Alerté par un commentaire (merci Betty), je me suis finalement décidé à me pencher sur le projet de loi constitutionnel.
Le problème devient récurent : un évènement justifie une réponse législative, plus ou moins adaptée audit évènement, mais on se rend vite compte qu’elle va bien en fait plus loin.
J’ai en effet été échaudé par la loi de 2014 contre “l’apologie du terrorisme”, vendue contre la propagande de recrutement djihadiste sur Internet, et qui a fini par concerner des types saouls criant un “vive Kouachi” devant deux policiers, ou un adolescent diffusant un dessin humoristique un peu critique.
Alors quand j’ai vu que la loi s’appelait “Protection de la Nation“, j’ai immédiatement compris que ça n’allait pas sentir bon… Analyse.
I. Analyse du projet de loi constitutionnelle
EXPOSÉ DES MOTIFS
NB. C’est le texte introductif qui présente la loi.
Mesdames, Messieurs,
La France a été durement frappée par de lâches attentats. 130 personnes sont mortes. Des centaines sont blessées, parfois à jamais. Pour faire face au risque terroriste, le Président de la République a, sur la proposition du Premier ministre, immédiatement déclaré l’état d’urgence. Le Parlement l’a de manière quasi unanime prolongé pour trois mois.
Cette première réponse a été donnée dans le respect du cadre actuel de la Constitution du 4 octobre 1958. Celle-ci n’offre aujourd’hui que deux régimes particuliers pour le temps de crise.
D’une part, l’article 16 implique que « le fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels » soit « interrompu ». Le Président de la République prend alors les mesures exigées par ces circonstances afin d’assurer aux pouvoirs publics constitutionnels, dans les moindres délais, les moyens d’accomplir leur mission.
D’autre part, l’article 36 de la Constitution régit l’état de siège. Celui-ci est décrété en cas de péril imminent, résultant d’une guerre étrangère ou d’une insurrection à main armée. Dans ce cas, diverses compétences sont transférées de l’autorité civile à l’autorité militaire.
Aucun de ces deux régimes n’est, à l’évidence, adapté à la situation que la France affronte actuellement.
Eh bien oui, ce sont des cas exceptionnels de guerre ou quasi.Pour le reste, c’est-à-dire ce qu’on traverse (ou plutôt qu’on a traversé), il y a l’État d’urgence, qui est permis par la Constitution. Donc on voit mal où est le problème – et dire qu’il n’y a que 2 possibilités prévues par la Constitution est évidement un mensonge démenti par la réalité de la situation actuelle. Ca commence bien – et on parle ici d’une loi fondamentale de notre République.
Pour combattre efficacement le terrorisme, comme l’État se doit de le faire, l’ensemble des responsables politiques ont voulu que soit mis en œuvre et prorogé l’état d’urgence dans les conditions prévues par la loi du 20 novembre 2015, qui a actualisé, soixante ans après son adoption, la loi du 3 avril 1955. Toutefois, faute de fondement constitutionnel, cette actualisation est restée partielle. Un tel fondement est en effet nécessaire pour moderniser ce régime dans des conditions telles que les forces de police et de gendarmerie puissent mettre en œuvre, sous le contrôle du juge, les moyens propres à lutter contre les menaces de radicalisation violente et de terrorisme. Le nouvel article 36-1 de la Constitution relatif à l’état d’urgence, qui est l’objet du premier article du présent projet de loi constitutionnelle, fournit le cadre de ce régime juridique.
Bref, comme les principes des droits de l’Homme prévus dans la Constitution risquent de s’opposer à ce que veut faire le gouvernement, on le met dans la Constitution, donc il n’y a plus de “problème”…
D’une part il fixe les conditions d’engagement de ce régime civil de crise. L’inscription dans la Constitution de ces conditions donne la garantie la plus haute que, sous le choc de circonstances, la loi ordinaire ne pourra pas étendre les conditions d’ouverture de l’état d’urgence. Ce régime ne peut, en effet, que rester exceptionnel.
Heu, donc l’urgence c’est de bien définir les conditions d’ouverture de l’État d’urgence, qu’on a ouvert en novembre ?
La démocratie ne combat pas ceux qui nient ses valeurs en y renonçant.
Il vaut mieux lire ça qu’être aveugle…
En gravant dans le marbre de la Constitution les conditions de déclenchement de l’état d’urgence, le présent projet de loi constitutionnelle ne propose pas de les élargir et reprend simplement les termes de l’article 1er de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955.
Ah.Donc du coup le législateur ne pourra modifier dans la loi de 1955 les conditions d’ouverture de l’État d’urgence, qui auront été très précisément définies. Ok.Bon, après il ne lui restera qu’à voter une loi définissant l’État de Gravité, comme il l’a fait en 1955…Très utile, et urgent, donc.
Son déclenchement reste le fait d’un décret en conseil des ministres « soit en cas de péril imminent résultant d’atteintes graves à l’ordre public, soit en cas d’événements présentant, par leur nature et leur gravité, le caractère de calamité publique ».
Euh, c’est donc ça la définition aux petits oignons du déclenchement de l’État d’Urgence ???Mais on y met tout et n’importe quoi dans les “atteintes graves à l’ordre public” !!!!
D’autre part, le nouvel article 36-1 précise le double rôle du Parlement. Celui-ci est seul compétent pour proroger l’état d’urgence. En outre, il lui revient de voter la loi comprenant les outils renouvelés qui peuvent être mis en œuvre durant l’application de l’état d’urgence.
Cette constitutionnalisation de l’état d’urgence est nécessaire pour compléter les moyens d’action des forces de sécurité sous le contrôle du juge.
C’est quand même incroyable d’écrire des choses pareilles…
Certes, dans le prolongement de la décision du Conseil constitutionnel n° 85-187 DC du 25 janvier 1985, le Conseil d’État a jugé qu’il n’y a d’incompatibilité de principe ni entre la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 et la Constitution (CE, 21 nov. 2005, n° 287217), ni entre cette loi et les stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, notamment son article 15 (CE Ass., 24 mars 2006, n°s 286834 et 278218).
Incroyable. Donc le gouvernement écrit noir sur blanc que la révision constitutionnelle est indispensable par rapport à la loi de 1955 sur l’État d’urgence, puis rappelle qu’il a été jugé que rien n’est inconstitutionnel dans la loi de 1955 ! Mais le meilleur arrive…
Mais les mesures que cette loi, même modifiée, permet de prendre pour faire face à des circonstances exceptionnelles sont limitées par l’absence de fondement constitutionnel de l’état d’urgence. Le nouvel article 36-1 de la Constitution donne ainsi une base constitutionnelle à des mesures qui pourront, si le Parlement le décide, être introduites dans la loi n° 55-385 du 3 avril 1955.
(J’avoue, ça va surtout choquer les juristes) Résumons :
- on a une loi sur l’état d’urgence
- elle est constitutionnelle
- MAIS il faut modifier la Constitution pour que le législateur ne puisse pas modifier à l’avenir les conditions de proclamation
- sauf que les conditions actuelles sont très vagues et donc extrêmement larges
et là, le gouvernement indique que :
- le souci avec la loi actuelle est qu’elle n’a pas de fondement constitutionnel, donc ça limite ce que peut faire le gouvernement (sic.) – alors que la loi (ancienne version) a été jugée constitutionnelle . On rappelle que la loi a été modifiée en novembre, mais Valls a osé demander au Sénat de ne pas saisir le Conseil constitutionnel
- en fait, son projet est de modifier à l’avenir la loi de 1955, et pour cela, il a besoin que l’état d’urgence soit inscrit dans la Constitution !
Voilà donc la liste de courses :
Les mesures administratives susceptibles d’accroître l’efficacité du dispositif mis en place pour faire face au péril et aux évènements ayant conduit à l’état d’urgence sont variées :
– contrôle d’identité sans nécessité de justifier de circonstances particulières établissant le risque d’atteinte à l’ordre public comme l’exige en temps normal le Conseil constitutionnel (n° 93-323 DC du 5 août 1993) et, le cas échéant, visite des véhicules, avec ouverture des coffres ;
– retenue administrative, sans autorisation préalable, de la personne présente dans le domicile ou le lieu faisant l’objet d’une perquisition administrative ;
– saisie administrative d’objets et d’ordinateurs durant les perquisitions administratives, alors que la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 n’a prévu, outre la saisie d’armes, que l’accès aux systèmes informatiques et leur copie.
Génial, bel hommage aux “Valeurs de la République” et aux législateurs de 1789 ! Et le tout lors de perquisitions décidées par l’administration, sans aucun accord d’un juge.En fait, le Conseil d’État a venu la mèche dans son avis du 11 décembre pour ce projet (dont je recommande la lecture pour ceux que cela intéresse) : ”la modification envisagée n’est pas de simple clarification et présente, à deux titres, un effet utile [...] En premier lieu, elle donne un fondement incontestable aux mesures de police administrative prises par les autorités civiles pendant l’état d’urgence“. Et oui : comme c’est dans la constitution ce n’est plus inconstitutionnel, CQFD !
Les mesures prises sur le fondement du nouvel article 36-1 de la Constitution seront placées sous le contrôle du juge administratif sauf à relever du domaine réservé au juge judiciaire par l’article 66 de la Constitution. Ainsi, le législateur pourra prévoir des mesures restrictives de liberté (escorte jusqu’au lieu d’assignation à résidence, retenue au début de la perquisition…) ou des mesures conciliant l’article 36-1 avec la liberté d’aller et venir (assignation à résidence…). Ces mesures non privatives de liberté, qui ont pour objet de prévenir les atteintes à la sécurité et à l’ordre publics, n’ont pas à être placées sous le contrôle de l’autorité judiciaire. Elles seront placées sous le plein contrôle du juge administratif.
Ah, l’assignation à résidence n’est donc pas une mesure privative de liberté, tout va bien alors (hommage à Orwell j’imagine). Et puis comme il n’y a plus de place libre en prison, c’est quand même plus simple.En tous cas, si vous avez aimé Minority report, vous aimerez Hollande…
En second lieu, l’article 36-1 organise la fin de l’état d’urgence. Il prévoit, comme le faisait l’article 3 de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955, que la prorogation de l’état d’urgence au-delà de douze jours ne peut être faite que par la loi qui devra en fixer la durée, de sorte que si les conditions de fond de l’état d’urgence sont toujours remplies, une nouvelle prorogation par la loi sera immédiatement possible. Il reviendra au Parlement d’en décider au cas par cas.
Et on a apprécié sa capacité à décider avec tact et mesure en novembre…Qu’est ce qui justifie d’ailleurs qu’on soit encore sous État d’urgence là ? On a des preuves qu’on autre attentat soit imminent ? Parce que sinon, si c’est juste le risque, dans 40 ans, il existera toujours… Et en quoi le fait qu’un juge contrôle les perquisitions limite-t-il l’efficacité de la lutte anti-terroriste ? Qu’est ce que font le sforces d epolice en cetet find écembre qu’ils ne pourraient pas faire sans État d’Urgence ? On peut avoir des explications svp ?Ou alors c’est le fabuleux bilan des perquisitions administratives ?2 enquêtes préliminaires pour 2 700 perquisitions, c’est vraiment impressionnant d’efficacité…
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L’article 2 du projet de loi constitutionnelle poursuit la même finalité que l’article 1er de protéger la Nation. Il insère, à l’article 34 de la Constitution, une disposition permettant de déchoir de la nationalité française une personne qui, née française et ayant également une autre nationalité, aura été condamnée pour un crime constituant une atteinte grave à la vie de la Nation.
À ce stade là, on peut parler de loi scélérate.Au passage, on se demandera ce que signifie “avoir une autre nationalité”, et comment le savoir.Si vous êtes né sans la nationalité française, cela ne pose pas trop de problème.Mais sinon ? Cela ne signifie pas seulement avoir 2 passeports. Quand vous avez 2 parents de 2 nationalités différentes, vous êtes souvent binational.Mais que faire alors à propos des grands-parents étrangers, des arrières grands-parents étrangers, par le droit du sang ?J’avais une grand-mère italienne. Je ne me suis jamais occupé de l’Italie. Mon père non plus, mais il était binational du coup ou pas ? Et moi, peut-on me reconnaitre binational ou pas ? Je n’en sais rien… Merci M .Valls, j’avoue que je ne m’étais jamais posé la question…Sympa ces questions.Le problème c’est que, en remontant un peu, on risque d’avoir le moitié des citoyens binationaux du coup… Un exemple : le Maroc. Très drôle : il interdit à un citoyen de renoncer à sa nationalité marocaine, et il reconnait que tous les descendants sont marocains. Vous voyez ce qui se passe au bout de 4 ou 5 générations, du coup ?On va refaire un fichier arbre généalogique des nationalités d’ascendance, et de leurs règles de transmission de nationalité ?Vichy a un peu patiné sur le sujet, mais ils n’avaient pas l’informatique… Le progrès ?Bref, quand vous quittez la sphère des personnes ayant volontairement acquis la nationalité (et dont la déchéance est déjà hautement discutable), pour intégrer les personnes nées françaises, vous mettez le doigt dans un mécanisme qui va vous broyer le bras, en titillant la population sur le coeur du vivre en société : la nationalité…Mais le meilleur arrive…
Le 1° de l’article 25 du code civil réserve actuellement cette sanction aux personnes qui, ayant également une autre nationalité, ont obtenu la qualité de Français par acquisition. Prévoir une sanction identique à l’encontre d’un binational né Français impose de modifier la Constitution ce qui va permettre de rapprocher les règles ainsi applicables à toutes ces personnes.
En premier lieu, les lois républicaines ont constamment réservé la sanction qu’est la déchéance de nationalité au cas d’un binational devenu français. Il en d’abord été ainsi avec la loi du 7 avril 1915 puis avec la loi du 10 août 1927 ainsi qu’avec le décret-loi du 12 novembre 1938. Pour des personnes nées françaises, les lois républicaines n’ont jamais retenu la possibilité d’une déchéance de nationalité mais seulement d’une perte de nationalité alors que cette perte résulte normalement d’un acte volontaire ou d’une situation de fait et non d’une sanction. Ainsi toutes les caractéristiques dégagées par le Conseil constitutionnel dans sa jurisprudence sont réunies pour qu’il existe un principe fondamental reconnu par les lois de la République relatif à l’absence de possibilité de déchéance de nationalité pour une personne née française même si elle possède une autre nationalité.
Ca, on l’encadre… Et on le relit :Jusqu’à Hollande, les principes républicains élémentaires interdisaient donc de déchoir une personne née française de sa nationalité… Et c’est le gouvernement qui le dit…
En deuxième lieu, dans sa décision n° 2015-439 QPC du 23 janvier 2015, le Conseil constitutionnel a écarté le grief tiré de l’atteinte à une situation légalement acquise : « en fixant les conditions dans lesquelles l’acquisition de la nationalité peut être remise en cause, les dispositions contestées ne portent pas atteinte à une situation légalement acquise ». Ce raisonnement n’apparaît pas transposable pour la déchéance de la nationalité d’origine qui constitue une atteinte à une situation légalement acquise. La nationalité française attribuée dès la naissance confère en effet à son titulaire des droits fondamentaux dont la privation par le législateur ordinaire pourrait être regardée comme une atteinte excédant ce qu’autorise la Constitution.
BisPensée pour les analystes qui expliquent qu’il n’y a pas de souci de fond avec cette mesure, que le Conseil constitutionnel n’y trouverait rien à redire…Le Conseil d’État a indiqué dans son avis du 11 décembre : “Le Conseil d’État considère que si devait être instituée la déchéance de la nationalité française pour des binationaux condamnés pour des faits de terrorisme, le principe de cette mesure devrait être inscrit dans la Constitution, eu égard au risque d’inconstitutionnalité qui pèserait sur une loi ordinaire. [...] Cette mesure pourrait se heurter à un éventuel principe fondamental reconnu par les lois de la République interdisant de priver les Français de naissance de leur nationalité. Il est vrai qu’à supposer que les conditions de reconnaissance d’un tel principe soient réunies, cette circonstance ne suffirait pas nécessairement à le reconnaître. Surtout, la nationalité française représente dès la naissance un élément constitutif de la personne. Elle confère à son titulaire des droits fondamentaux dont la privation par le législateur ordinaire pourrait être regardée comme une atteinte excessive et disproportionnée à ces droits, qui, par suite, serait inconstitutionnelle. La mesure envisagée par le Gouvernement poserait, en particulier, la question de sa conformité au principe de la garantie des droits proclamé par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen. [...] Enfin, la Cour européenne des droits de l’homme pourrait juger que, dans certains cas, la déchéance de la nationalité française ou l’expulsion de la personne ainsi sanctionnée porte une atteinte excessive à sa vie privée ou familiale ou qu’elle expose cette personne à subir des traitements inhumains ou dégradants dans l’Etat dont elle aurait conservé la nationalité.”
Sanctionner pour certains de ses actes une personne née française en prévoyant la possibilité de la déchoir de notre nationalité impose ainsi de modifier notre Constitution. Comment pourrait-il d’ailleurs en être autrement alors que la nationalité est, pour une personne née française, un attribut essentiel ? Mais il s’agit pour la communauté nationale de pouvoir décider de sanctionner ceux qui par leurs comportements visent à détruire le lien social. Il en va fondamentalement ainsi pour ceux qui commettent des actes de terrorisme et frappent aveuglément des victimes innocentes, en niant le respect dû à la vie humaine et les valeurs qui sont le fondement de notre Nation. Comme l’a relevé le Conseil d’État dans son avis du 11 décembre 2015, ceci « répond à un objectif légitime consistant à sanctionner les auteurs d’infractions si graves qu’ils ne méritent plus d’appartenir à la communauté nationale ».
L’élargissement des cas de déchéance de nationalité française contribuera en outre à renforcer la protection de la société française, en permettant notamment de procéder à l’éloignement durable du territoire de la République, par la voie de l’expulsion, des personnes dont le caractère dangereux est avéré par la condamnation définitive dont elles ont fait l’objet et à interdire leur retour sur le territoire.
- Mais on va les expulser où ?
- Le pays d’accueil va il accepter des terroristes ?
- Que va-t-il leur arriver ?
- En retour, on acceptera donc les terroristes binationaux qui auront été déchus de leur seconde nationalité pour un attentat commis à l’étranger ?
En permettant de déchoir de leur nationalité française certaines personnes nées françaises, la nouvelle disposition constitutionnelle est sans incidence sur les dispositions du code civil actuellement applicables en matière de de déchéance de nationalité française, qui s’appliquent aux personnes ayant acquis la qualité de Français en cas de condamnation pour crime ou délit en matière de terrorisme ou d’atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation.
En revanche, seules les infractions criminelles les plus graves peuvent justifier une sanction telle que la déchéance de nationalité prononcée à l’encontre de Français de naissance. L’article 2 limite ainsi le champ d’application de cette sanction aux crimes constituant une atteinte grave à la vie de la Nation. Il appartiendra au législateur, comme l’indique l’insertion de la nouvelle disposition à l’article 34 de la Constitution, de préciser quelles sont les infractions qui répondent à cette qualification, étant entendu qu’il ne pourrait s’agir que de crimes en matière de terrorisme et, éventuellement, des crimes les plus graves en matière d’atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation.
Le Conseil d’État a aussi précisé dans son avis du 11 décembre :“le Conseil d’Etat considère qu’il convient de limiter le champ des infractions susceptibles de justifier la déchéance de la nationalité. Le projet prévoit la possibilité de sanctionner toute personne ayant commis un crime ou un délit constituant un acte de terrorisme ou une atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation. Les infractions en question sont définies aux articles 410-1 à 421-1 du code pénal. Or, la plupart de ces infractions, notamment celles qui ne sont pas de nature criminelle, ne sauraient justifier une sanction aussi grave que la déchéance, laquelle pourrait être regardée comme étant disproportionnée. En conséquence, le Conseil d’Etat estime que la mesure envisagée ne devrait concerner que les seuls auteurs d’actes criminels les plus graves et non les auteurs de délits.Il estime par ailleurs, qu’il ne serait pas opportun d’introduire le terme « terrorisme » dans la Constitution et qu’il est par conséquent préférable de prévoir que la déchéance pourrait être infligée aux seules personnes « condamnées pour un crime constituant une atteinte grave à la vie de la Nation ». Il appartiendrait au législateur de préciser quelles sont les infractions qui entrent dans ce champ, étant entendu qu’il ne pourrait s’agir que de crimes en matière de terrorisme et, éventuellement, des crimes les plus graves en matière d’atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation.”Voici ce que prévoient les articles 410 à 421 :Il s’agit de trahison, complots, attentats, etc.Mais on notera qu’ils définissent les “atteintes aux intérêts fondamentaux de la Nation” et non pas “les atteintes graves à la vie de la Nation”, ce n’est pas une relation explicite. C’est le législateur qui précisera…
La notion de personnes « nées françaises », pour l’application de la sanction de la déchéance de nationalité prévue par les nouvelles dispositions constitutionnelles, inclut tant les personnes auxquelles la nationalité français a été attribuée par filiation, naturelle ou adoptive, que celles qui l’ont obtenue du fait de leur naissance en France, dans les conditions prévues au chapitre II du titre Ier bis du livre Ier du code civil.
Ce chapitre II prévoit tous les cas d’acquisition de la nationalité françaisey compris le droit du sang :Donc si, certes, la majorité des à peu près 3 cas qui seront concernés par la loi relèveront probablement du droit du sol, le projet remet aussi en cause le droit du sang. Il n’y a donc pas de raison de se limiter à la dénonciation de la remise en cause du droit du sol ;Un binational Français fils d’un Français et d’une Syrienne sera potentiellement concerné, et, si on pousse, un binational Français fils de 2 Français ayant épousé une Belge sera aussi concerné…Chapeau !
Enfin, la déchéance de la nationalité française ne sera possible qu’en cas de condamnation définitive. Elle ne pourra pas être prononcée si elle a pour résultat de rendre apatride la personne concernée.
Pour le moment ? Bah, c’est vrai qu’il faut en laisse un peu pour l’UMP…
Donner à l’État les moyens de protéger la Nation contre le terrorisme et le fanatisme, dans la fidélité aux valeurs de la République, est attendu par tous les Français. Pour cela, une modification de la Constitution est aujourd’hui nécessaire.
Orwell, Orwell,Orwell.
C’est vrai qu’avec Hollande, Valls, Fabius, et cette nouvelle super-loi, on est super bien protégés…
Tous les Français doivent pouvoir se rassembler autour de cette ambition partagée.
Sinon, on est un mauvais Français, j’imagine ?
Future cause de déchéance de nationalité au fait ?
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PROJET DE LOI CONSTITUTIONNELLE
C’est le texte de la loi…
Le Président de la République,
Sur la proposition du Premier ministre,
Vu l’article 89 de la Constitution,
Décrète :
Le présent projet de loi constitutionnelle de protection de la Nation, délibéré en conseil des ministres après avis du Conseil d’État, sera présenté à l’Assemblée nationale par le Premier ministre, qui sera chargé d’en exposer les motifs et d’en soutenir la discussion, et en tant que de besoin, par la garde des sceaux, ministre de la justice.
Après l’article 36 de la Constitution, il est inséré un article 36-1 ainsi rédigé :
« Art. 36-1. – L’état d’urgence est déclaré en conseil des ministres, sur tout ou partie du territoire de la République, soit en cas de péril imminent résultant d’atteintes graves à l’ordre public, soit en cas d’évènements présentant, par leur nature et leur gravité, le caractère de calamité publique.
En effet, on est rassuré, c’est très précis et limité
« La loi fixe les mesures de police administrative que les autorités civiles peuvent prendre pour prévenir ce péril ou faire face à ces évènements.
« La prorogation de l’état d’urgence au-delà de douze jours ne peut être autorisée que par la loi. Celle-ci en fixe la durée. »
L’article 34 de la Constitution est ainsi modifié :
1° Le troisième alinéa est remplacé par les dispositions suivantes :
« – la nationalité, y compris les conditions dans lesquelles une personne née française qui détient une autre nationalité peut être déchue de la nationalité française lorsqu’elle est condamnée pour un crime constituant une atteinte grave à la vie de la Nation ; »
En effet, on est rassuré, c’est très précis et limité
2° Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« – l’état et la capacité des personnes, les régimes matrimoniaux, les successions et libéralités ; ».
Fait à Paris, le 23 décembre 2015.
Signé : François HOLLANDE
Signé : Manuel VALLS
Signé : Christiane TAUBIRA
Ce projet de loi est la plus belle victoire de Daech, qui avec 10 personnes aura réussi à nous faire changer notre Constitution.Le fait que Christiane TAUBIRA signe ce projet de loi devrait déciller les personnes qui pensent qu’un politicien actuel est mu par des convictions.Laissons le mot de la fin au Conseil d’État : “Il est vrai qu’une telle mesure aurait une portée pratique limitée. La perspective d’une éventuelle déchéance de la nationalité française aurait sans doute peu d’effet dissuasif sur les personnes décidées à commettre les infractions mentionnées par le projet.”
II. Conclusion
La conclusion est relativement simple : ce projet présente le 23 décembre – c’est comme aout, les périodes des sales-coups - mérite bien de rejoindre le cortège des lois scélérates, votées déjà après des attentats.
Il faut d’ailleurs souligner que figurent d’ailleurs dans le code pénal aux articles visés par le Conseil d’État “Des atteintes aux intérêts fondamentaux de la nation” des crimes et délits tels que :
Article 411-6 : Le fait de livrer ou de rendre accessibles à une puissance étrangère, à une entreprise ou organisation étrangère ou sous contrôle étranger ou à leurs agents des renseignements, procédés, objets, documents, données informatisées ou fichiers dont l’exploitation, la divulgation ou la réunion est de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation est puni de quinze ans de détention criminelle et de 225 000 euros d’amende.Article 411-10 : Le fait de fournir, en vue de servir les intérêts d’une puissance étrangère, d’une entreprise ou organisation étrangère ou sous contrôle étranger, aux autorités civiles ou militaires de la France des informations fausses de nature à les induire en erreur et à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation est puni de sept ans d’emprisonnement et de 100 000 euros d’amende.Article 432-9 : Le fait, par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, agissant dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions ou de sa mission, d’ordonner, de commettre ou de faciliter, hors les cas prévus par la loi, le détournement, la suppression ou l’ouverture de correspondances ou la révélation du contenu de ces correspondances, est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45000 euros d’amende.
qui, de façon extensive, et de plus ou moins bonne foi, pourraient être portés contre le gouvernement (par exemple lorsqu’il transmet les données de communication des Français aux États-Unis, lorsqu’il caviarde d’un rapport officiel les doutes sur la culpabilité de la Syrie dans le gazage de 2013, ou lorqu’il espionne nos conversations privées).
Il est donc assez étonnant de voir que ceci aura été présenté par un Premier Ministre binational (ou tri, je ne sais pas pour Valls), d’un gouvernement dont l’ancienne porte-parole est binationale, dans la capitale dont la maire (de la majorité) est binationale (mais qui au moins s’oppose au projet)…
Je conclurai en rappelant ma position, qui est de refuser par principe de cohérence les déchéances de nationalité (hors mensonge dans le dossier de naturalisation).
Après, beaucoup ont pointé en commentaire le sujet de la bi-nationalité en lui-même. Je n’ai pas d’avis arrêté, mais après tout, pour éviter ce genre de débat nauséabond voire, bientôt, n’en doutons pas, les accusations de “demi-français” ou de “5e colonne”, il faudrait peut être avoir un débat sur l’obligation de choisir (par rapport à l’administration française, vu que certains pays interdisent l’abandon de leur nationalité) une nationalité et une seule à un moment donné, quitte à ce que ce choix soit réversible par l’individu… À discuter ?
En tous cas, tout ceci montre qu’il convient de mieux protéger la Constitution des poussées populistes et sécuritaires. On voit d’ailleurs que les politiques ont de plus en plus tendance à la modifier souvent :
La France prévoit que la modification intervient après référendum sur un texte adopté à la majorité des députés, mais que le Président peut renoncer au référendum et convoquer un Congrès qui doit adopter à 60 %.
Beaucoup de pays sont plus prudents – et démocrates – quant à la modification de la Constitution :
Espagne : 1/ Modification légère : majorité de 60% et 10 % des parlementaires peuvent demander un référendum 2/ Modification lourde ou des droits fondamentaux : Majorité de 67 % + dissolution immédiate du Parlement + Nouveau Parlement doit adopter à 67 % + Référendum à la fin
Italie : 2 scrutins à 3 mois d’écart, avec majorité de chaque chambre. Soumis à référendum si 20 % des membres d’une chambre ou 500 000 électeurs le demandent. Pas de referendum si adoption parlementaire à plus de 67 %.
Allemagne : majorité de 67 % dans chaque chambre, modifications des droits fondamentaux interdites.
Portugal : majorité de 67 %, si plus de 5 ans depuis la dernière modification. Sinon, majorité de 80 %. Limitations de la capacité à modifier des points importants de la Constitution.
Irlande : la loi de modification doit être approuvée par référendum
Pays-Bas : majorité de 67 %, après dissolution automatique de la chambre
Roumanie : majorité de 67 %, puis référendum
Grèce : 60 % des députés doivent voter la nécessite de la révision à 1 mois d’intervalle. La Chambre issue de l’élection suivante doit accepter à 50 %. Une seule révision tous les 5 ans. Certains modifications sont interdites.