1er février 2013
Parole des sans voix au forum de
Davos
Eric SIMON
photo : Olafur
Ragnar Grimsson
Prenant à contre pied les oligarques invités au forum économique de Davos,
devant un parterre de journalistes le Président islandais Olafur Ragnar Grimsson
a suggéré à ses homologues aux affaires de "penser davantage aux peuples
qu’aux banques". [1]
Comme chaque année, patrons de multinationales, dirigeants de grandes banques et responsables politiques s’étaient passés le mot pour galvaniser un auditoire de communicants acquis à leur cause. Les médias français de l’establishment ne manquaient pas à l’appel. France Info est l’unique grand média à avoir évoqué à la marge le discours détonnant du président islandais. Une île où "nous avons laissé les banques faire faillite er nous sommes occupés des citoyens, et ça a marché", a affirmé le Président Grimsson. [2]
Déjà au lendemain de la création d’une supervision bancaire, le jeudi 11 janvier 2013 monsieur Grimsson avait voulu faire passer un message aux technocrates de l’Union Européenne. "Accepter de laisser les banques tomber en faillite fut l’acte le plus difficile qu’il m’ait été donné de prendre. Mais sans doute le meilleur. Il est l’une des raisons fondamentales de la forte reprise économique de notre pays au regard des autres pays européens. Il valait mieux laisser l’Islande s’autogérer que de laisser l’Union Européenne parler en son nom. Le pays en recueille les fruits aujourd’hui". [3]
En marge du forum économique, un journaliste dénommé Stephen Cole l’ interview sur le vif. Le Président Grimsson va droit au but. "Nous avons été assez sages de ne pas suivre les politiques traditionnelles qui ont prévalu normalement en Occident au cours des 30 dernières années. Nous avons introduit le contrôle des changes, nous avons laissé les banques faire faillite, nous avons soutenu les plus pauvres, nous n’avons pas adopté les mesures d’austérité comme ailleurs en Europe, et le résultat final, 4 ans plus tard, est que l’Islande a accompli des progrès et une relance très différente des autres pays européens qui ont souffert de la crise financière".
Dans les couloirs de Davos, il poursuit : "Pourquoi considère-t-on que les banques sont des saintes-chapelles de l’économie moderne, et pourquoi ne peuvent-elles pas faire faillite comme les compagnies aériennes ou les entreprises de télécommunication, si elles ont été gérées d’une façon irresponsable ? La théorie que vous devez payer pour sauver les banques est une théorie selon laquelle les banquiers peuvent jouir de leurs propres bénéfices et de leur succès, puis que les gens ordinaires payent pour leurs échecs au moyen des impôts et de l’austérité, et dans les démocraties éclairées, les gens ne l’accepteront pas sur le long terme ".
Parole d’expert, parole inattendue d’un Chef d’Etat : " L’une des choses que nous avons apprises après l’effondrement des banques en Islande, c’est que les banques islandaises, comme les banques britanniques ou les banques américaines, sont devenues des entreprises de haute technologie, qui recrutent des ingénieurs, des mathématiciens et des informaticiens. Et quand elles se sont effondrées, le secteur innovant de notre économie, le secteur informatique, le secteur des TI s’est mis à prospérer, et en fait, sur les trois dernières années, il a eu de bien meilleurs résultats que jamais auparavant dans son histoire. Donc la leçon à en tirer, c’est la suivante : si vous voulez que votre économie soit compétitive dans le secteur innovant du 21ème siècle, un secteur financier fort qui prend les talents de cet autre secteur, même un secteur financier qui marche bien, est en fait une mauvaise nouvelle". [4]
Nous savons maintenant, qu’en tout état de cause, la caste politique d’alternance au pouvoir a trahi, encore et toujours...
Eric SIMON
EN COMPLEMENT
Crise financière : Et l’Islande ne banquât pas ...
La justice européenne vient d’enteriner un précédent propre à plonger le monde de la finance dans un cauchemar les yeux éveillés. L’Islande, si petite soit-elle, renvoie, grâce à ce jugement sans appel, à la case "c’est moi qui paie" l’Angleterre et la Hollande après la faillite de la banque en ligne Icesave. De quoi glacer plus d’un banquier .....
Les Islandais réputés impayables ne paieront pas. La cour de justice de l’Association européenne de libre-échange (AELE) a estimé finalement que l’île ne banquera pas pour les banques privées.
Une jurisprudence qui va sans doute troubler le sommeil des financiers et des gouvernants. A moins qu’ils ne s’entendent une fois de plus pour trouver une imparable parade.
En attendant que les directions juridiques se triturent les méninges, nous ne pouvons qu’espérer que la nouvelle ne soit pas passée inaperçue en Grèce ou encore en Espagne. Dans la rue.
Même si les « faillites » de ces deux membres de l’UE sont assez différentes, il n’en demeure pas moins que les nouveaux usuriers y sont regardés de travers par des populations exsangues et peu enclines à leur pardonner leurs embarras de gestion.
BANQUEROUTE EN LIGNE
Donc, le président islandais, Olafur Ragnar Grimsson pavoise et sort les feux d’artifices. La justice lui a emboîté le pas et libère le contribuable de Reykjavik (et alentours) de fouiller leurs poches pour rembourser les déposants étrangers victimes de la banqueroute en ligne de Icesave, filiale de Landsbanski, première banque privée du pays.
Souvenons-nous, après la faillite de la maison-mère, l’Islande avait du dare-dare prendre dà sa charge son système bancaire et « nationaliser ses pertes » après des décennies de bénéfices enrichissant le secteur ... privé.
La faillite d’ Icesave avait plongé l’île dans un haletant feuilleton politico-financier suivi avec anxiété par le monde des banquiers en émoi. Cette banque en ligne représentait la modique somme de quatre milliards d’euros de dépôts.
Pas de quoi fouetter un Jérôme Kerviel mais comme les dits déposant étaient principalement british et néerlandais, ce furent Londres et La Haye qui raquèrent. Mais présentèrent derechef la petite note à Reykjavik.
EI, ENGU OU EKKERT ?
Et là, ça a vivement toussé. Le chef des Vikings Olafur Ragnar Grimsson (on se croirait dans Astérix) a tapé du poing sur la table et interrogé le clan des contribuables par référendum et par deux fois (2010 et 2011).
Même réponse : « Nibe ! », ce qui implique une forte négation dans l’idiome du coin. (NDLR : en vrai : ei,eigi,ekkert,ekki,engu. Et oui, ces gens là ont cinq manières d’envoyer un banquier sur les roses ! )
Du coup, la Commission européenne, fort marrie de voir l’Angleterre et la Hollande le bec dans l’eau) poursuivait l’Islande devant les tribunaux arguant qu’il y avait violation de la directive selon laquelle il devait y avoir un minimum de 20.000 euros de garantie pour les déposants (100.000 à présent) d’une banque en faillite.
ETRANGER AUX AFFAIRES
Le hic est que si l’Etat est contraint de créer une telle garantie, rien de l’oblige à la garnir en deniers publics, rétorquait l’Islande. L’AELE lui a donné raison dans un jugement... définitif.
Reykjavik, malicieuse, proclame que cette décision de justice « représentera un exemple pour les années à venir dans les annales de la loi européenne » par la voix du ministre des affaires étrangères.
Ossur Skarphedisson. Et visiblement « étranger aux affaires » des banquiers de tous les pays, unis ou non.
En résumé : qui a dit qu’on ne pouvait pas intervenir contre les Goldman Sachs de tous poils ?
Pas notre Cahuzac national, gageons le ...
http://mobile.agoravox.fr/tribune-libre/article/crise-financ...
Comme chaque année, patrons de multinationales, dirigeants de grandes banques et responsables politiques s’étaient passés le mot pour galvaniser un auditoire de communicants acquis à leur cause. Les médias français de l’establishment ne manquaient pas à l’appel. France Info est l’unique grand média à avoir évoqué à la marge le discours détonnant du président islandais. Une île où "nous avons laissé les banques faire faillite er nous sommes occupés des citoyens, et ça a marché", a affirmé le Président Grimsson. [2]
Déjà au lendemain de la création d’une supervision bancaire, le jeudi 11 janvier 2013 monsieur Grimsson avait voulu faire passer un message aux technocrates de l’Union Européenne. "Accepter de laisser les banques tomber en faillite fut l’acte le plus difficile qu’il m’ait été donné de prendre. Mais sans doute le meilleur. Il est l’une des raisons fondamentales de la forte reprise économique de notre pays au regard des autres pays européens. Il valait mieux laisser l’Islande s’autogérer que de laisser l’Union Européenne parler en son nom. Le pays en recueille les fruits aujourd’hui". [3]
En marge du forum économique, un journaliste dénommé Stephen Cole l’ interview sur le vif. Le Président Grimsson va droit au but. "Nous avons été assez sages de ne pas suivre les politiques traditionnelles qui ont prévalu normalement en Occident au cours des 30 dernières années. Nous avons introduit le contrôle des changes, nous avons laissé les banques faire faillite, nous avons soutenu les plus pauvres, nous n’avons pas adopté les mesures d’austérité comme ailleurs en Europe, et le résultat final, 4 ans plus tard, est que l’Islande a accompli des progrès et une relance très différente des autres pays européens qui ont souffert de la crise financière".
Dans les couloirs de Davos, il poursuit : "Pourquoi considère-t-on que les banques sont des saintes-chapelles de l’économie moderne, et pourquoi ne peuvent-elles pas faire faillite comme les compagnies aériennes ou les entreprises de télécommunication, si elles ont été gérées d’une façon irresponsable ? La théorie que vous devez payer pour sauver les banques est une théorie selon laquelle les banquiers peuvent jouir de leurs propres bénéfices et de leur succès, puis que les gens ordinaires payent pour leurs échecs au moyen des impôts et de l’austérité, et dans les démocraties éclairées, les gens ne l’accepteront pas sur le long terme ".
Parole d’expert, parole inattendue d’un Chef d’Etat : " L’une des choses que nous avons apprises après l’effondrement des banques en Islande, c’est que les banques islandaises, comme les banques britanniques ou les banques américaines, sont devenues des entreprises de haute technologie, qui recrutent des ingénieurs, des mathématiciens et des informaticiens. Et quand elles se sont effondrées, le secteur innovant de notre économie, le secteur informatique, le secteur des TI s’est mis à prospérer, et en fait, sur les trois dernières années, il a eu de bien meilleurs résultats que jamais auparavant dans son histoire. Donc la leçon à en tirer, c’est la suivante : si vous voulez que votre économie soit compétitive dans le secteur innovant du 21ème siècle, un secteur financier fort qui prend les talents de cet autre secteur, même un secteur financier qui marche bien, est en fait une mauvaise nouvelle". [4]
Nous savons maintenant, qu’en tout état de cause, la caste politique d’alternance au pouvoir a trahi, encore et toujours...
Eric SIMON
EN COMPLEMENT
Crise financière : Et l’Islande ne banquât pas ...
La justice européenne vient d’enteriner un précédent propre à plonger le monde de la finance dans un cauchemar les yeux éveillés. L’Islande, si petite soit-elle, renvoie, grâce à ce jugement sans appel, à la case "c’est moi qui paie" l’Angleterre et la Hollande après la faillite de la banque en ligne Icesave. De quoi glacer plus d’un banquier .....
Les Islandais réputés impayables ne paieront pas. La cour de justice de l’Association européenne de libre-échange (AELE) a estimé finalement que l’île ne banquera pas pour les banques privées.
Une jurisprudence qui va sans doute troubler le sommeil des financiers et des gouvernants. A moins qu’ils ne s’entendent une fois de plus pour trouver une imparable parade.
En attendant que les directions juridiques se triturent les méninges, nous ne pouvons qu’espérer que la nouvelle ne soit pas passée inaperçue en Grèce ou encore en Espagne. Dans la rue.
Même si les « faillites » de ces deux membres de l’UE sont assez différentes, il n’en demeure pas moins que les nouveaux usuriers y sont regardés de travers par des populations exsangues et peu enclines à leur pardonner leurs embarras de gestion.
BANQUEROUTE EN LIGNE
Donc, le président islandais, Olafur Ragnar Grimsson pavoise et sort les feux d’artifices. La justice lui a emboîté le pas et libère le contribuable de Reykjavik (et alentours) de fouiller leurs poches pour rembourser les déposants étrangers victimes de la banqueroute en ligne de Icesave, filiale de Landsbanski, première banque privée du pays.
Souvenons-nous, après la faillite de la maison-mère, l’Islande avait du dare-dare prendre dà sa charge son système bancaire et « nationaliser ses pertes » après des décennies de bénéfices enrichissant le secteur ... privé.
La faillite d’ Icesave avait plongé l’île dans un haletant feuilleton politico-financier suivi avec anxiété par le monde des banquiers en émoi. Cette banque en ligne représentait la modique somme de quatre milliards d’euros de dépôts.
Pas de quoi fouetter un Jérôme Kerviel mais comme les dits déposant étaient principalement british et néerlandais, ce furent Londres et La Haye qui raquèrent. Mais présentèrent derechef la petite note à Reykjavik.
EI, ENGU OU EKKERT ?
Et là, ça a vivement toussé. Le chef des Vikings Olafur Ragnar Grimsson (on se croirait dans Astérix) a tapé du poing sur la table et interrogé le clan des contribuables par référendum et par deux fois (2010 et 2011).
Même réponse : « Nibe ! », ce qui implique une forte négation dans l’idiome du coin. (NDLR : en vrai : ei,eigi,ekkert,ekki,engu. Et oui, ces gens là ont cinq manières d’envoyer un banquier sur les roses ! )
Du coup, la Commission européenne, fort marrie de voir l’Angleterre et la Hollande le bec dans l’eau) poursuivait l’Islande devant les tribunaux arguant qu’il y avait violation de la directive selon laquelle il devait y avoir un minimum de 20.000 euros de garantie pour les déposants (100.000 à présent) d’une banque en faillite.
ETRANGER AUX AFFAIRES
Le hic est que si l’Etat est contraint de créer une telle garantie, rien de l’oblige à la garnir en deniers publics, rétorquait l’Islande. L’AELE lui a donné raison dans un jugement... définitif.
Reykjavik, malicieuse, proclame que cette décision de justice « représentera un exemple pour les années à venir dans les annales de la loi européenne » par la voix du ministre des affaires étrangères.
Ossur Skarphedisson. Et visiblement « étranger aux affaires » des banquiers de tous les pays, unis ou non.
En résumé : qui a dit qu’on ne pouvait pas intervenir contre les Goldman Sachs de tous poils ?
Pas notre Cahuzac national, gageons le ...
http://mobile.agoravox.fr/tribune-libre/article/crise-financ...