PAR
C’est une décision qui pourrait bien venir bouleverser les pratiques vaccinales. Et l’on ne sait pas encore dans quel sens : un vaccin DTP (diphtérie, tétanos, poliomyélite) sans aluminium sera-t-il prochainement accessible, comme le demandent plusieurs associations ? Ou l’obligation vaccinale sera-t-elle étendue, de trois à onze maladies, comme le suggère la controversée concertation citoyenne sur la vaccination (lire notre article) ? La décision qu’a rendue mercredi 8 février le Conseil d’État est claire : dans les six mois qui viennent, le gouvernement doit s’assurer de la mise à disposition d’un vaccin contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite, sans autre valence, c’est à dire sans molécules supplémentaires concernant d’autres maladies. Ce vaccin est aujourd’hui introuvable : il est associé à la coqueluche (au minimum), à l’hépatite B, et l’haemophilus influenzae de type b, un germe qui provoque des méningites.
Pourtant, seul un vaccin est obligatoire, en France, chez les enfants de moins de 18 mois : le DTP. Depuis 2008, l’entreprise Sanofi qui produisait ce vaccin sans adjuvant aluminique l’a retiré de la commercialisation, arguant d’une hausse des effets indésirables. Cette hausse serait due à des manipulations statistiques, estime de son côté l’association E3M, qui regroupe des victimes de la myofasciite à macrophages et qui dénonce les effets des sels d’aluminium dans les vaccins. Les données récupérées par E3M ont été portées devant la justice. En attendant, les parents sont obligés de faire vacciner leurs enfants avec des vaccins tétravalents ou hexavalents, plus chers donc plus rentables pour les laboratoires... et qui contiennent de l’aluminium.
L’argument de la dangerosité de l’aluminium, évoqué par les plaignants, a été réfuté par le Conseil d’État. Mais la juridiction administrative a tout de même décidé d’obliger le gouvernement à mettre en concordance l’offre de vaccins avec l’obligation vaccinale définie dans la loi. La ministre de la Santé, Marisol Tourraine, l’avait jusqu’alors refusé, entraînant la saisie du Conseil d’État par les associations. Deux options s’offrent désormais à la ministre. La première consiste à faire appliquer la loi et exiger des laboratoires qu’ils produisent à nouveau ce vaccin DTP. Impossible dans les six mois, jurent des experts dont certains sont liés à l’industrie. Si les laboratoires ne peuvent s’en charger, le vaccin pourrait être acquis, produit ou importé par l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (Eprus). Deuxième option : à défaut de la respecter, le ministère de la Santé pourrait proposer de changer la loi pour accroître le nombre de vaccins obligatoires. Ce qui alimenterait encore un peu plus la méfiance des Français envers la vaccination.