Réforme des retraites : ce n’est pas digne d’un gouvernement de gauche
29 août 2013 – 9:26
D’un côté Bruxelles est très exigeant, le MEDEF tape du poing sur la table et s’est battu pour que les cotisations n’augmentent pas. Sous cette pression, le gouvernement s’orientait vers une réforme qui aggravait ce que Nicolas Sarkozy et François Fillon ont mis en place. De l’autre, la menace d’une mobilisation le 10 septembre et le fait qu’une partie des militants socialistes sont contre la réforme inquiète les ministres. Jean-Marc Ayrault a tenté de trouver un juste milieu, d’arriver à un équilibre.
Mais cet exercice d’équilibriste est allé plus à droite qu’à gauche. La pression du MEDEF pour l’instant est plus forte que celle des manifestants. Il a baissé le coût du travail, a choisi de faire faire payer les salariés, pas le patronat. Les cotisations retraites patronales devraient augmenter mais le gouvernement a aussitôt promis au patronat de lui rembourser sous forme de diminution des cotisations famille ce qu’il lui prenait pour les retraites. Comment seront financées les allocations familiales ? En diminuant leur montant, en augmentant la CSG ou la TVA ? Dans tous les cas, ce sont les salariés qui seront perdants au profit du patronat. Le Medef s’est d’ailleurs aussitôt engouffré dans la brèche ouverte par le gouvernement et exige de ne plus financer les allocations familiales (34 milliards d’euros par an). Le gouvernement a aussitôt accepté d’en discuter.
Il ne faut pas baisser le coût du travail mais bien l’augmenter, les salariés ont besoin de pouvoir d’achat. Le patronat est un adversaire, nous ne pouvons pas leur faire de cadeaux.
Nous voulons que la retraite soit ramenée à 60 ans et soit financée par l’augmentation des cotisations retraites, en priorité celle des cotisations patronales. La retraite n’étant pas une épargne, elle peut se régler d’une année sur l’autre. Il faut moduler les cotisations, de telle sorte que s’il y a un problème en 2025 on puisse agir en 2024 pour garder la prestation et les 75% de taux de reversement sur les meilleures années.
En aucun cas, il ne faudrait allonger les annuités de cotisation. C’est comme un boa qui étoufferait lentement la retraite par répartition. Ce que propose le gouvernement, après les réformes de la droite, sonne comme un message à la jeunesse lui disant qu’elle n’aura plus de retraites. Comment pourraient-ils croire en un système qui ne leur offrirait qu’une retraite à 67 ans ou 70 ans au montant de plus en plus éloigné de leur salaire d’activité ?
En augmentant le nombre d’annuités, on aggrave la situation des gens qui ne peuvent pas les atteindre, en particulier les femmes. Résultat : le montant de leur retraite diminue. 993 euros en moyenne (lorsque la CSG et le CRDS sont déduits), c’est déjà trop peu, ne faisons pas en sorte de la baisser encore davantage.
La réforme est présentée comme étant soft – pas « brutale » dit Marisol Touraine –, ce n’est pas vrai. Elle est contournée, met en avant des aspects secondaires (pénibilité, temps partiel, apprentissage) accordés à dose homéopathique qui ne change rien de fondamental à une réforme qui va contre les intérêts des travailleurs. Ils doivent donc se défendre, en descendant dans la rue le 10 septembre notamment comme souhaitent le faire certains syndicats.
Avec la gauche, nous n’obtenons pas tout ce que nous voulons. Avec la droite, nous avions tout ce que nous ne voulions pas. Nous attentions davantage d’un gouvernement socialiste. Ce n’est pas digne d’un gouvernement de gauche de vouloir baisser le coût du travail. C’est accepter la pression du patronat au lieu d’entendre la voix des salariés.
Nous attendions que ce gouvernement remette en cause ce qu’avait imposé Nicolas Sarkozy avec Éric Woerth et qu’il redonne du pouvoir d’achat à la retraite et épargne le drame du chômage à tant de seniors. Il vaut mieux des retraites plus tôt, que du chômage plus tard.