Tous micro-entrepreneurs, c’est l’avenir du travail !
lundi 28 août 2017
C’est un bobard « en même temps » : il s’adresse aux jeunes et aux chômeurs·euses, appelé·e·s à se prendre en main, à être autonomes et modernes, et en même temps aux professions réglementées comme les taxis, sommés de renoncer à des « privilèges » d’un autre âge.
« L’emploi indépendant devient la nouvelle norme »
La montée récente de l’auto-entrepreneuriat fait l’objet de tous les fantasmes. Pour les néolibéraux, on assisterait à la généralisation de l’entrepreneur autonome dans un monde concurrentiel et informatisé, tandis que certains idéalistes à gauche y voient l’avènement du travailleur enfin affranchi de l’aliénation et de la subordination à un employeur.
Pourtant, le salariat résiste. La part des non-salarié·e·s dans l’emploi total a considérablement reculé entre 1970 et les années 2000, notamment dans l’agriculture. Elle n’a commencé à remonter faiblement que depuis 2009, sous l’impulsion de la loi dite de « modernisation de l’économie » d’août 2008 encourageant l’auto-entrepreneuriat. Aujourd’hui, 11 % des emplois sont non-salarié·e·s : plus que les 8-9 % des années 2000-2009, mais bien moins que les 20 % de 1970. Il n’y a pas de lame de fond.
L’auto-entrepreneuriat a pourtant des effets majeurs sur l’emploi indépendant. Il déstabilise des professions indépendantes « classiques » : par exemple, pour exercer, les artisans taxi doivent réussir un concours et investir dans une licence et un véhicule. Ils font désormais face à des chauffeurs de plateformes, VTC ou Uber, n’ayant ni le certificat de taxi (la formation VTC est bien moins exigeante), ni la licence et contraint à des cadences infernales du fait de leurs faible niveau de rémunération. Si cette concurrence a pu se développer, c’est parce que les pouvoirs publics ont ouvert la profession de taxi à des auto-entrepreneurs non professionnels.
« L’auto-entrepreneuriat, c’est l’emploi d’avenir »
Loin des clichés sur leur autonomie, les auto-entrepreneurs sont souvent poussés vers ce statut par la précarité ou les discriminations des employeurs. Plutôt qualifiés, ils cherchent à compléter les revenus d’une activité salariée précaire ou basculent malgré eux vers ce statut. quand ce ne sont pas d’ancien·ne·s chômeurs·euses ou inactifs·ves qui en obtiennent des revenus insuffisants. Leur subordination de fait à un client ou à un donneur d’ordre est fréquente, ces derniers cherchant à disposer d’une main-d’œuvre flexible sans assumer les obligations d’un employeur, une forme extrême d’exploitation.
L’ubérisation n’est pas l’avenir du travail.
La précarité de ces emplois et la course au moins-disant social alimentent les revendications et les luttes de ces précaires. L’avenir, c’est la régulation de l’emploi indépendant, et sa réintégration dans le salariat quand il n’est pas indépendant.