Au lendemain de la publication des stress tests bancaires par la Banque centrale européenne, les Verts européens ont publié leurs propres tests. Ils n’obtiennent pas du tout le même résultat. Pour eux, le système bancaire européen est toujours aussi risqué.
Au lendemain de la publication des stress tests bancaires
par la Banque centrale européenne, le groupe des Verts au parlement
européen publie ses propres tests sur les banques européennes.
Étonnant : ils n’obtiennent pas du tout le même résultat. Pour les Verts
européens, la situation des banques en Europe n’a pas du tout été
assainie depuis la crise financière de 2008. « Le système bancaire n’a pas été réformé en profondeur. Il reste une source réelle de danger pour la zone euro », disent-ils.
Le groupe européen des Verts juge que le message envoyé par la BCE à
l’occasion de ces tests de résistance est un très mauvais signal. La
Banque centrale européenne laisse penser qu’« une réforme structurelle du secteur bancaire européen ne serait plus nécessaire », que les problèmes bancaires sont résolus. Or, il n’en est rien, soutiennent les Verts.
D’abord, notent-ils, les méthodes d’évaluation qui ont été utilisées
pour évaluer la solidité des bilans bancaires sont biaisées : ce sont
les modèles internes des banques qui ont servi pour estimer les risques
encourus. « Les banques peuvent ainsi respecter les exigences de
fonds propres réglementaires sans nécessairement réduire l’effet de
levier », insiste leur étude. Même la banque d’Angleterre s’est
montrée plus sévère en ce moment, soulignent-ils, puisqu’elle a inclus
ce ratio dans ses évaluations, en ne se contentant pas d’un simple ratio
de capital.
Ensuite, les tests ont été faits banque par banque, en niant
totalement les interconnexions bancaires, soulignent-ils. Or ces liens
constituent les risques les plus grands mais aussi les plus opaques du
système bancaire international. Si la faillite de Lehman Brothers avait
été limitée à ce seul établissement, elle n’aurait jamais provoqué la
crise financière de 2008. Mais c’est parce que la banque américaine
avait des engagements et était contrepartie pour des montants
représentant des milliers de milliards que la panique a saisi tout le
système. Personne ne connaissait l’étendue des risques et des désastres
possibles. Après des mois de travail, les liquidateurs ont eu une
meilleure vision : 5 milliards de dollars environ auraient suffi pour
sauver Lehman Brothers.
Les risques pour les banques européennes sont encore plus élevés,
insistent les Verts, car elles continuent de dépendre étroitement des
marchés interbancaires et des marchés de financement de gros pour
assurer leurs financements à court terme. Elles se retrouvent donc à la
merci du moindre choc.
Enfin, les tests de la BCE n’incluent pas du tout la question de la
finalité de l’activité bancaire. Les banques servent-elles à financer
l’économie ? Ou participent-elles essentiellement au grand casino
financier et aux jeux de la spéculation ?
Les Verts ont décidé de faire leur propre évaluation des principales
banques dans six pays européens (Allemagne, France, Grande-Bretagne,
Espagne, Belgique et Pays-Bas). Six indicateurs ont été retenus, les uns
pour estimer le profil de risque de la banque (niveau d’endettement,
nature du financement des activités), d’autres pour peser son utilité
sociale (part respective des activités spéculatives et de financement de
l’économie réelle, degré de dépendance aux montages financiers offshore, et montant des subventions implicites).
Résultat ? Rien n’a changé. « À l’image de la Deutsche Bank, BNP
Paribas, ou Barclays, les mégabanques européennes ne répondent toujours
pas aux exigences de base en matière de gestion des risques financiers
et d’utilité sociale », constate leur étude. Elles sont toujours
aussi gigantesques et opaques. Elles ont toujours des effets de levier
importants et dépendent toujours des financements à court terme pour
leur activité. Elles consacrent toujours autant d’énergie et de moyens
aux activités spéculatives.
Tout cela serait impossible si ces grandes banques, au nom du too big to fail,
ne bénéficiaient pas de la garantie implicite voire explicite des
États. Celle-ci leur permet de lever de l’argent sur les marchés à un
coût bien inférieur à celui de leurs concurrentes plus petites. Ces
subventions implicites se sont élevées à 85,7 milliards d’euros pour les
57 plus grandes banques européennes en 2013, selon leurs calculs.
© pechesbancaires.eu
Les Verts ont établi un critère de nuisance sociale, rapprochant d’un
côté les activités spéculatives, et de l’autre les subventions
implicites. Un classement a été établi à partir de ce critère. Les noms
des dix premières banques est sans surprise : toutes les grandes banques
européennes s’y retrouvent. Les banques françaises y figurent en très
bonne place.
Alors que le gouverneur de la Banque de France, Christian Noyer, se félicitait dimanche des excellents résultats des stress tests
pour les banques françaises, y voyant la pertinence du modèle français
de la banque universelle, les parlementaires écologistes européens
insistent au contraire sur la situation« caricaturale » des
banques françaises. Elles travaillent avec des effets de levier toujours
plus importants et dans des activités spéculatives. La loi sur la
séparation des activités bancaires était pourtant censée mettre un terme
à ces pratiques. « En 2013, l’effet de levier est de 24,3 pour le
groupe BCPE, de 27,3 pour BNP, de 32,7 pour la Société générale et de 67
pour le Crédit agricole. En d’autres termes, cette dernière, pour 1
euro de fonds propres, emprunte 67 euros, à peu près autant que Dexia
avant que cette dernière ne fasse faillite ! », note l’étude.
Un tableau reprenant les principaux critères a été construit pour
les principales banques dans chaque pays. Ils sont consultables sur le
site pechesbancaires. eu.
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Crédits photo: AFP