Mais pourquoi le chômage ne baisse-t-il pas ?
Jean-Christophe Chanut
Les données du mois d'avril prouvent que la courbe du chômage est loin de
s'inverser malgré une reprise de la croissance. Les sureffectifs actuels dans
les entreprises expliquent pourquoi celles-ci n'ont pas besoin de recruter, du
moins dans un premier temps.
La courbe du chômage est loin, mais alors très loin de s’inverser. Pis, les
indices ont plutôt tendance à se dégrader. Après une hausse de 0,4% en mars du
nombre des demandeurs d’emploi en catégorie "A", la progression a été de 0,7% en
avril, soit plus de 26.000 chômeurs supplémentaires... L’équivalent de la
population totale d’une ville comme Bergerac (Dordogne). Il y a vraiment le feu
au lac. La France n’a jamais compté autant de demandeurs d’emploi. Pour la seule
catégorie "A", lls sont maintenant très exactement 3.536.000 en France
métropolitaine et 3.794.900 en incluant les Dom. Mais si l’on additionne toute
les catégorie (il y en a cinq à Pôle emploi), on dépasse allègrement les six
millions... Sans compter ce que l’on appelle le "halo" du chômage. C’est-à-dire
toute ces populations qui ne touchant plus aucune indemnisation ont disparu des
écrans radars.
Les entreprises ont de grosse réserves de productivité
Au ministère du Travail, on tente de se rassurer en rappelant que la reprise
de la croissance (le PIB a progressé de 0,6% au premier trimestre) va finir par
faire sentir ses effets sur l’emploi mais qu’il faut "un délai de plusieurs mois
avant que la reprise de l’activité ne se traduise par des embauches"... Ce qui,
en théorie, n’est pas faux. Reste qu’il va falloir être patient pour y parvenir.
Pourquoi ? Tout simplement parce que la reprise n’est pas encore totalement
établie. Le niveau de production industrielle en France reste encore inférieur à
celui qui était le sien en 2008. Et, surtout, il reste des énormes réserves de
productivité dans les entreprises. Concrètement, celles-ci, n’auront pas besoin
dans un premier temps d’embaucher pour faire face à une reprise des carnets de
commandes. L’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) estime
qu’il y a environ un sureffectif dans les entreprises de 170.000 salariés.
La population active augmente encore de 64.000 personnes début
2015
Ce qui signifie que les entreprises auraient pu avoir la main encore plus
lourde en matière de licenciements ces dernières années. Elle n’ont donc pas
besoin de se précipiter pour embaucher. Or, la population active continue
"naturellement" de progresser. En 2014, déjà, 160.000 personnes supplémentaires
sont arrivées sur le marché du travail et, sur le seul premier semestre 2015,
elles seront encore 64.000 supplémentaires selon l’Insee. Or, le nombre des
créations d’emploi est insuffisant pour absorber ces arrivées massives. La
France perdrait même encore 18.000 poste dans le secteur marchand au premier
semestre, toujours selon l’Insee. La politique des contrats aidés – il y en aura
in fine plus de 400.000 budgétés en 2015 – parvient tout juste à éviter une
explosion du chômage encore plus forte.
Pas d’espoir avant 2016
Résultat, selon la dernière note de conjoncture de l’Insee, le taux de
chômage va augmenter de nouveau de 0,2 point au premier semestre, passant de 10%
à la fin décembre 2014 à 10,2% à la mi-juin en France métropolitaine (10,6% en
incluant les Dom), son plus haut niveau depuis 1997. Il faudra vraiment une
croissance plus forte et surtout durable pour parvenir à inverse la tendance. Un
espoir qui ne se réalisera sans doute pas avant 2016. D’ici là on risque bien de
vivre une reprise sans emplois.
Jean-Christophe Chanut
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http://www.legrandsoir.info/mais-pourquoi-le-chomage-ne-baisse-t-il-pas.html
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