mercredi 1 octobre 2014

Un nouveau Maïdan… à Hong Kong ? (vineyardsaker)

Un nouveau Maïdan… à Hong Kong ?


La police repousse les manifestants avec des jets d'eau poivrée. 28 septembre 2014 (AP Photo/Vincent Yu) (The Associated Press)
La police repousse les manifestants avec des jets d’eau poivrée. 
28 septembre 2014 (AP Photo/Vincent Yu) (The Associated Press)
Un Maïdan à Hong Kong fomenté par les USA ? Ce bruit court avec insistance, notamment dans les réseaux de blogueurs russes, qui font le parallèle immédiat avec l’Ukraine, et est repris dans un article de Zero Hedge de ce jour [1]. Nous ne pouvons précisément vérifier sa véracité, compte tenu de nos moyens d’information limités. Il n’est pas interdit cependant de lui donner écho, pour suivre plus attentivement la suite des événements. Mais de quoi s’agit-il ?
Rappelons que, par le terme de révolution de la place Maïdan, l’opinion occidentale désigne les manifestations s’étant produites à Kiev il y a quelques mois, qui ont entrainé la chute du président prorusse de l’époque, remplacé par un président pro-occidental, dit aussi « Roi du chocolat », compte tenu de ses intérêts personnels dans ce domaine. Or, cette révolution, présentée sur le moment, par des forcenés du type de Bernard Henri Lévy, comme une explosion de la démocratie enfin revenue à Kiev, s’est révélée rapidement comme le résultat de manœuvres en sous-main, à la limite du terrorisme, conduites par des groupes de mercenaires financés par la CIA, afin d’affaiblir l’influence russe dans ce pays, et de compromettre l’image de Poutine.
L’opération se poursuit actuellement dans le cadre des combats sanglants qui se mènent entre pro-russes et troupes gouvernementales dans le Donbass et en Ukraine russophone. Poutine en est effectivement affaibli, car il est pris en deux maux : intervenir militairement au-delà des frontières de la Fédération de Russie, ou laisser les répressions gouvernementales se poursuivre.
Dans Le double jeu américain avec le Calife [2], nous indiquions récemment que, selon diverses informations, Washington se préparait à mener contre la Chine, devenue, en second rang après la Russie, son nouvel ennemi héréditaire, une opération du même type que celle qui lui avait si bien réussi à Kiev : susciter dans certaines provinces des manifestations populaires qui permettraient d’ébranler le régime. Nous évoquions le soutien donné à des indépendantistes musulmans ouïghours. Mais en fait il paraît très probable que Washington ait décidé de s’en prendre à une autre des faiblesses du régime, le statut du Territoire de Hong Kong. Ne revenons pas ici sur l’historique de ce que certains avaient appelé l’annexion de l’ex-colonie britannique. Elle avait suscité de nombreuses opposions, venues de différents milieux. Mais finalement l’actuel système, dit des deux Chines, un seul système, auquel est soumis le territoire paraissait satisfaire l’ensemble des parties.
Or les médias du monde entier ont pu constater que depuis quelques jours, des foules nombreuses, composées principalement de manifestants se disant en lutte pour la démocratie, avaient occupé divers lieux sensibles, notamment Central et Admiralty, centres financiers situés non loin du siège du gouvernement. Les manifestations se veulent pacifiques. Cependant, des échauffourées ont déjà eu lieu avec les forces de police. Aujourd’hui 1er octobre, les manifestants pro-démocratie sont toujours fortement mobilisés, à la veille de la fête nationale chinoise, refusant de répondre aux appels à la dispersion lancés par le chef de l’exécutif, présenté comme aux ordres de Pékin par les plus activistes d’entre eux.
Nous n’examinerons pas ici la légitimité de ces manifestations, ni le contenu des réformes politiques qu’elles demandent, promises après la rétrocession à la Chine de la colonie en 1997. Il est difficile par ailleurs d’évaluer le soutien populaire qu’apporte le reste de la population à ces revendications. Il est certain cependant que la confrontation des manifestants avec les forces de police est localement très électrique, et pourrait rapidement dégénérer en batailles rangées, dont l’issue, comme toujours en de telles situations, serait incertain.
Ce qui est certain par contre c’est que les États-Unis n’avaient pas manqué, depuis longtemps, de mener à Hong Kong, et dans d’autres régions proches, des actions du même type que celles ayant provoqué, ces dernières années, le succès des révolutions dites orange aux frontières de la Russie. Il s’agit de ce que l’on peut qualifier de diplomatie du dollar et des services secrets. Les officiels chinois ont dénoncé ces manœuvres et appellent à la résistance. Le Département d’État américain n’hésite plus dorénavant à se confronter directement avec eux sur le plan diplomatique. Quelle que soit la sympathie que l’on puisse éprouver en faveur du concept de démocratie, à Hong Kong comme ailleurs, on ne peut s’empêcher de constater que ce concept est devenu la plus performante des armes utilisées par les bellicistes américains pour étendre leur domination systémique à certaines parties de l’Asie jusque-là préservées.
Affaire donc à suivre attentivement, notamment au regard de ce qu’il pourrait en résulter sur l’avenir du BRICS et des offensives anti-dollar envisagées par ce dernier, ainsi que sur la façon dont réagira l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS).
Jean-Paul Baquiast
Notes
[1] Is the U.S. Secretly Egging On Hong Kong Protesters? (zerohedge.com, 01-10-2014)
[2] Le double jeu américain avec le Calife (vineyardsaker, français, 27-09-2014)