Affaire Tefal : la justice condamne l’inspectrice du travail et le lanceur d’alerte
La
cour d’appel de Chambéry a condamné, ce 16 novembre, l’inspectrice du
travail Laura Pfeiffer à une amende avec sursis de 3500 euros. Le
tribunal confirme ainsi la décision prise en première instance en décembre 2015.
Les faits qui sont reprochés à Laura Pfeiffer remontent à 2013 : après
avoir exigé de l’entreprise Tefal (filiale du groupe Seb) qu’elle revoit
les termes de l’accord sur les 35 h, l’inspectrice du travail se voit
rappelée à l’ordre par sa hiérarchie. Elle alerte les syndicats et
reçoit le soutien d’un salarié de Tefal. Celui-ci lui fait passer des
mails révélant des liens de connivence entre la hiérarchie de Laura
Pfeiffer et la direction de Tefal (Lire notre article ici).
L’entreprise décide alors de porter plainte contre l’inspectrice et le
salarié pour violation du secret professionnel et recel de documents
confidentiels. Le salarié de Tefal a aussi été condamné à une amende
avec sursis de 3500 euros.
« Nous sommes consternés par ce jugement à l’encontre d’une
inspectrice du travail qui est condamnée pour avoir fait son travail et
dénoncé les pratiques de la multinationale visant à l’écarter de son
poste avec le relais de sa hiérarchie », proteste l’inter-syndicale (CGT, Sud, Syndicat national unifié, FO, CNT) dans un communiqué. « Cette
condamnation s’inscrit dans un contexte plus large de criminalisation
des mouvements sociaux (Goodyear, Continental, Air France, …) et de
répression des mobilisations (loi travail). Elle vient ainsi s’ajouter à
la liste déjà longue des injustices sociales et des attaques contre les
droits des salariés » , ajoutent les syndicalistes (lire : Air France, Goodyear : derrière les procès médiatisés, une répression anti-syndicale en passe de se généraliser).
L’indignation est d’autant plus vive que cette condamnation intervient
quelques semaines après le classement sans suite de la plainte déposée
par Laura Pfeiffer pour harcèlement moral de la part de son supérieur
hiérarchique.
« Il y a bien deux poids et deux mesures et la justice se rend
complice des stratégies des entreprises pour échapper à leurs
obligations, estime l’intersyndicale. Désormais, des milliers de
patrons pourront s’appuyer sur ce jugement pour licencier des salariés
et pour porter plainte contre ceux et celles dont la fonction est de
faire respecter les droits des salariés. Certains n’ont d’ailleurs pas
tardé à le comprendre : des plaintes contre des agents de contrôles [de
l’inspection du travail, ndlr] se sont multipliées, en particulier dans
le département de la Haute-Savoie. » L’intersyndicale s’insurge
aussi du silence du ministère du Travail, qui en trois ans n’a manifesté
aucun soutien à l’inspectrice mise en cause.