Que vaut une
banque ? Les investisseurs étrangers, avec seulement 5 milliards d’euros
obtiennent le contrôle des actions des 4 banques systémiques grecques.
Raffler les banques, ça existe ?
Anastase
ADONIS
La crise financière de 2009 a provoqué une série de crises bancaires, dans la
mesure où les banques et d’autres établissements financiers similaires ont créé
des bulles financières d’une valeur fictive ou hypothétique. Propagée dans
chaque continent et dans chaque pays de manière différente, mais il y a beaucoup
trop de similitudes pour qu’on puisse en faire abstraction, elle nous a laissé
apprécié les différents traitements qu’elle a reçus d’un pays à l’autre, d’une
autorité bancaire à une autre.
Nous sommes en Europe, sous la même autorité bancaire, qui se nomme ECB ou
Banque Centrale Européenne. La question que l’on peut légitimement se poser
c’est « que vaut une banque ? Quelle est sa valeur ? Il n’y a pas de réponse
miracle, mais juste une : sa vraie valeur. En théorie, car en pratique les
pratiques, ou plutôt les volontés de l’autorité suprême laisse entrevoir les
disparités.
La vraie valeur d’une banque est la valeur de son actif, peu importe si sa
valeur en bourse dégringole suite à un étouffement par fermeture de ses
liquidités ou par le contrôle des capitaux qu’on impose à ses clients. Plus
précisément, quelle est la valeur des 4 banques systémiques grecques, dont la
recapitalisation est décidée avec les règles que l’on connaît ? Plus de 260
milliards, si on croit aux chiffres d’Eurostat ou de ces mêmes banques. Comment
donc, peut-on autoriser une recapitalisation où seulement avec 5 milliards on
prend le contrôle des quatre banques systémiques grecques ?
La recapitalisation décidée avec le « 3e plan d’aide » de la Grèce, prévoyait
la recapitalisation des banques à hauteur de 25 milliards d’Euro, somme estimée
qui était à raffiner sur la base des « stress tests » bancaires du mois dernier.
Cet ajustement a montré que le besoin en recapitalisation des banques grecques
est de 14,4 milliards, qui finalement, par une décision, seulement 10 seront
versés par les créanciers, dans le cadre du « 3e plan d’aide », selon une
logique de « privatisation », c’est-à-dire que l’Etat doit céder le contrôle
bancaire qui doit progressivement passer entre les mains des actionnaires
privés, pour un « meilleur résultat économique ».
Les investisseurs étrangers, avec seulement 5 milliards d’euros obtiennent le
contrôle des actions des 4 banques systémiques grecques et avec ce contrôle le
patrimoine entier des banques dans lequel on trouvera tous leurs prêts et
hypothèques à travers lesquels on contrôle le patrimoine immobilier et tout
autre élément de patrimoine des entreprises et des ménages. Ces 5 milliards est
un montant très faible si on l’oppose à plus de 260 milliards qui est l’actif
réel détenu par les banques (hypothèques et autres droits à solder).
Le refinancement des dettes des ménages et des entreprises passe par cette
recapitalisation bancaire (troisième depuis le début de la crise financière), et
à travers ceci le contrôle s’étend à tout l’espace de développement économique
et social.
La participation de l’Etat au sein de ces quatre
banques systémiques tombe à des niveaux très faibles, et s’évaporent ainsi les
capitaux qu’il avait placés à la recapitalisation précédente. Il est
quasi-certain que l’Etat ne pourra jamais récupérer sa mise, aux dépens donc de
la population qui est le garant réel de cette opération. La décision de ne pas
séparer les bons et les mauvais prêts, comme cela a été fait ailleurs, et
obliger ainsi les banques de se « moraliser » en reconnaissant ce qu’est une
bonne conduite, est très critiquée. Pas de leçon donc tirée par les exemples
suédois, étasuniens ou récemment allemand (cas de HSH Nordbank) où la définition
d’une mauvaise banque qui pourrait concentrer les prêts rouges avec la
surveillance et des banques et de l’Etat, donnerait un autre vent dans
l’économie grecque. Cette méthode, refusée par les créanciers de la Grèce, ferme
la route à un certain type de croissance qui certes couperait net avec les
méthodes archaïques bancaires.
Aujourd’hui, 10 milliards
supplémentaires à la charge des citoyens grecs, loin d’être suffisants, viennent
remettre en route pour un certain temps le système bancaire grec. Mais pour
combien de temps ? L’Etat doit en théorie récupérer ses 25 milliards, versés en
2013, pour les réinjecter dans l’économie sociale grecque, mais, en considérant
les décisions prises sur la continuation du statu quo bancaire, ses chances sont
minces même à très long terme. Les nouvelles actions des banques ont été éditées
à des prix extrêmement faibles, ce qui compresse la valeur des anciennes actions
à un niveau dérisoire.
En 2013, le Trésor Public grec avait placé 25 milliards en détenant 80% des
banques. Ce montant a diminué avec la participation exclusive du PSI, à hauteur
de 8,3 Milliards, lors de la recapitalisation du 2014, et il en injecte
aujourd’hui encore 4,5 (1,1 en actions et 3,3 en obligations convertibles).
Cette décision, prise sous le prétexte que la privatisation des banques
motiverait la participation des investisseurs, laisse perplexe dans la mesure où
des dispositions ne sont pas prises pour protéger les intérêts de la population,
car même si environ 100 Milliards de l’actif des banques sont de prêts
d’entreprise ou de consommation non honorés, ou prêts rouges comme ils sont
surnommés, néanmoins il y a un grand actif réel d’environ 160 Milliards qui
passe sous le contrôle du capital privé. Aussi, les prêts rouges, seront
cependant honorés à terme, soit par les expropriations et enchères, soit par les
renégociations si on se fie aux décisions parlementaires grecques, qui
conformément aux prérequis exigés par les créanciers de la Grèce ont adopté ces
mesures.
Encore une fois : nous sommes en Europe, sous la même autorité bancaire, qui
se nomme BCE ou Banque Centrale Européenne. La question que l’on peut
légitimement se poser c’est « que vaut une banque ? ». La réponse faite à
postériori, sur la base de notre compréhension, montre les pratiques qui
condamnent et proscrivent. Il nous appartient de l’adresser à cette autorité
suprême.
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