lundi 21 septembre 2015

Le silence fait sur l’accès au commerce européen donné au tabac est un signe inquiétant de la menace du TTIP (les crises)

Le silence fait sur l’accès au commerce européen donné au tabac est un signe inquiétant de la menace du TTIP

 
La transparence (ou son absence) à la Commission Européenne.
Plus tôt dans la semaine, la Commission européenne a rendu public des documents au contenu fortement “révisé” (cf. les PDF ci-dessous) concernant les rapports qu’elle a pu avoir avec l’industrie du tabac dans le cadre des négociations commerciales que mène l’Europe, y compris celles en cours avec le Japon et celles avec les États-Unis (TTIP alias TAFTA alias PTCI, partenariat transatlantique de commerce et d’investissement). Dans tous ces quatre documents (correspondance et minutes des rencontres avec les lobbies du tabac) quasiment tout est censuré (caviardé à l’encre noire), y compris les noms de tous les lobbyistes de l’industrie du tabac et des officiels de la Commission impliqués. Dans une lettre de 14 pages de “British American Tobacco” par exemple, moins de 5% du texte est visible (quelques phrases insignifiantes de remarques introductives et conclusives). Dans un résumé d’une seule page relatant une rencontre avec Philip Morris, même la date de la rencontre a été effacée, et nulle part on ne peut savoir de quelles négociations il s’agit. C’est ce que la Commission qualifie “d’accès partiel”.
La lettre de 14 pages sur les négociations commerciales envoyée par le lobby du tabac à la Commission.
Ces documents ont été publiés accompagnés d’une réponse de Catherine Day (secrétaire générale de la Commission Européenne) à une demande au nom du droit d’accès à l’information [Règlement européen nº 1049/200, NdT] faite en mars 2015 par l’Observatoire de l’Europe Industrielle (CEO, Corporate Europe Observatory). Dans une réponse antérieure, la Commission avait déjà rendu publics deux documents quelque peu moins caviardés, mais avait catégoriquement refusé l’accès à quatre autres. Le CEO avait fait appel de cette décision, demandant à la Commission d’autoriser le plein accès à tous ces documents. Le CEO avait fourni une argumentation détaillée, montrant en quoi la divulgation de ces documents était d’un intérêt public primordial. La divulgation de ces documents est nécessaire “pour permettre au public d’examiner la nature des relations existant entre la Direction Générale du Commerce et l’industrie du tabac” et “pour permettre au public d’évaluer dans quelle mesure l’accord de libre-échange entre l’Europe et le Japon (FTA, Free Trade Agreement) (et aussi le TTIP) crée un risque pour la politique de contrôle du tabac”. Le CEO fait ressortir que la transparence concernant ces documents est nécessaire si l’on veut savoir si les négociateurs commerciaux de l’Europe, à la suite des discussions qu’ils avaient eues avec les industriels du tabac, cherchent à influer sur la réglementation du contrôle du tabac dans d’autres pays et s’ils se font les avocats de l’inclusion dans les nouveaux traités commerciaux du mécanisme controversé de règlement des différends entre investisseurs et États (ISDS).
Le CEO a aussi remis en cause le retrait dans les documents des noms des lobbyistes de l’industrie du tabac et des représentants de la Commission. Le CEO a soutenu que la Commission “devait être complètement transparente sur ses contacts avec les représentants de l’industrie du tabac”, faisant allusion non seulement à la loi européenne sur le droit d’accès public à l’information (Règlement nº 1049/2001), mais aussi aux obligations de transparence en vertu de la convention-cadre sur le contrôle du tabac de l’Organisation Mondiale de la Santé (FCTC). Le FCTC et les directives qui l’accompagnent font obligation aux gouvernements de limiter au maximum les interactions avec l’industrie du tabac et d’assurer une complète transparence à celles des interactions qui peuvent se produire. L’argumentation complète est en ligne ici :
http://www.asktheeu.org/en/request/contacts_with_the_tobacco_indust
Dans sa lettre, Catherine Day a rejeté ces arguments, affirmant que l’intérêt public de la transparence “ne l’emporte ni sur l’intérêt public qu’il y a à protéger les relations internationales de la Commission et ses processus de prise de décision, ni les intérêts commerciaux des entreprises en question”. Day réaffirme les précédents arguments de la Commission, y compris celui selon lequel les documents ne peuvent être publiés parce qu’ils “contiennent des éléments en rapport avec la position de la Commission relative au tabac dans ses négociations bilatérales en cours pour un accord de libre échange avec les États-Unis et le Japon”
“Les documents 3, 4 et 5 contiennent des éléments en rapport avec les positions de la Commission relative au tabac dans ses négociations bilatérales en cours pour un accord de libre échange avec les Etats-Unis et le Japon” – Catherine Day, secrétaire générale de la Commission Européenne, citée depuis cette lettre : http://www.asktheeu.org/en/request/contacts_with_the_tobacco_indust#incoming-7684
Le CEO est profondément préoccupé par le secret qu’entretient la Commission sur ses relations avec les lobbyistes de l’industrie du tabac et plus généralement par le secret entourant les négociations commerciales internationales. Nous sommes donc en train de préparer une réclamation qui sera envoyée au médiateur européen.
Documents PDF en rapport :
(également disponibles à : http://www.asktheeu.org/en/request/contacts_with_the_tobacco_indust)
document_3_redacted.pdf
document_4_redacted.pdf
document_5_redacted1.pdf
document_6_redacted.pdf
hoedeman_2015_1635_en.pdf
Source : Corporate Europe Observatory, le 26/08/2015
Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.