lundi 25 septembre 2017

Clin d’oeil : Singe savant (brindherbes engagés)

Ce morceau extrait de l’album « Du chaos naissent les étoiles » (2012) de Carmen Maria Vega vous fera certainement penser à quelqu’un…
Je dédicace cet opus à notre nouveau roi heuu.. pardon, président… dont les collaborateurs auront été élus dimanche avec l’approbation de 16% de la population.
Ce pouvoir est donc légal mais illégitime. Vive la démocratie !

dimanche 24 septembre 2017

Perquisitions et répression à Bure : le silence de Nicolas Hulot (basta)

PAR 
Le 20 septembre, la gendarmerie a perquisitionné plusieurs lieux à Bure (Meuse) et dans ses environs, habités par des opposants à Cigeo, le projet d’enfouissement de déchets nucléaires. La « maison de résistance », une ancienne ferme transformée en lieu d’accueil des militants anti-nucléaires, a ainsi été perquisitionnée vers 6h20 [1]. Au même moment, quatre domiciles privés étaient investis par les forces de l’ordre. Du matériel divers - ordinateur, disque dur, clé USB, téléphones portables, livres... - a été saisi. Les forces de l’ordre ont justifié ces perquisitions par la commission rogatoire d’un juge d’instruction, dans le cadre de l’enquête relative à une action menée en juin dernier contre l’hôtel-restaurant du laboratoire de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, en charge du projet Cigéo.
Angèle, très investie dans la mobilisation, fait partie des personnes dont le domicile a été perquisitionné. « Ils ont fouillé la chambre, ont pris de vieux téléphones portables et mon ordinateur dans lequel ils trouveront mes cours en apiculture », raconte-t-elle à Basta !. Elle voit dans ces perquisitions « une escalade de la stratégie de la tension »dans un contexte où des problèmes de sûreté du projet Cigéo ont été soulevés par l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) [2]« La préfecture tente d’allumer des contre feux médiatiques en mettant les projecteurs sur les opposants, en les criminalisant », estime-t-elle.
« La Préfecture fait tout pour que ça dégénère »
Joël dormait chez son amie lorsqu’ils ont été réveillés par une dizaine de gendarmes. « Ils ont sorti la commission rogatoire concernant l’affaire de l’hôtel-restaurant. Je leur ai dit que j’étais en vacances à ce moment-là, qu’ils pouvaient vérifier. Ils ont quand même pris un ordinateur, un téléphone et un disque dur », témoigne t-il. Joël fait partie des personnes qui ont été assignées à résidence durant la Cop21 à cause de ses activités militantes consistant, entre autres, à avoir co-organisé un campement à Bure trois ans auparavant (voir ici). « A partir du moment où il y a suspicion de culpabilité c’est un cercle vicieux. Ils me remettent dans le collimateur à chaque fois, même si l’assignation a été levée depuis la Cop21 et qu’ils n’ont jamais établi d’éléments à charge la justifiant. » Désireux d’obtenir gain de cause devant les tribunaux, il a décidé de saisir la Cour européenne des droits de l’homme.
« Un cap a été franchi dans un contexte de banalisation de l’état d’urgence », reprend Gaspard, un autre militant actif dans la lutte. « Cigeo subit une succession de revers tant juridiques que médiatiques et techniques. Le gouvernement mise désormais sur la répression. Cent gendarmes mobiles patrouillent tous les jours, on nous filme en permanence. Des personnes ont été contrôlées 35 fois en un mois ! Les gens sont excédés. »
C’est notamment le cas de Michel, un sexagénaire habitant Mandre, opposé depuis quarante ans au projet. « On ne doit plus s’opposer, c’est la nouvelle démocratie de monsieur Macron. Ils nous surveillent sans arrêt, ils nous font souffrir. Mais on ne lâchera pas », assure t-il. Gaspard poursuit : « La Préfecture joue le jeu du pourrissement et fait tout pour que ça dégénère, à l’instar de la répression subie le 15 août à Bure. » Lors de ce rassemblement, Robin, 27 ans, a été grièvement blessé au pied, comme le rapporte France 3 (voir la vidéo ci-dessous).
Nicolas Hulot avant, et après
« Le mutisme de Nicolas Hulot devient presque criminel », critique Gaspard. Cela n’a pas toujours été le cas comme en témoigne cette affiche datée du 9 octobre 2016 où l’on voit celui qui n’était pas encore ministre de la Transition écologique et solidaire tenir une pancarte : « Cigéo BURE, je dis non ! »


En janvier 2016, sur le plateau d’i-Télé, l’actuel ministre de l’Écologie déclarait : « Ces déchets, il faut bien en faire quelque chose mais, en tout cas, on ne peut pas imposer comme ça [ce projet] à des populations locales, sous prétexte qu’[elles] sont dans des endroits un peu éloignés (…), sans concertation, sans transparence. » Il ajoutait : « Le temps de la concertation, de la démocratie participative, est nécessaire. » [3]
Devenu ministre, il nuance sa position le 17 juillet dernier : « On a derrière nous des années de production nucléaire et donc de déchets radioactifs… Qu’est-ce qu’on fait ? On va les balancer dans la mer ou dans l’espace ? Ils ne vont pas disparaître comme par enchantement… Il va falloir les prendre en charge. Mon travail est de vérifier que leur stockage se fasse dans des conditions de sécurité absolue. Ensuite, cela doit nous pousser encore plus à réfléchir sur le nucléaire. Ce n’est pas ma conception d’une civilisation d’avoir des déchets que l’on délègue aux générations futures. Je ne veux pas me précipiter. On voudrait me faire prendre toutes les décisions en urgence, ce ne sera pas le cas. Je veux croiser toutes les informations avant de décider. » [4]
Alors que le ministère de la Transition écologique et solidaire se fait pour l’heure discret sur le dossier Cigéo, plusieurs rassemblements de soutien aux opposants à ce projet d’enfouissement se sont déroulés dans toute la France. Un appel à soutenir la Maison de résistance pour remplacer les portes et fenêtres détruites, ainsi que le matériel saisi durant la perquisition, a été lancé.


Notes

[1
La Maison de la résistance est une ancienne ferme achetée en 2005 par des antinucléaires de France et d’Allemagne regroupés au sein de l’association Bure Zone Libre (BZL).
[2
L’IRSN estime que le projet atteint « une maturité technique satisfaisante », mais pointe que le stockage des déchets « ne présente pas les garanties de sûreté suffisantes ». Source
[3
Voir cet article du Monde
[4
Voir cet entretien avec Ouest France

vendredi 22 septembre 2017

Comment la France s’apprête à devenir un Etat policier où chacun est transformé en potentiel suspect (basta)

PAR 
« Etat policier », « despotisme doux », « césarisme » : juristes, avocats et grandes organisations de défense des droits humains critiquent très sévèrement le projet de loi sur la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, qui doit être votée à l’Assemblée nationale, la semaine prochaine. Remplaçant l’état d’urgence qui arrive à expiration, cette loi en prolonge plusieurs dispositions très controversées, banalise l’arbitraire, et autorise même le recours à des polices privées sur la voie publique. A croire que, bien au-delà de la lutte anti-terroriste, c’est toute forme de contestation de l’ordre établi qui pourrait être visée.
Coincée entre la fameuse réforme du code du travail – dont les cinq ordonnances sont présentées, ce vendredi 22 septembre, dans leur version définitive en Conseil des ministres – et le projet de loi de finance 2018, présenté lors du suivant, mercredi 27 septembre, elle passerait presque inaperçue. Elle n’a pourtant rien d’anecdotique : « C’est une révolution, puisqu’elle nous fait changer de régime politique : jamais une telle concentration des pouvoirs aux mains de l’exécutif n’a été atteinte sous la Vème République », s’insurge Arié Alimi, avocat et membre de la Ligue des Droits de l’Homme. Elle, c’est la loi de sécurité intérieure, attendue à l’Assemblée nationale à partir de lundi prochain dans le cadre d’une session extraordinaire.
Après son adoption par le Sénat le 18 juillet dernier, puis son passage devant la Commission des lois de l’Assemblée la semaine dernière, son vote au Palais Bourbon risque d’être une simple formalité : « La nouvelle majorité parlementaire n’a peut-être ni le choix, ni le recul nécessaire sur ce texte, mais elle n’a pas l’air de s’en préoccuper beaucoup, en tout cas », raconte Florian Borg, avocat au barreau de Lille et membre du Syndicat des avocats de France. Le juriste se dit « inquiet » après son audition par le rapporteur de la loi et par les députés membres de la commission des lois : « D’habitude, il y a toujours du débat, de la confrontation ou, au moins, quelques questions. Là, rien, aucune réaction… . »

Ne dites plus « perquisitions » mais « visites domiciliaires »

Le désintérêt est d’autant plus gênant que l’enjeu est conséquent : le projet de loi « renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme » ne vise rien de moins qu’à remplacer l’état d’urgence installé en France au lendemain des attentats du 13 novembre 2015. Après une sixième et dernière prolongation cet été, ce régime doit être levé au 1er novembre, sans pour autant disparaître du paysage : plusieurs de ces dispositions sont directement reprises dans le texte qui lui succède.
C’est le cas des assignations à résidence ou des perquisitions, maintenues moyennant un petit changement de nom. Il faudra désormais parler respectivement de « mesures individuelles de contrôle et de surveillance » et de « visites domiciliaires » (sic) : « Mis à part quelques petites modifications d’application à la marge, ce sont exactement les mêmes mesures, décrivant les mêmes logiques, décrypte Laurence Blisson, magistrate et secrétaire générale du Syndicat de la magistrature. On les maquille simplement d’une novlangue pour faire croire à une distinction entre l’état d’urgence et l’actuel projet de loi. »

« Abandon des principes qui devaient garantir les individus contre l’arbitraire »

Ce faisant, le projet de loi pérennise donc dans le droit commun un régime d’exception, qui étend considérablement les pouvoirs de l’exécutif, au détriment du judiciaire. « C’est la remise en cause d’un principe fondamental à tout État de droit : la séparation et l’équilibre des pouvoirs, rappelle Kartik Raj, juriste et chercheur pour l’ONG Human Rights Watch (HRW). C’est d’autant plus inquiétant qu’on touche là directement aux libertés individuelles. »
Arié Alimi, lui, n’hésite pas à parler d’un texte « césariste », où les pouvoirs sont de plus en plus concentrés entre quelques mains : « Lorsqu’une démocratie transfère trop de pouvoirs à la police administrative, on appelle cela une dictature du commissaire. Avec de telles dispositions, on peut sans exagération parler d’État policier ». Même son de cloche du côté de la juriste Mireille Delmas-Marty, qui voit la menace d’un « despotisme doux » dans cette « dynamique sécuritaire marquée par l’abandon des principes qui devaient garantir les individus contre l’arbitraire » [1]

Un État policier qui s’étend bien au-delà de la lutte antiterroriste

Comme depuis les débuts de l’état d’urgence, ce choix est officiellement motivé par le besoin de renforcer les dispositifs de lutte contre le terrorisme. Un discours resté inchangé avec l’arrivée du nouvel exécutif : « Le risque auquel on est confrontés aujourd’hui et le niveau élevé de menaces justifient parfaitement que l’on prenne un certain nombre de mesures législatives pour lutter contre le terrorisme » se défendait ainsi le Premier ministre Édouard Philippe, cet été, dans une interview accordée au magazine Society. Une obsession qui est toutefois loin d’être aussi légitime qu’on veut bien la présenter : « La France est déjà dotée d’un arsenal législatif très puissant en la matière, l’un des plus robustes d’Europe. Il ne s’agit pas de nier le problème que représente le terrorisme, mais d’expliquer qu’on n’y fait pas face en empilant à chaque fois une loi supplémentaire… », analyse pour Bastamag Bénédicte Jeannerod, directrice de HRW France [2].
Pis, depuis deux ans, l’état d’urgence a eu pour conséquence d’engendrer toute une série d’abus, outrepassant nettement le cadre présumé de la lutte contre le terrorisme. « Des militants écologistes ont été assignés à résidence lors de la COP 21 ; des interdictions de séjour ont été prononcées à l’encontre de militants participant au mouvement « Nuit Debout » et des interdictions et restrictions de manifester ont été imposées aux organisations syndicales dans le contexte de l’opposition à la loi d’août 2016 relative à la réforme du code du travail » : l’observation émane de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH), qui dresse la liste de ces « dérives […] constatées récemment dans le cadre de l’état d’urgence » dans un avis public dénonçant « une dangereuse banalisation des mesures de l’état d’urgence ». [3]

Une manifestation interdite tous les trois jours

De son côté, Amnesty International avait publié au printemps un important rapportcomptabilisant les différentes entraves, notamment politiques, faites au prétexte de l’état d’urgence : 639 mesures d’interdictions individuelles de manifester ont été prises en 18 mois – dont 574 dans le cadre des manifestations contre la loi travail et 21 dans le cadre de manifestations liées à la COP 21 – ainsi que 155 manifestations interdites, soit une tous les trois jours.
De pareils dévoiements sont-ils à craindre avec l’adoption de ce nouveau projet de loi ? « On ne peut pas préjuger de l’intention, mais on constate qu’on avait le même discours sur le seul ‘’objectif terroriste’’ avec la loi de renseignement en 2015. Aujourd’hui elle a une utilisation beaucoup plus étendue, preuve que ce genre de dispositif peut ensuite servir à autre chose, et notamment à contrôler les mouvements sociaux. Il faut considérer ce texte à plus long-terme » témoigne Arthur Messaud, pour l’association La Quadrature du Net.

Périmètres « de protection » ou de répression ?

En singeant l’état d’urgence, le texte risque donc de produire les mêmes effets. C’est même une certitude pour Arié Alimi : « Ce que l’on a vu avec l’état d’urgence était une expérimentation de ce qui va se pérenniser ici ». En cause, plusieurs mesures qui inquiètent plus particulièrement les juristes et associations de défense des droits de l’Homme. Parmi elles, l’une des « quatre mesures phares » selon le Gouvernement : les « périmètres de protection » que pourront instaurer les préfets pour « assurer la sécurité d’un lieu ou d’un événement soumis à un risque d’actes de terrorisme à raison de sa nature ou de l’ampleur de sa fréquentation », tel que le stipule l’article 1er du projet.
« On pouvait difficilement faire plus vague, note Florian Borg. Ça signifie que le seul nombre peut engendrer l’activation du dit ‘’risque terroriste’’ : cela peut devenir très facilement un outil pour enfreindre le droit de manifester… ». Concrètement, palpations, inspections des bagages et fouilles des véhicules – autant de pouvoirs jusque-là soumis à réquisition judiciaire – pourront dès lors être effectuées sur un périmètre, dont l’étendue et la durée sont régies par des critères tout aussi flous, officiellement « adaptées et proportionnées aux nécessités que font apparaître les circonstances » selon le texte.

Bientôt des polices privées sur la voie publique

La nouvelle loi stipule que ces contrôles pourront être assurés par des forces de sécurité privé. « Il faut désormais s’attendre à voir des agents de Securitas gérer les manifestations de la voie publique », fait valoir Laurence Blisson. Une mesure dont l’étude d’impact du projet de loi questionnait même la constitutionnalité [4]… Une chose est sûre, les débats brûlants sur la gestion et l’encadrement des manifestations, depuis l’entrée en vigueur de l’état d’urgence, ne devraient pas s’éteindre de sitôt. « Les pratiques d’entonnoir et de souricière, les obligations de ranger autocollant ou drapeau risquent de devenir monnaie courante et créer toujours plus de tension, »regrette Florian Borg.
D’autres dispositions nourrissent les préoccupations, telle l’extension massive des contrôles d’identité sur une bonne partie du territoire français. Les « zones frontalières » sont élargies. Auparavant elles ne concernaient que les ports, les aéroports, les gares ferroviaires et routières ainsi qu’une bande de 20 km à partir d’une frontière terrestre. Ce périmètre de 20 km est désormais étendu autour de tous les points de passages de frontières – ports, aéroports, gares – englobant ainsi la plupart des agglomérations françaises, soit 28,6 % du territoire métropolitain, où réside 67 % de la population. La police pourra y mener des contrôles d’identités massifs pendant 12 heures d’affilée (6h jusqu’à présent), en s’affranchissant de tout feu vert judiciaire, du principe constitutionnel de la liberté d’aller et de venir, et du principe européen de libre-circulation.

« Légalisation du contrôle au faciès »

La Cimade a dénoncé l’effacement « des derniers garde-fous juridiques », ouvrant la voie à une forme de « légalisation du contrôle au faciès » [5]. Une accentuation du régime dérogatoire qui pourrait aussi servir d’autres objectifs : « Le caractère exorbitant du dispositif débouche en pratique sur du contrôle discriminatoire et va d’abord servir la politique migratoire, c’est très classique, explique Laurence Blisson. En l’espèce, il pourrait aussi servir à suivre, voire à empêcher les mouvements des militants politiques, puisque chacun est transformé en potentiel suspect ».
Autre mesure dont on parle moins, inscrite la semaine dernière après le passage devant la commission des lois : la possible radiation d’un fonctionnaire, « eu égard à la menace grave qu’il fait peser sur la sécurité publique » (art 4 sexies). « Or, cette fois, étrangement, il n’est pas fait mention du terme « terrorisme » dans la rédaction de cet article… », constate Laurence Blisson. Le concept de « menace grave » étant par définition à géométrie variable, les syndicalistes de la fonction publique auraient-ils, par exemple, du souci à se faire avec le projet de loi ? « Cette disposition incarne tout ce que l’on dénonce sur le fond avec ce texte : accepter un régime dérogatoire aux procédures classiques ainsi que des mesures privatives de liberté sur la base de critères extrêmement flous », poursuit la présidente du Syndicat de la Magistrature.

« Si quelqu’un dérange, il est relativement facile d’invoquer le terrorisme »

A bien des égards, la notion de terrorisme apparaît – quand elle est mentionnée – comme un alibi, tant elle reste insuffisamment définie. Pour mieux y inclure dans son champ d’approche, les mouvements sociaux et les activistes de tout poil ? « Si quelqu’un dérange, il est relativement facile dans ce contexte d’invoquer le terrorisme… », estime ainsi Arthur Messaud. Or le précédent de l’affaire Tarnac rappelle que l’État français peut vite assimiler des mouvements de gauche et écologistes à une forme de terrorisme…
« La Cour de Cassation a tranché en considérant que Tarnac n’était pas du terrorisme, ‘en l’espèce’ précise-t-elle. Le débat est loin d’être clos », alerte Laurence Blisson. L’histoire même du terme « terrorisme » trace des contours politiques incertains, souligne de son côté Arthur Messaud : « C’est un mot qui a longtemps servi à discréditer les mouvements anarchistes en France, puis à combattre des courants politiques anticapitalistes au niveau international. »

Vers une police du comportement ?

Peu importe qu’il vise effectivement, ou non, des entreprises de nature terroriste, ce projet de loi produit un glissement fondamental dans le Droit en se fondant désormais également sur des suspicions ou des prédictions. « C’est un renversement d’un principe essentiel du droit : la preuve. En droit pénal, on juge sur des faits, pas sur des comportements. Avec ce texte, on ouvre grand la porte à une police comportementale », analyse Florian Borg.
Les défenseurs du texte feront valoir qu’il prévoit une évaluation annuelle de la loi, ainsi qu’une clause de caducité pour certaines dispositions. Les assignations à résidence et les perquisitions, notamment, ont une date de péremption fixée au 31 décembre 2020. « Mais on sait d’expérience qu’une fois que c’est rentré dans le droit, il est très difficile de faire marche arrière », tempère Bénédicte Jeannerod. Quand l’exception devient la norme, on finit par s’y habituer, en témoigne l’expérience du Patriot Act aux États-Unis, loi antiterroriste supposée temporaire devenue permanente.
« Il y a un effet cliquet, ces mesures ne disparaîtront plus de notre régime de droit, avance Laurence Blisson. Sans compter le phénomène d’accoutumance alimenté par un discours public largement contaminé au tout-sécuritaire. » Une banalisation qui a déjà frappé de plein fouet l’inconscient des principaux responsables politiques, à l’image de l’invraisemblable lapsus du ministre de l’Intérieur, Gérard Collomb, au moment de défendre ses amendements devant la commission des lois, la semaine dernière, évoquant la « sortie de l’état de droit » pour parler de la sortie de l’état d’urgence [6]. Dans un tel contexte, le discours du Défenseur des Droits, Jacques Toubon, proactif sur la critique de l’état d’urgence et de ses dérives depuis plusieurs mois, semble tristement inaudible : « Les démocraties ne peuvent pas répondre aux barbares en allant sur leur terrain, en mettant en cause la protection des libertés. L’État de droit est et restera notre arme la plus efficace » [7].
Barnabé Binctin
Photos : © Serge d’Ignazio

- Un rassemblement devant l’Assemblée nationale est prévue lundi 25 septembre à 18h, à l’appel du collectif Non à l’état d’urgence permanent, voir leur appel ici
- Une pétition à destination des députés de la République En Marche est en ligne, ouverte à tous les citoyens, sur le site mesopinions

Notes

[1
« De l’état d’urgence au despotisme doux », Libération, 16 juillet 2017. Tribune à lire ici
[2
A lire également, sa tribune parue sur Libération dans laquelle est dénoncé un pays « drogué à l’état d’urgence ».
[3
Voir son avis du 6 juillet 2017, consultable ici
[4
Extrait : « Il n’est donc pas possible, en principe, de déléguer à des personnes privées, des tâches inhérentes à l’exercice par l’Etat de ses missions de souveraineté », page 19 de l’étude d’impact, consultable ici
[5
Voir à ce sujet le communiqué de la Cimade
[6
Vidéo disponible ici
[7
Extrait d’une interview accordée au Monde, le 23 juin 2017, consultable ici

Les ordonnances 2017 vues par Gérard FILOCHE


mercredi 20 septembre 2017

Délocalisations et licenciements boursiers : le beau cadeau du gouvernement aux actionnaires des multinationales (basta)

PAR 
Les salariés de l’usine de Whirlpool d’Amiens – dont le combat avait défrayé la chronique pendant l’élection présidentielle – ont décidé de saisir les prud’hommes avant l’entrée en vigueur des ordonnances. Car avec la nouvelle loi Travail, il sera bien plus difficile de contester en justice une fermeture d’usine ou un plan de licenciements massifs, imposés par une entreprise multinationale en bonne santé financière. Le pouvoir de contrôle exercé par la justice sur ces « restructurations » sera très restreint. Explications.

Dessin : Rodho
Ce fut l’un des moments emblématiques de la campagne présidentielle 2017. Le même jour, Emmanuel Macron et Marine Le Pen s’étaient rendus à Amiens, à la rencontre des salariés de l’usine Whirlpool menacée par un plan social (290 salariés de l’usine et 350 intérimaires et sous-traitants concernés). La maison mère souhaite alors délocaliser la production de lave-linges en Pologne, pour des raisons de coûts. Mi-septembre, ces salariés ont décidé d’attaquer immédiatement leur entreprise aux prud’hommes sans attendre de recevoir leur lettre de licenciement. Les ordonnances annoncées fin août par le gouvernement mis en place par Emmanuel Macron risquent en effet de restreindre radicalement leurs voies de recours face à l’entreprise multinationale qui les emploie. Sous l’impulsion de leur avocat Fiodor Rilov, spécialiste des plans sociaux, ils ont donc décidé de prendre les devants, avant que les ordonnances n’entrent en application.
Continental dans l’Oise (1120 emplois supprimés), Fralib dans les Bouches-du-Rhône (182 emplois), Goodyear à Amiens (800 emplois), Metaleurop dans le Pas-de-Calais (830 emplois supprimés), Molex en Haute-Garonne (300 emplois), Sanofi (suppression de 600 emplois en France)… Ces luttes sociales emblématiques de ces dernières années, autour de fermetures d’usines ou d’établissements décidées brutalement par des sociétés mères, ne se sont pas seulement jouées sur le terrain, dans les bureaux et les ateliers, mais aussi devant les tribunaux. Malgré la complexité et la longueur des procédures, malgré les armées d’avocats dont disposent les multinationales, le pouvoir judiciaire demeure un recours pour les salariés pour faire valoir leurs droits.
En plus d’apporter un semblant de réparation financière aux salariés licenciés, ces victoires judiciaires ont au moins valeur de symbole. Même si, dans la plupart des cas, quand les tribunaux donnent finalement gain de cause aux travailleurs, il est trop tard pour empêcher le fait accompli. Ce n’est qu’en 2016, sept ans après les faits, que les anciens salariés de l’usine Molex de Villemur-sur-Tarn ont vu la Cour d’appel reconnaître définitivement que leur licenciement était « sans cause réelle ni justifiée ». Autrement dit, que leur usine était parfaitement viable sur le plan économique, et que la seule raison de leur fermeture était la recherche de profits de la maison mère et de ses actionnaires. Pour les anciens ouvriers de Continental à Clairoix, il aura fallu cinq ans. Pour ceux de Metaleurop à Noyelles-Godault, huit ans.

Faire comme si la mondialisation n’existait pas

Ce droit de regard du pouvoir judiciaire sur les licenciements économiques a pris une importance croissante. Il n’est pas étonnant que ce pouvoir de contrôle soit dans la ligne de mire des lobbys patronaux. Les ordonnances de réforme du code du travail annoncées par le gouvernement d’Édouard Philippe leur donnent entièrement gain de cause. Les syndicats reprochent à ces ordonnances, dans leur globalité, d’affaiblir les garanties et le pouvoir de négociation des travailleurs individuels et de leurs représentants face aux employeurs. Elles ont aussi un second fil conducteur : réduire autant que possible le pouvoir des juges en matière de droit du travail, et leur capacité à remettre en cause de plans sociaux à la fois sur la forme et sur le fond.
Selon le gouvernement, ce droit de regard judiciaire nuirait à la « sécurité juridique » des investisseurs. C’est la justification du plafonnement des indemnités prudhommales (lire notre décryptage). Les ordonnances prévoient aussi que les juges appelés à se prononcer sur la légitimité de licenciements économiques dans le cadre de plans sociaux - comme prochainement dans le cas de Whirlpool - ne devront plus se baser sur la situation économique du groupe au niveau mondial, comme c’était le cas jusqu’à présent, mais seulement sur sa situation au niveau national. Une différence apparemment technique, mais dont la portée est énorme dans un contexte où les établissements industriels sont désormais contrôlés par de grands groupes multinationaux structurés en une multitude de filiales et de sous-filiales. Un peu comme si l’on enjoignait aux juges de faire comme si la mondialisation n’existait pas. La mesure figurait déjà en 2016 dans la première version de la loi El Khomri, soufflée – déjà – par Emmanuel Macron. Elle avait finalement été retirée du texte.

Un déni de la réalité des multinationales

Faut-il y voir une porte grande ouverte aux licenciements boursiers ? Certains groupes avaient dû renoncer à des plans sociaux insuffisamment justifiés – comme Geberit qui voulait fermer les usines françaises Allia (177 emplois en Saône-et-Loire), avant de faire marche arrière début 2017. Ces entreprises auront davantage les coudées franches. Selon Fiodor Rilov, la direction de Whirlpool attend délibérément la validation des ordonnances pour procéder formellement aux licenciements qu’elle projette. « C’est du sur-mesure pour Whirlpool, estime-t-il. En France, la filiale affiche des comptes médiocres tandis qu’au niveau mondial, le groupe en est à plus d’un milliard de bénéfices nets, après impôts. La direction a donc tout intérêt à attendre que les ordonnances entrent en vigueur pour envoyer les lettres de licenciement car il ne faut normalement que quelques jours pour faire partir ces courriers. Personne ne peut être dupe de cette stratégie. »
« Le juge pourra naturellement continuer à contrôler les éventuels abus de droit, y compris la création de difficultés artificielles pour justifier les licenciements », explique cependant le gouvernement dans sa présentation des ordonnances. En cas de fraude avérée, le juge pourra continuer à sévir. Pour les syndicats, ce mince garde-fou n’est pas très rassurant. Les plans sociaux décortiqués par les tribunaux par le passé et les scandales à répétition d’optimisation fiscale ont démontré l’extraordinaire capacité des multinationales à structurer leurs filiales et à manipuler leurs flux financiers internes au gré de leurs intérêts, par des moyens formellement légaux ou dans une zone grise entre légalité et illégalité.

Licenciements : la France moins protectrice que l’Allemagne ou la Suède

« Quand on connaît les possibilités d’écriture comptable dont dispose une grande entreprise pour basculer ses bénéfices d’un côté ou de l’autre, c’est incroyable, dénonçait le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez lors de son entretien avec Basta !« Par exemple, on crée une holding immobilière qui gère le patrimoine immobilier de l’entreprise. Chaque établissement de l’entreprise paie son loyer à la holding immobilière. Il suffit alors de doubler le loyer d’un site pour le mettre financièrement dans le rouge et justifier des licenciements. C’est ce qui se passe chez GM&S, à La Souterraine dans la Creuse, où le prix du m2 est à peu près équivalent à celui de Paris... »
« La solidarité de toutes les filiales du monde avec la filiale française en difficulté compte parmi les règles qui pénalisent la France dans les comparaisons internationales et qui détournent les investisseurs », justifie le gouvernement. On ne sait pas à quelle « comparaison internationale » il est ici fait référence. Du point de vue de l’OCDE, qui classe les pays selon le degré de protection qu’ils offrent face aux licenciements individuels et collectifs, la France n’est pas particulièrement la plus protectrice, en tout cas moins que des pays comme l’Allemagne, l’Italie ou la Suède [1]. L’argument selon lequel les difficultés de licencier seraient un obstacle à l’emploi est pourtant battu en brèche depuis bien longtemps [2].

Placer artificiellement une filiale en faillite

L’argument paraît d’autant plus léger que la mesure profitera bien entendu avant tout aux multinationales tricolores, qui pourront elles aussi continuer à mettre en concurrence leurs établissements français entre eux et avec leurs homologues à l’étranger, ou restructurer leurs filiales françaises pour en extraire davantage de profits. Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT a d’ailleurs explicitement mis en cause, sur les ondes de France Inter, le plan social en cours à Veolia Eau France, qui, malgré ses bénéfices, a annoncé 572 suppressions d’emploi et environ un million de mobilités – le quatrième plan social en trois ans selon les syndicats.
En 2015 déjà, la loi Macron avait supprimé l’obligation pour les sociétés mères de financer les plans sociaux de leurs filiales lorsque celles-ci se retrouvent en liquidation judiciaire. Selon les critiques, cela offrait déjà la possibilité à certains groupes indélicats de placer artificiellement leurs filiales en faillite pour s’affranchir de leurs obligations. C’est ce que les syndicats reprochent au groupe Eram, qui a longtemps refusé de financer le plan de suppression d’emploi de son ancienne filiale Tati (800 emplois concernés), avant de finalement mettre modestement la main à la poche.

Le « devoir de vigilance » des multinationales menacé

Ce grignotage progressif des minces droits gagnés par les travailleurs face aux grands groupes mondialisés est à mettre en regard avec les laborieux efforts pour obtenir une reconnaissance juridique de la réalité des multinationales et de leur pouvoir. Dans les faits, les travailleurs et leurs entreprises sont soumis aux stratégies des dirigeants des grands groupes et de leurs actionnaires, via un jeu de business units, de filiales et de sous-traitance. Le droit reconnaît à peine cette réalité, qu’il s’agisse de droits des travailleurs, d’impacts environnementaux ou de violations des droits humains. En pratique, il est quasi impossible de faire comparaître en justice une multinationale ou un fonds d’investissement européen ou nord-américain pour des violations de droits humains ou des atteintes à l’environnement occasionnées par l’une des ses filiales à l’étranger, ou qu’elles auraient encouragées chez l’un de leurs sous-traitants. En matière de droit du travail, il existe quelques marges de manœuvre, comme la reconnaissance du statut de « co-employeur » des sociétés mères aux côtés de leurs filiales. Ce sont ces possibilités que les ordonnances cherchent à réduire.
La France a pourtant voté début 2017 une loi emblématique sur le « devoir de vigilance » des multinationales : une première reconnaissance de la responsabilité des sociétés mères ; où que se situent leurs filiales ou leurs sous-traitants. Celles-ci devront désormais élaborer un plan de vigilance des atteintes aux droits humains liées à leurs activités, dont la mise en œuvre effective pourra être contrôlée par un juge. La loi a été ardemment combattue par les lobbys patronaux.

Bonus pour la finance

Est-ce à dire que d’un côté, la responsabilisation des multinationales progresse en ce qui concerne le respect des droits humains fondamentaux, tandis qu’elle régresse pour les travailleurs eux-mêmes ? En réalité, les ordonnances font peser une hypothèque sur la mise en œuvre effective de la loi sur le devoir de vigilance, qui risque fort de se restreindre à un exercice de communication. « Du côté syndical, on voyait dans l’élaboration des plans de vigilance une opportunité de réveiller le dialogue social dans les grands groupes, en abordant des nouveaux sujets et en s’interrogeant sur les stratégies et les impacts de leurs activités. Avec les mesures annoncées, notamment la baisse des moyens des représentants du personnel, on voit mal comment ces espoirs pourraient se concrétiser », déplore une experte auprès des comités d’entreprises et CHSCT.
Officiellement présentées comme « donnant la priorité aux TPE/PME », les ordonnances contiennent quelques cadeaux de choix pour les multinationales. La restriction du droit de regard des juges en cas de licenciement collectif fait sauter l’un des derniers garde-fous judiciaires. Elle entérine la course au moins-disant social qui prévaut dans les multinationales du secteur industriel, où les directions mettent en concurrence les usines entre elles pour réduire les coûts, sur fond de menace permanente de suppressions d’emplois. Ces ordonnances risquent de renforcer encore le pouvoir de la finance sur la gestion des entreprises.

Les États-Unis pour modèle

Autant de problématiques dont sont pourtant parfaitement conscients Emmanuel Macron, un temps banquier d’affaires, et la ministre du Travail Muriel Pénicaud, chargée de défendre les ordonnances. Celle-ci a été mise en cause pour avoir, alors qu’elle était directrice des ressources humaines du groupe Danone en 2013, réalisé une plus-value de 1,13 million d’euros sur ses stock-options à l’occasion d’un plan de suppression de 900 emplois en Europe. Celui-ci avait fait grimper le cours de l’action du groupe.
Sans oublier que ces ordonnances s’inscrivent dans un arsenal d’autres mesures qui profiteront en priorité aux multinationales et à leur trésorerie : la baisse programmée de l’impôt sur les sociétés, la baisse de cotisations patronales ou le déplafonnement du crédit impôt recherche. Les grands groupes français affichent pourtant déjà des profits record en 2017 : plus de 56 milliards pour le premier semestre, et peut-être 100 milliards au final. Ce n’est pas encore le niveau des profits affichés par les multinationales américaines et leurs actionnaires. Mais, avec le monde que nous préparent les ordonnances, c’est bien dans cette direction que nous nous dirigeons.
Olivier Petitjean

mardi 19 septembre 2017

« Petit guide de résistance à la loi Travail XXL » 8 - (les économistes atterrés et Attac france)

Tous micro-entrepreneurs, c’est l’avenir du travail !

lundi 28 août 2017par Attac FranceLes Économistes atterrés
C’est un bobard « en même temps » : il s’adresse aux jeunes et aux chômeurs·euses, appelé·e·s à se prendre en main, à être autonomes et modernes, et en même temps aux professions réglementées comme les taxis, sommés de renoncer à des « privilèges » d’un autre âge.

« L’emploi indépendant devient la nouvelle norme »

La montée récente de l’auto-entrepreneuriat fait l’objet de tous les fantasmes. Pour les néolibéraux, on assisterait à la généralisation de l’entrepreneur autonome dans un monde concurrentiel et informatisé, tandis que certains idéalistes à gauche y voient l’avènement du travailleur enfin affranchi de l’aliénation et de la subordination à un employeur.
Pourtant, le salariat résiste. La part des non-salarié·e·s dans l’emploi total a considérablement reculé entre 1970 et les années 2000, notamment dans l’agriculture. Elle n’a commencé à remonter faiblement que depuis 2009, sous l’impulsion de la loi dite de « modernisation de l’économie » d’août 2008 encourageant l’auto-entrepreneuriat. Aujourd’hui, 11 % des emplois sont non-salarié·e·s : plus que les 8-9 % des années 2000-2009, mais bien moins que les 20 % de 1970. Il n’y a pas de lame de fond.
L’auto-entrepreneuriat a pourtant des effets majeurs sur l’emploi indépendant. Il déstabilise des professions indépendantes « classiques » : par exemple, pour exercer, les artisans taxi doivent réussir un concours et investir dans une licence et un véhicule. Ils font désormais face à des chauffeurs de plateformes, VTC ou Uber, n’ayant ni le certificat de taxi (la formation VTC est bien moins exigeante), ni la licence et contraint à des cadences infernales du fait de leurs faible niveau de rémunération. Si cette concurrence a pu se développer, c’est parce que les pouvoirs publics ont ouvert la profession de taxi à des auto-entrepreneurs non professionnels.

« L’auto-entrepreneuriat, c’est l’emploi d’avenir »

Loin des clichés sur leur autonomie, les auto-entrepreneurs sont souvent poussés vers ce statut par la précarité ou les discriminations des employeurs. Plutôt qualifiés, ils cherchent à compléter les revenus d’une activité salariée précaire ou basculent malgré eux vers ce statut. quand ce ne sont pas d’ancien·ne·s chômeurs·euses ou inactifs·ves qui en obtiennent des revenus insuffisants. Leur subordination de fait à un client ou à un donneur d’ordre est fréquente, ces derniers cherchant à disposer d’une main-d’œuvre flexible sans assumer les obligations d’un employeur, une forme extrême d’exploitation.

L’ubérisation n’est pas l’avenir du travail.

La précarité de ces emplois et la course au moins-disant social alimentent les revendications et les luttes de ces précaires. L’avenir, c’est la régulation de l’emploi indépendant, et sa réintégration dans le salariat quand il n’est pas indépendant.