Emmanuel Macron est passé par la, et Myriam El Khomri l’a suivi sagement : la loi sur la flexibilité du travail, et surtout sur la flexibilité des travailleurs, fait la part belle aux patrons… reste à savoir comment les concernés vont réagir ?
Tout est remis en question… les 35 heures, le montant des heures supplémentaires… les nouvelles possibilités de licenciements… et Hollande pourra se flatter de dire : Sarközil’avait promis, mais moi, je l’ai fait.
D’autant que le gouvernement a déjà prévenu, en cas de difficultés, on ne se privera pas d’utiliser le 49/3.
Bien évidemment, la ministre affirme, droite dans ses bottes : « il n’y a aucun recul du droit des salariés »…
On ne demande qu’à la croire, mais si l’on lit attentivement tout ce qui est contenu dans la loi, on s’aperçoit qu’il s’agit exactement du contraire.
Au-delà des textes officiels, rédigés dans un jargon permettant de présenter une réalité plus acceptable, essayons de décrypter la loi prévue.
Alors que la ministre prétend « vouloir améliorer la compétitivité des entreprises, développer et préserver l’emploi, réduire la précarité du travail et améliorer les droits des salariés », elle propose dans le texte officiel des initiatives qui ne vont pas dans ce sens là.
Elle a beau jeu de promettre que les changements qui arrivent s’appuieront sur des accords qui devront être majoritaires, ajoutant que les syndicats signataires devront représenter au moins 50 % des salariés…sachant fort bien que la désertion continue dans les rangs des travailleurs, lesquels sont de moins en moins nombreux à se syndiquer.
En 1948 la CGT comptait 4 millions d’adhérents, pour moins de 700 000 aujourd’hui.
Ils ont pour la moitié plus de 50 ans, et seulement 15% ont moins de 35 ans. lien
La ministre du travail a beau jeu de s’engager dans cette brèche, profitant de cette faiblesse, mais comment les travailleurs réagiront-ils ?
Médiapart, généralement bon analyste, fait la même réflexion. lien
De plus, si la ministre assure vouloir garder les 35 heures, le taux de majoration des heures supplémentaires va passer à 10%…et elle prévoit des durées de travail allant jusqu’à 46 heures hebdomadaires pendant 16 semaines….ajoutant que le maximum pourrait aller jusqu’à 48 heures, se basant sur le plafond européen…affirmant qu’il s’agit d’une demande forte des travailleurs eux même.
Évoquant un « recours excessif » au service des prudhommes, le barème des indemnités éventuelles va être revu à la baisse…et pour justifier cette décision, elle se base sur ce qui ce fait chez nos voisins allemands, espagnols, Italiens, ou anglais.
Dans cette loi, les règles vont être très assouplies, et c’est une litote, dans le cas de licenciements économiques…l’entreprise aura beau jeu de convoquer une mévente, une trésorerie aux abois, pour licencier sans risque autant de personnels qu’elle voudra, même si, dans un autre pays, l’une de ses filiales fait de gros bénéfices.
Mais la ministre présente ça autrement, assurant qu’il s’agit de « clarifier le domaine d’interprétation par le juge de la difficulté économique »…et assure : « nous ne faisons ni plus ni moins que de nous aligner sur les droits applicables dans les autres pays ».
Elle affirme aussi que le modèle qu’elle défend n’a rien à voir avec les « mini jobs allemands ou le contrat zéro heure anglais », mais si l’on y regarde de plus près, c’est bien pourtant le résultat final qui sera mis en place dans notre pays. lien
Prendre l’Allemagne comme exemple, alors que les lois Hartz, ont fait passer quelques millions de chômeurs de la case chômage à la case misère, n’est peut-être pas l’idéal dont rêvent les français. lien
Lorsqu’elle a remplacé Rebsamen, Hollande lui a demandé de tout faire pour « inverser la courbe du chômage », mais on voit mal comme y arriver en facilitant les licenciements et en permettant l’augmentation du nombre d’heures travaillées. lien
Chacun sait que le travail se fait de plus en plus rare dans notre pays, et on imagine sans peine que la multiplication des heures de travail provoquera au contraire l’augmentation du nombre de chômeurs.
Celle qui avait vécu un grand moment de solitude dans l’émission de Jean-Jacques Bourdin, en affirmant qu’un CDD pouvait être renouvelé 3 fois, et jusqu’à 3 ans, ce qui aurait du lui valoir une logique mise à pied, continue donc contre vents et marées, à jouer la carte du patronat, contre celle des salariés…lien
Reste à savoir comment ces derniers réagiront.
En effet, les largesses hollandaises en faveur des grands patrons n’ont pas été suivies de réels effets, et les promesses de ces derniers de créer des milliers d’emplois sont loin d’avoir été tenues…mais Hollande persiste et signe…largement soutenu par Valls etMacron.
On est bien éloigné des 690 000 à 1 590 000 emplois promis par le Medef, en échange des concessions gouvernementales. lien
Le journal « Libération » a recensé les « 7 concessions » déjà obtenues depuis le début du quinquennat, mais il semble que ça ne suffise pas aux patrons.
De la fiscalité du capital moins salée que prévue, au rabotage du droit du travail, en passant par l’impôt sur les sociétés réduit de 20 milliards, la loi timorée sur les banques, le non encadrement des rémunérations patronales, l’écotaxe au cimetière, et le pacte à 20 milliards en plus, les largesses hollandaises se sont multipliées largement au-delà du raisonnable. lien
Pour la petite histoire, Bernard Arnault, président du groupe LVMH, l’un des patrons les plus riches du pays, a vu sa fortune augmenter considérablement en 2015 : il possède aujourd’hui 37,2 milliards de dollars. lien
En même temps, les ouvrières de Poix-du Nord, dans le 59, celles qui fabriquaient les costumes Kenzo, du groupe LVMH, étaient payées au Smic…or trouvant ces salaires trop élevés, l’usine a été délocalisée d’abord en Pologne, puis en Bulgarie. lien
La production Givenchy, appartenant au même groupe, ne vient plus de Normandie : ce sont des polonaises, payées 200 euros par mois qui en assurent maintenant la fabrication.lien
Mais comme le dit avec un certain cynisme, Gattaz, le patron du Medef, la facilité pour les patrons de licencier délivrera les salariés de la peur de se faire licencier. lien
Comme dit avec humour mon vieil ami africain végétarien : « un jour les pauvres n’auront plus rien d’autre à manger que les riches ».
L’image illustrant l’article vient de guetty.image.co.uk
Merci aux internautes pour leur aide précieuse
Olivier Cabanel