Jean ORTIZ
Jamais la France n’aura eu un premier ministre aussi provocateur, méprisant, matamoresque, cynique... Comme Sarko et le FN, il a décidé que les prochaines présidentielles porteraient sur « l’identité », la « sécurité », la « nation », à la sauce ultra réact, reléguant ainsi la question des questions : la « question sociale »...
La polémique sans cesse relancée, burinée, sur le « burkini » relève d’une offensive proche de la « révolution nationale » du bon maréchal. Bien qu’elle puisse apparaître burlesque, elle n’en est pas moins dangereuse, instrumentalisée de tout bord ; elle peut se terminer par la mise à mort de la République, alors que nous avons besoin d’une République et d’une laïcité ouvertes, intégratrices, d’inclusion. Mais ces hommes sont prêts à tout, à mettre la France à feu et à sang s’il le faut, comme ceux qu’ils dénoncent, pour asseoir leur ambition personnelle et surtout servir un capitalisme de plus en plus carnassier dont ils sont les hérauts besogneux.
La France est menacée d’éclatement, de fragmentation, oui, par leur politique antisociale, leur inféodation à l’Union européenne et aux Etats-Unis, ravagée par une austérité létale, l’austérité pour « ceux d’en bas ». Ces politicards créent les conditions pour que des jeunes français, ne se sentant pas exister, se retournent criminellement contre leur pays. La révolte populaire est en partie récupérée par le FN et « les islamistes », qu’on le veuille ou non. C’est qu’ils « offrent » des illusions trompeuses et mortelles d’appartenances fallacieuses. Notre pays est orphelin d’un grand pôle de gauche véritable, radicale, révolutionnaire, tribunicienne, et de proposition d’alternative anticapitaliste ; orphelin d’un parti communiste fort, enraciné dans les milieux populaires, internationaliste. Autant de raisons pour réussir une grande et belle Fête de l’Humanité.
C’est pour cacher leur bilan, et leurs projets de hold-up financier et idéologique sur le peuple, que Valls, Sarko et le FN ont inventé, et qu’ils alimentent, une « guerre de civilisation », « guerre de religion ». Ils en viennent même à ne pas tenir compte de la décision du Conseil d’État, se mettant en quelque sorte hors la loi de la République. Assez de leurres ! Après le voile intégral, le débat délétère sur les signes religieux extérieurs, sur la déchéance de nationalité, ils nourrissent eux-mêmes « l’islamisme politique » pour mieux s’en servir comme repoussoir. Ce dernier doit être combattu sur tous les fronts, sur la durée, sans instrumentalisation, sans médiatisation à outrance.
Les véritables « troubles à l’ordre public », ce sont la situation des femmes travailleuses, leurs salaires, leurs pensions de survie, inférieurs de 20 à 40% à ceux des hommes, leur statut de plus en plus précaire, la vague croissante des chômeurs et des « travailleurs pauvres », des jeunes sans avenir, largués, l’université sacrifiée, « l’ascenseur social » en panne, l’implacable « loi du fric », les inégalités insupportables et insupportées... Voilà le véritable combat ! Lutter contre le terrorisme, c’est avant tout l’assécher en amont, « voiler », couper ses racines sociales, sans angélisme, réprimer quand il le faut, sans tomber pour autant dans la répression spectacle, dans le piège que les terroristes nous tendent...
La création d’un climat anxiogène, haineux, de peur, la division, c’est tout bénéf’ pour le FN et les « islamistes ».
Il serait temps aussi de rappeler nos militaires à la maison, de les consacrer à la défense des frontières nationales, et non à bombarder, fût-ce « chirurgicalement », pour dicter la loi impérialiste au Proche et Moyen Orient, à la Syrie, l’Irak, la Libye... en supplétifs de Washington partout où ça pue le pétrole. On dirait une fable, terrible : « Le burkini et les bourricots ».
Jean Ortiz,
universitaire, membre du PCF.