samedi 16 mars 2013

Plongez dans les rouages d’une «machine de guerre américaine» dopée aux stupéfiants (Le journal du siècle)

Plongez dans les rouages d’une «machine de guerre américaine» dopée aux stupéfiants

« La vérité est que depuis la Seconde Guerre mondiale, la CIA, sans opposition de la part de la classe dominante, est devenue dépendante à l’utilisation d’alliés pratiquant le trafic de drogue, …
… et rien ne permet de penser que l’Agence ait commencé à changer cette façon de faire. Les conséquences dévastatrices de l’utilisation et de la protection des trafiquants par la CIA sont visibles dans les statistiques de la production de drogue : elle augmente là où les Américains interviennent, et décline lorsque la présence américaine touche à sa fin. »

Dans son dernier ouvrage solidement documenté, l’ancien diplomate canadien Peter Dale Scott revient sur l’histoire fascinante et profondément dérangeante de l’utilisation de la drogue dans la stratégie militaire et politique des États-Unis.
La démonstration de l’auteur, résume le général Bernard Norlain, est « stupéfiante » :
« La lutte contre le communisme (en Asie du Sud-Est, puis en Afghanistan et en Amérique du Sud) a forgé une véritable machine de guerre réunissant de façon plus ou moins informelle et secrète, les services de renseignement, les milieux d’affaires et de la finance, et des mafias. Cette machine de guerre s’est maintenant donné comme objectif d’acquérir et maintenir la suprématie totale sur le reste du monde », ce que le Pentagone appelle le « full spectrum dominance ».
« Vouloir résumer en quelques mots un livre aussi riche en informations et en révélations serait illusoire », poursuit l’ancien chef de cabinet militaire de Jacques Chirac et de Michel Rocard, à propos d’un ouvrage dont l’une des forces est de s’appuyer sur des témoignages de première main, ainsi que sur nombre de rapports officiels, en particulier sur les liens entre la finance états-unienne et le blanchiment de la drogue.
La commission d’enquête du Sénat américain estime par exemple qu’entre 500 et 1 000 milliards de dollars de recettes criminelles sont blanchis par les banques chaque année, la moitié de ces fonds circulant à travers les banques des États-Unis.
Plus ahurissant encore, on méditera ce constat d’Antonio Maria Costa, directeur de l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC), dressé dans le sillage de la crise financière de 2008, lorsque le système bancaire était au bord du gouffre : ce sont « les milliards de narcodollars (qui) ont empêché le système de sombrer au paroxysme de la crise (financière) globale ».
Les dégâts les plus visibles de cette politique de soutien aux trafiquants de drogue, dont l’un des plus fameux demeure l’islamiste afghan Gulbuddin Hekmatyar, se retrouvent bien sûr dans les pays visés par la machine de guerre américaine.
L’auteur cite en conclusion l’actuel président du Pakistan, Asif Ali Zardari :
« Les États-Unis ont abandonné leurs valeurs démocratiques pour soutenir des dictateurs, nous manipuler et nous exploiter. (La décennie 1980) transforma notre nation pacifique en une société de “l’héroïne et de la kalachnikov”, une nation gangrenée par les armes et la drogue. »