire accepter la nécessité d’une intervention extérieure, ou d’un coup d’État, sans attendre les élections.
C’est sans doute l’erreur historique, et suicidaire, de la gauche européenne : ne pas avoir démocratisé la propriété des médias, avoir laissé le service public mimétiser “l’information” des grands groupes privés (1). Qu’arriverait-il au journaliste d’un grand média qui parlerait des 40.000 conseils communaux et de conseils du pouvoir citoyen qui apportent la matière grise de nombre de décisions gouvernementales au Venezuela ?
Et le Maduro réel ? Celui que n’isolent pas les téléobjectifs de l’AFP et de Reuters ?
Le jeudi 26 février, lors de la création du nouveau Conseil des personnes handicapées et des personnes âgées (2), il a approuvé les crédits pour octroyer 300 mille pensions de plus, ce qui élève les bénéficiaires de ce droit à trois millions de citoyen(ne)s. Il a confirmé l’octroi de 10.000 allocations de santé pour mieux protéger les personnes âgées. Il a félicité les employés de la nouvelle mission sociale “Foyers de la patrie” qui a visité en une fin de semaine 200 communautés populaires, soit 25 mille familles : “Cette méthodologie nous permet d’arriver directement jusqu’aux familles en évitant les mafias des intermédiaires”.
Avant d’entamer à travers le territoire un nouveau cycle de “gouvernement de rue” (3) Maduro a rappelé l’idée centrale de sa politique : malgré la guerre économique (4) et la chute des prix du pétrole, pas d’austérité mais l’approfondissement d’un État social et participatif. “Comme le dit le maire Rodriguez, on nous agresse parce que nous sommes un gouvernement des pauvres. Il n’y a que dans le socialisme que les ressources sont administrées en fonction de celui ou celle qui en a besoin”. Pendant cette assemblée un gros dossier arrive aux mains de Maduro. Anibal, affecté d’une incapacité de l’ouïe, un des porte-paroles du nouveau conseil national, prend la parole en langage de signes : “Nous sommes 120 porte-paroles venus des 24 états du pays, nous avons travaillé ensemble sur ces propositions”. “C’est pour cela que j’ai créé les conseils de gouvernement populaire, pour que le peuple prenne le pouvoir, pour qu’il assume le pouvoir politique, pour qu’il se convertisse en peuple président” lui répond Maduro. (5)
Le samedi 28 février lors d’une mobilisation populaire contre l’ingérence des États-Unis (photo), le président a poursuivi : “The Wall Street Journal a écrit récemment que l’heure est venue de m’appeler tyran, je réponds : je serais un tyran parce que je ne me laisse pas renverser ? Et si je me laisse renverser, je serais un démocrate ? Le peuple devrait permettre que s’installe un « gouvernement de transition », éliminant la Constitution ? Je ne le permettrai pas et s’il le fallait je me battrai dans la rue avec le peuple et nos forces armées. Nous voulons construire la paix, la stabilité la coexistence, la vie en commun. Que ferait le président Obama si un coup d’État était organisé contre son gouvernement ? Celui qui persiste dans ses activités terroristes, putschistes, celui qui agit hors de la Constitution, sera arrêté pour être jugé même si The Wall Street Journal ou le New York Times m’appellent le tyran, ce n‘est pas la tyrannie, non, c’est tout simplement la loi.”
Durant cette marche qui a parcouru les rues de Caracas, Maduro a signé un décret indemnisant 74 familles de victimes du “Caracazo” (6) : en 1989, après deux jours d’émeutes populaires qui suivirent l’application des mesures néo-libérales exigées par le FMI, le président social-démocrate Carlos Andrés Pérez avait suspendu les garanties constitutionnelles et avait envoyé l’armée “rétablir l’ordre”. En 72 heures, 2000 à 3000 personnes furent assassinées. Maduro a rappelé que cette même austérité de choc fait partie du programme que la droite vénézuélienne avait prévu d’appliquer en cas de succès du coup d’État le 12 février 2015 (7). Jusqu’à l’élection de Hugo Chavez, aucun gouvernement n’avait accepté de reconnaître les fosses communes, les disparitions, et les tortures. Les 74 indemnisations décrétées par Maduro s’ajoutent aux 596 accordées à d’autres familles par le gouvernement bolivarien.
Par ailleurs, le président a annoncé quatre mesures en réponse aux sanctions imposées par les États-Unis en violation du Droit international et dénoncées par l’ensemble des pays latino-américains (8), ainsi qu’aux 168 déclarations officielles émises par l’administration Obama contre le gouvernement bolivarien de 2014 à 2015 :
– L’entrée du territoire vénézuélien est interdite aux fonctionnaires étasuniens complices d’actes terroristes, de violations de droits de l’homme, de crimes de guerre. Parmi ceux-ci l’ex-président George W. Bush, l’ex-vice-président Dick Cheney ; l’ex-directeur de la CIA George Tenet, notamment liés au massacre de centaines de milliers d’irakiens sur la base du mensonge des “armes de destruction massive” et à la création de centres de torture – prisons secrètes en Europe, Abu Ghraib, Guantanamo, etc… « Interdit aussi d’accorder des visas aux citoyens américains qui ont violé les droits humains et ont bombardé des populations civiles « . La décision concerne aussi les congressistes d’extrême droite Bob Menendez, Marco Rubio, Ileana Ross-Lehtinen et Mario Diaz-Balart, proches du réseau terroriste du cubain Posada Carriles qui vit actuellement aux USA sous la protection des autorités.
– Adéquation du nombre de fonctionnaires de l’Ambassade des États-Unis à Caracas. Le gouvernement étasunien y maintient plus de 100 employés alors que seulement 17 fonctionnaires vénézuéliens sont autorisés à travailler à l’ambassade vénézuélienne à Washington. La chancelière Delcy Rodriguez a rappelé que cette faculté de demander l’équilibre du nombre échoit à tout gouvernement en vertu de la Convention de Vienne.
– Réciprocité en matière de visas : “Les citoyens vénézuéliens qui voyagent aux États-Unis doivent payer pour obtenir un visa. A présent, pour rétablir l’égalité de traitement, les étasuniens qui nous visitent, devront obtenir un visa et payer ce que paye un Vénézuélien qui voyage aux États-Unis”.
– “Finies, les réunions des fonctionnaires étasuniens pour conspirer sur notre territoire” : Les responsables de l’ambassade étasunienne à Caracas ont été informés que dorénavant « toute réunion réalisée par eux au Venezuela devra être notifiée et approuvée par le gouvernement du Venezuela » , conformément aux articles 41 et 41.2 de la Convention de Vienne. Maduro a révélé : « nous avons détecté et capturé certains étasuniens engagés dans des activités secrètes, notamment d’espionnage, essayant de recruter des gens dans les villages frontaliers avec la Colombie et sous influence paramilitaire. Dans l’État du Táchira nous avons capturé un pilote d’avion étasunien d’origine latino-américaine, avec toute sorte de documents. Il est en train de faire des révélations”.
En conclusion de son discours, Maduro a réaffirmé son respect pour le peuple étasunien ainsi que pour la communauté afro-américaine, hispanique et caraïbe souvent victimes des violations de droits de l’homme de la part de leur propre gouvernement, rappelant que ces mesures ne sont pas prises contre eux, mais contre l’élite qui persiste à s’ériger en policier mondial et à refuser de respecter le principe de souveraineté.
T.D., Caracas, 1er mars 2015
»» https://venezuelainfos.wordpress.com/2015/03/01/renforcement-du-pouvoi...